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Services financiers : Maurice se positionne comme le centre financier pour les investissements transfrontaliers en Afrique

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Pour le centre financier international de Maurice, l’accent est désormais mis sur le continent africain. L’île Maurice peut-elle devenir la destination privilégiée pour les investissements transfrontaliers en Afrique ? Il semble que oui étant donné que la contribution du Centre financier international (CFI) de Maurice au développement économique de l’Afrique est énorme, soit 82 milliards de dollars d’investissements.

Depuis des décennies, l’île Maurice est la principale institution financière internationale à servir et à soutenir les investissements en Afrique. Ce rôle économique important joué par Maurice a été expliqué avec justesse en 2021 dans le rapport de Capital Economics intitulé Facilitating Growth, Employment & Prosperity in Africa. Le rapport souligne que pour l’Afrique continentale, le centre financier international de Maurice a servi de médiateur pour 82 milliards d’USD d’investissements, facilitant 6 milliards d’USD de recettes fiscales et 4,2 millions d’emplois. Ainsi, l’importance du centre financier international de Maurice par rapport à l’Afrique ne fera que se renforcer à mesure que nous progressons dans l’avenir et que le potentiel économique de l’Afrique est libéré.

Comme le fait ressortir maître François de Senneville, Associé ‑ Head Africa Desk de Fieldfisher, l’Afrique est notre continent ; c’est donc tout naturel qu’il soit la cible privilégiée de notre centre financier national. Ce choix n’est pas une nouveauté, mais une confirmation qui date maintenant de plusieurs années. Il a déjà démontré sa pertinence pour permettre à notre centre financier de continuer à se développer. Selon ses observations, pour continuer à émerger comme destination privilégiée pour les investissements en Afrique, il conviendra de veiller à pouvoir continuer à mettre en avant les différents arguments qui ont permis jusqu’à maintenant d’asseoir sa crédibilité et sa compétitivité.

Notre valeur en tant que pôle d’investissement, financier et commercial pour le Continent est substantielle ; 9 % de l’ensemble des IDE vers l’Afrique sont générés par Maurice. Ensemble, cela ouvre la voie et contribue à réaliser le potentiel économique de notre continent et à l’aider à atteindre les Objectifs de développement durable. Maurice s’est forgé une solide réputation en tant que centre financier international et connaît une croissance résiliente depuis des décennies, même pendant la pire crise économique que nous ayons connue. En effet, malgré les conséquences de la pandémie de Covid-19, le secteur des services financiers a progressé de 11 % en 2020.

Bien que de nombreuses personnes connaissent les investissements en Afrique par les fonds souverains, les organisations à but non lucratif et les instituts de financement du développement, plus de trois quarts des investissements sur le Continent depuis Maurice sont fournis par des clients corporate. Les investisseurs utilisent Maurice pour négocier des investissements en Afrique continentale, qui soutiennent une activité économique réelle, des emplois et des développements d’infrastructures. Près de trois cinquièmes de ces investissements étrangers prennent la forme de participations, de prêts ou de titres de créance directement dans les entreprises africaines. Un autre quart prend la forme d’investissements de portefeuille dans des actions d’entreprises africaines ou des titres de créance.

Comme le souligne Nadeem Carrim, Head of Relationships – Global Business à AfrAsia Bank, l’île Maurice est un itinéraire éprouvé pour les organisations internationales qui font des affaires en Afrique, car c’est le deuxième continent le plus peuplé avec 1,35 milliard d’habitants. Ce chiffre devrait doubler d’ici à 2050 pour atteindre 2,5 milliards de personnes, ce qui en fait l’un des plus grands marchés au monde.

«L’île Maurice a le potentiel de devenir une destination de premier plan pour les investissements transfrontaliers en Afrique, et elle a déjà fait des progrès significatifs dans cette direction. Sa situation géographique stratégique, son cadre juridique et réglementaire solide, sa stabilité politique et son environnement commercial sain continuent de susciter la confiance des investisseurs locaux et étrangers, tout en créant des opportunités de croissance et de développement. Le gouvernement n’a cessé de mettre en œuvre des réformes pour maintenir notre réputation de centre financier international de premier plan», fait ressortir Nadeem Carrim.

Il ajoute que nous sommes aujourd’hui la seule nation africaine à être largement ou totalement en conformité avec l’ensemble des 40 recommandations du Groupe d’action financière. Nous sommes une juridiction cotée en Bourse, une plateforme d’investissement transfrontalière compétitive et attrayante et un centre financier international de renom, tant pour les entreprises que pour les clients privés. Malgré les conditions difficiles du marché mondial, Nadeem Carrim dit que devons reconnaître la résilience de Maurice et sa capacité à faire face aux chocs économiques, ce qui rassure davantage les investisseurs.

«Bien que l’île Maurice présente plusieurs avantages, il est important de noter que la concurrence entre les pays africains pour les investissements transfrontaliers s’intensifie. D’autres pays comme le Kenya et le Rwanda s’efforcent également de se positionner en tant que centres d’investissement et mettent en œuvre leurs propres réformes et incitations. Maurice devra donc s’adapter et innover en permanence pour conserver son avantage concurrentiel et attirer une part importante des investissements transfrontaliers en Afrique», indique Nadeem Carrim.

Atouts majeurs

De son côté, Kevin Bessoondyal, Chief Development and Commercial Officer à Rogers Capital, précise que les relations entre l’Afrique et l’île Maurice sont très anciennes et qu’il existe des liens économiques et culturels étroits entre les deux. Ces dernières années, l’île Maurice s’est imposée comme une porte d’entrée pour les transactions transfrontalières avec l’Afrique, avec un grand nombre d’investisseurs institutionnels, de fonds souverains, de fonds de développement et de professionnels expérimentés. Le pays se targue d’une stabilité économique et de l’absence de contrôle des changes. Notre vaste réseau d’accords de non-double imposition et d’accords de promotion et de protection des investissements avec des pays du monde entier, y compris l’Afrique, confère à l’île Maurice des atouts uniques.

«Malgré la concurrence émanant d’autres juridictions, nos secteurs public et privé s’efforcent en permanence de rester à la pointe du progrès. Selon l’Economic Development Board, plus de 80 milliards de dollars d’investissements directs étrangers, représentant environ 10 % du total des investissements directs étrangers sur le continent africain, ont été acheminés vers l’Afrique via l’île Maurice et plus de 25 % des fonds d’investissement privés investissant en Afrique sont domiciliés à l’île Maurice. Les sociétés de portefeuille mauriciennes sont donc déjà des investisseurs importants sur le Continent. Je suis convaincu que nous pouvons accroître cette part et continuer à servir de tremplin pour les investissements sur le continent», fait ressortir Kevin Bessoondyal.

En outre, grâce aux récentes ratifications d’accords de libre-échange et d’accords commerciaux préférentiels avec les principaux partenaires de Maurice, à savoir, la Chine, l’Afrique et l’Inde, le gouvernement élargit d’une part l’espace économique du pays et renforce son attractivité en mettant l’accent sur la protection des investisseurs afin de structurer l’investissement et d’obtenir des financements.

Shameel Rumjaun, Director – Business Development à IQ-EQ, abonde dans le même sens que Nadeem Carrim et Kevin Bessoondyal. Il est catégorique sur le fait que Maurice doit se positionner comme le centre financier pour les investissements transfrontaliers en Afrique, et ce parce qu’elle détient plusieurs atouts, notamment, un centre financier de renom, réputé et fiable, comme en témoignent les accolades internationales reçues par le pays depuis plusieurs années (Facilité à faire des affaires – Banque Mondiale, Étude Forbes sur les meilleurs pays pour faire des affaires, Liberté économique dans le monde – Fraser Institute, Indice Mo Ibrahim de la Gouvernance en Afrique) ; un accès à un personnel professionnel hautement qualifié et bilingue à un coût compétitif ; l’absence de contrôle des changes et libre flux de capitaux ; un environnement bancaire fiable, sûr et sophistiqué ; des prestataires de services de renom internationaux (cabinets d’audit et de conseil, cabinets juridiques, administrateurs de fonds) et sa stabilité sociale, politique et économique.

Ils sont rejoints par Shakil Daby, Director-Corporate & Institutional Banking à BCP Bank (Mauritius), qui indique qu’en tant que centre financier international, Maurice jouit d’une bonne réputation auprès des investisseurs ciblant l’Inde et l’Afrique. Shakil Daby précise que plusieurs facteurs ont été des ingrédients clés pour établir une juridiction propice aux investissements transfrontaliers. Cela étant dit, il est d’avis que Maurice doit continuer à s’améliorer car d’autres pays comme le Rwanda, le Kenya ou encore le Maroc essaient maintenant de se positionner en tant que centres financiers de choix pour l’Afrique. En termes de flux de l’activité trade en provenance et à destination de l’Afrique, il existe encore des opportunités pour Maurice de jouer un rôle plus actif dans ce segment, Dubaï et Singapour demeurant les principaux moteurs du commerce pour l’Afrique.

ZLECAf

Mais avec le lancement de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), quelles seront les opportunités pour le secteur financier mauricien ? Comme le rappelle Shakil Daby, l’objectif de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) est de créer un continent sans droits de douane qui puisse stimuler le commerce et les investissements intra-africains, développer les entreprises locales, accélérer l’industrialisation et créer des emplois. À l’heure actuelle, le commerce intra-africain ne représente que 14,4 % du total des exportations africaines.

«Aujourd’hui, la noix de cajou et le cacao africains sont exportés de l’Afrique de l’Ouest vers l’Asie, puis réexportés soit sous leur forme originale soit transformés vers l’Afrique de l’Est. C’est là que résident des opportunités d’intégration régionale. Pour ce qui est des centres financiers internationaux émergents (Casablanca Finance City, Kigali, etc.) sur le continent africain, chacun a ses propres caractéristiques et, avec la ZLECAf, nous pourrions essayer d’explorer des voies de collaboration en nous complétant mutuellement», laisse entendre Shakil Daby.

Kevin Bessoondyal ajoute que l’accord de libre-échange continental progresse lentement mais sûrement. Un jour, il transformera le Continent en permettant aux biens et aux services de circuler rapidement, sans heurts et à un coût relativement faible, libérant ainsi des capitaux et d’autres ressources pour des utilisations alternatives plus productives. Pour l’instant, le monde a les yeux rivés sur l’Inde. Son économie s’est accélérée pour atteindre 6,1 % au premier trimestre 2023. Les analystes prévoient que l’Inde et l’Afrique produiront ensemble un rendement économique de l’ordre de 50 milliards d’USD au cours des 30 prochaines années. Ce chiffre est indépendant de la performance des gouvernements et tient simplement compte de la demande latente et de l’exceptionnel esprit d’entreprise, de la créativité et de l’innovation de la jeunesse.

«L’île Maurice peut et doit tirer parti de cette énorme opportunité. Maurice jouit d’une relation privilégiée avec l’Inde et est considérée comme un important catalyseur des investissements indiens en Afrique, grâce à son appartenance à divers blocs économiques tels que la Southern African Development Community (SADC) et le Common Market for Eastern and Southern Africa (COMESA) et à sa réputation de centre de services financiers bien réglementé. Ce rêve n’a été que partiellement réalisé. Pourtant, il y a beaucoup à gagner à développer ce créneau. Le corridor Inde-Afrique est une rivière de 50 milliards de dollars qui coule le long de la côte mauricienne. L’exploitation de ce potentiel pourrait transformer radicalement notre économie de 11 milliards de dollars», précise Kevin Bessoondyal.

Il fait remarquer que beaucoup a déjà été fait pour renforcer la position de l’île Maurice en tant que plaque tournante privilégiée pour conduire les affaires de l’Inde et d’autres juridictions vers l’Afrique. Cependant, pour consolider cette position, Maurice doit développer une communauté d’experts et de conseillers en entrepreneuriat qui connaissent parfaitement l’Afrique et qui sont dignes de confiance. Il faut aussi encourager l’expérimentation, l’innovation et la créativité par une réglementation souple et un soutien institutionnel à ses propres entrepreneurs.

«Je suis d’avis que Maurice doit également ancrer les investisseurs transfrontaliers avec des fonds d’amorçage et un soutien au développement de projets. Le pays doit aussi accroître sa visibilité au niveau mondial grâce à des campagnes de promotion spécifiques. D’un autre côté, il faut rassurer les investisseurs institutionnels, les Development Finance Institutions (DFI) et les fonds souverains, entre autres, par des interactions régulières à haut niveau avec le gouvernement. Finalement, nous devons accroître les échanges avec le continent africain, tant au niveau du secteur privé que du secteur public à Maurice», observe Kevin Bessoondyal.

Shameel Rumjaun rappelle que Maurice devient de plus en plus une destination de choix pour les entreprises qui veulent mettre en place une plateforme de négoce ou de centrale d’achats pour desservir le continent africain, notamment en raison de l’absence de contrôle des changes et le libre flux de capitaux, l’accès facile aux devises étrangères fortes (USD, EURO, Yuan, etc.) et un écosystème bancaire fiable et sécurisé. La zone de libre-échange continentale africaine présente ainsi une opportunité extraordinaire pour le secteur financier mauricien afin d’attirer la mise en place de centrale d’achats ou de plateformes de négoce pour les entreprises internationales qui voudront bénéficier des avantages de cette nouvelle opportunité.

Capital-investissement

Malgré des levées de fonds erratiques et des conditions de risque et de croissance volatiles, illustrées par les événements géopolitiques mondiaux actuels, les tendances à long terme du marché du private equity en Afrique sont restées constantes. Cette augmentation constante de l’activité des transactions de private equity en Afrique a-t-elle des implications particulièrement positives pour notre juridiction ? Peut-on s’attendre à une augmentation du nombre de nouvelles transactions africaines à mettre en place et à être structurées à Maurice ?

«Le capital-investissement restera la principale forme d’investissement en Afrique dans un avenir prévisible compte tenu des besoins d’investissement en Afrique. Ces dernières années, nous avons observé une forte croissance dans les secteurs des biens de consommation et des services financiers, soutenue par la croissance d’une classe moyenne émergente. Les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’agriculture restent également des secteurs d’investissement solides et de bonnes cibles pour les investisseurs privés. En outre, le déficit d’infrastructures de l’Afrique – estimé entre 130 et 170 milliards de dollars par la Banque africaine de développement – représente une opportunité significative pour les investisseurs directs. Enfin, la technologie suscite un grand intérêt, le financement des start-up technologiques ayant récemment augmenté de plus de 51 %», explique Kevin Bessoondyal.

Kevin Bessoondyal ajoute qu’il est important de rappeler que l’investissement en Afrique requiert une approche différente de celle des marchés plus développés. Les défis auxquels sont confrontés les acteurs du Continent sont bien connus : risques politiques et monétaires, volatilité des prix, préoccupations liées à la gouvernance d’entreprise et possibilités de sortie limitées, autant d’éléments qui influent sur l’appétit des investisseurs. En outre, la fragmentation du marché et la multiplicité de cadres réglementaires, le contrôle des changes, les exigences en matière de propriété locale et le manque de données fiables sur les entreprises privées sont autant d’obstacles à l’investissement. L’Afrique connaît actuellement un ralentissement des investissements en raison des taux d’intérêt élevés, mais ce phénomène est temporaire et la situation s’inversera dès que les taux d’intérêt baisseront. Toutefois, en structurant ces investissements, l’île Maurice peut contribuer à atténuer certaines des contraintes auxquelles les investisseurs sont confrontés.

Nadeem Carrim fait, lui, ressortir que Maurice facilite les investissements en Afrique en capitalisant sur son expertise et ses avantages stratégiques afin d’offrir une plateforme idéale pour la structuration des fonds d’investissement, des gestionnaires de fonds et des conseillers, générant ainsi une plus grande valeur ajoutée pour les entreprises africaines. Aujourd’hui, plus de 450 fonds d’investissement privés sont domiciliés dans le centre financier international de Maurice et investissent sur le continent africain. En juin 2021, près de 40 milliards d’USD d’investissements (chiffres de l’EDB) destinés à l’Afrique ont été structurés par l’intermédiaire de Maurice.

«Notre système bancaire robuste, associé à un cadre réglementaire rigoureux dûment conforme aux réglementations internationales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, offre aux fonds d’investissement privés le confort nécessaire pour acheminer tous leurs investissements. Le gouvernement s’efforce également d’attirer des techniciens étrangers et des personnes expérimentées pour qu’ils rejoignent l’industrie locale. Lors du dernier discours du Budget, certaines mesures intéressantes ont été proposées, notamment l’augmentation de l’exonération partielle sur les intérêts perçus par un fonds, ce qui réduira effectivement le taux d’imposition de 3 % à 0,75 %», fait ressortir Nadeem Carrim.

Il ajoute que l’île Maurice participe également à différents forums rassemblant des acteurs du secteur du capital-investissement et du capital-risque, tels que l’African Private Equity and Venture Capital Association (AVCA) et l’AFSIC, ce qui nous permet de présenter la juridiction comme un guichet unique offrant tous les services relatifs aux investissements transfrontaliers sur le continent africain. Il est donc clair qu’il y a plusieurs raisons solides pour lesquelles l’île Maurice reste une voie éprouvée et fiable pour réaliser des investissements en Afrique.

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