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Adiel Akplogan: « Le taux de visibilité de l’IPv6 à Maurice est de 10 à 15 % »

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Adiel Akplogan: « Le taux de visibilité de l’IPv6 à Maurice est de 10 à 15 % » | business-magazine.mu

Afrinic est le registre régional des adresses IP qui sont à la base des communications sur Internet. La société opère à partir de Maurice. Son CEO fait un constat sans concession du développement du secteur des Tic à Maurice.

BUSINESSMAG. Opérant à partir de Maurice, Afrinic vient de fêter ses dix ans. Comment s’est développée votre société ?

Afrinic, qui est le registre régional d’adresses IP (Internet Protocole) desservant l’Afrique, a été enregistrée à Maurice en 2004. Nous étions au début une équipe composée uniquement de deux personnes avec un budget de USD 100 000. Et dix ans après, nous sommes à 40 personnes avec un budget d’environ USD 4 millions. Ce qui signifie que globalement Afrinic a été un succès dans sa mission, mais aussi dans son développement en tant qu’institution panafricaine.

BUSINESSMAG. Votre décision de vous implanter à Maurice constitue-t-elle un choix stratégique ?

Le choix d’Afrinic de s’installer à Maurice estc ollectif. Au début, il y a eu un appel à candidature pour le pays qui voulait héberger cette organisation non gouvernementale. Il y a eu une dizaine de candidatures. Entre ces dix candidats, il y a eu consensus que Maurice devrait abriter le siège d’Afrinic.

Nos opérations devaient se faire dans trois autres pays de la région, à savoir l’Afrique du Sud, l’Égypte et le Ghana. En 2005, la décision a été prise de consolider les activités à Maurice, c’est-à-dire d’en faire vraiment un bureau opérationnel et ce que nous sommes aujourd’hui.

Maurice a un grand nombre d’atouts, mais, géographiquement, elle reste loin des autres pays du continent africain. Au niveau d’Afrinic, nous voulons rester proches de l’Afrique car nous voulons enraciner ce que nous faisons dans toutes les régions de ce continent. Dans cette optique, nous allons essayer de développer certains bureaux régionaux essentiellement en Afrique du Nord et en Afrique de l’Ouest, de sorte à ce que nous ayons une présence formelle dans ces régions quitte à ce que ces bureaux régionaux se penchent sur des aspects très spécifiques des opérations d’Afrinic. À terme, le bureau de Maurice sera le siège qui s’occupera aussi de l’Afrique australe et de l’Afrique de l’Est. Les bureaux de l’Ouest s’occuperont de cette région.Ce sera plus une décentralisation de nos activités.

BUSINESSMAG. Votre principale mission est le déploiement de l’IPv6 en Afrique. Où en sont les choses ?

Quand nous avions commencé Afrinic, le taux de pénétration de l’IPv6 était moins de 1 %. Par taux de pénétration, nous faisons référence au nombre d’opérateurs en Afrique ayant des adresses IPv6. Aujourd’hui, nous avons un taux de pénétration de plus de 40 % d’allocation ou d’utilisation d’adresses IPv6 par les opérateurs. De ces 40 %, nous avons un taux de visibilité qui tourne autour de 12 - 14 % dans la région. Il faut savoir que quand nous avions démarré nos activités, nous étions à 0 % de taux de visibilité.Ces 12 - 14 % démontrent qu’il y a encore du travail à faire, pour que le taux de visibilité soit au moins équivalent au taux d’adoption et qu’à terme, qu’onest à 100 % de taux de pénétration et quetous les opérateurs en Afrique aient l’IPv6 et travaillent à son déploiement.

Cela dit, nous pensons que tous les efforts que nous avons fournis ces dix dernières années ont été payants. Nous avons développé des curriculums et des formations sur l’IPv6 qui sont désormais cités comme la référence globalement. Nous avons pu augmenter la compétence et la connaissance autour de l’IPv6, de sa transition, des enjeux tant techniques quel égaux dans la région.

L’enjeu pour le déploiement de l’IPv6 est beaucoup plus économique que technique. La plupart des opérateurs ont encore du mal à bien traduire l’adoption de l’IPv6 dans leur stratégie de développement. Notre orientation en termes de formation va plutôt vers celles au niveau des décideur sdans les entreprises afin qu’ils puissent comprendre l’aspect critique de l’IPv6 dans le développement de leurs affaires en tant que fournisseur de services de télécom ou d’accès télécom. Car il est impensable de penser à l’avenir de n’importe quel business qui est basé sur le protocole internet sans passer par l’IPv6.

On ne peut pas construire une stratégie de développement de son plan d’affaire sans impliquer l’IPv6 car nous ne sommes qu’au stade embryonnaire du développement d’internet dans notre région. Nous avons pris un chemin qui va nous permettre de croître rapidement à cause du mobile et donc, plus que toutes les autres régions, nous allons être exposés à un besoin très grand d’adresses IP. Notre stratégie dans les cinq prochaines années s’articulera autour de cet axe. L’Afrique n’est pas la région la moins engagée en termes de déploiement de l’IPv6.

BUSINESSMAG. Quel est l’investissement consacré par Afrinic au déploiement de l’IPv6 en comprenant les formations ?

Globalement, chaque année, nous essayons d’allouer entre 15 et 20 % de notre budget exclusivement à la formation. Au-delà de la formation, nous organisons des réunions annuelles où des sessions entières sont dédiées à l’IPv6. Ce sont des sessions d’informations. Nous participons également à des ateliers.

BUSINESSMAG. Comment mesurez-vous le déploiement de l’IPv6 à Maurice ?

La situation à Maurice n’est ni catastrophique, ni rose. La plupart des opérateurs à Maurice ont des adresses IPv6, ce qui est une bonne chose. À Maurice, nous servons huit opérateurs qui ont tous des allocations IPv6. En termes de taux de pénétration, nous sommes autour de 80 %.Toutefois, en termes d’implémentation et d’utilisation, l’île est très en retard. Sur huit opérateurs, il y a peut-être deux qui déploient IPv6 et peuvent offrir des services IPv6 à leurs clients. À Maurice, nous sommes à un taux de visibilité de 10 à 15 %.

BUSINESSMAG. Dans quelle mesure le déploiement de l’IPv6 peut-il aider Maurice à concrétiser sa vision de s’élever au statut de pays à revenu élevé ?

Quand vous voulez devenir une destination de ce genre, il faut que derrière, les services et avancées technologiques suivent. Il faut pouvoir être en phase avec le modernisme. Cela implique de pouvoir offrir des services qui vont émerger dans les années à venir autour de l’IPv6. L’IPv6 readiness est un élément de ce type de modernisme.

Tout gouvernement ou pays réfléchissant profondément à sa stratégie Tic à long terme – celle-ci doit faire partie intégrante du développement économique et social – ne peut se passer de l’IPv6. Demain, nous parlerons de l’Internet of things qui est la connexion de tout ceque nous avons autour de nous à l’Internet. Le nombre d’équipements connectés va grandir. Pour pouvoir déployer ces nouvelles technologies, nous avons besoin d’adresses IP.

BUSINESSMAG. En tant qu’opérateur dans le domaine des Tic, qu’attendez-vous du gouvernement qui sera élu des urnes ?

Ce n’est pas une question de  changement de gouvernement, mais de vision, de stratégie. La vision et la stratégie d’un pays ne sont pas forcément tributaires du changement de gouvernement au pouvoir. Il faut garder le cap car les acteurs évoluant dans ce domaine ne changent pas.