Type to search

Interview Rencontre

Ahmed Parkar et Vincent d’Arifat: «La fusion JEC-MEF s’inscrit dans l’avenir de ces deux organisations»

Share
Ahmed Parkar et Vincent d’Arifat: «La fusion JEC-MEF s’inscrit dans l’avenir de ces deux organisations» | business-magazine.mu

Un organisme-cadre sera créé pour représenter les intérêts du secteur privé. Vincent d’Arifat et Ahmed Parkar, respectivement présidents de la Mauritius Employers Federation et du Joint Economic Council, expliquent le fonctionnement de la nouvelle institution.

BUSINESSMAG. La fusion entre la Mauritius Employers Federation et le Joint Economic Council est en bonne voie. Comment l’idée de fusionner ces deux organisations du secteur privé a-t-elle germé ?

Vincent d’Arifat : Tout d’abord, l’idée de fusionner la Mauritius Employers’ Federation (MEF) et le Joint Economic Council (JEC) remonte à une dizaine d’années. Mais les discussions autour de cette fusion ont démarré il y a quatre ans.

Ahmed Parkar : Plusieurs points font que cette fusion est aujourd’hui imminente. Le secteur privé nous a fait une demande, celle de revoir les opérations des organisations qui les représentent. Il est impératif de souligner que même pour des organisations comme le JEC et la MEF, les opérations réclament beaucoup de financements. De plus, nous nous sommes aperçus que la MEF et le JEC ont un profil similaire : elles sont toutes deux des organismes-cadres pour le secteur privé. Il existe beaucoup de similitudes en termes de représentations sur le Board du JEC et de la MEF

Je voudrais faire ressortir que ces dix dernières années, le JEC a été appelé à participer à des instances mixtes public-privé pour la mise en œuvre de différents programmes. Cette approche interactive requiert une administration plus structurée. Cependant, le JEC ne possède pas une structure administrative adaptée à ces nouvelles fonctions. Avec cette fusion, il y aura une structure plus efficace et adaptée, réduisant ainsi les coûts. C’est la raison pour laquelle cette fusion entre la MEF et le JEC est aujourd’hui nécessaire.

Vincent d’Arifat : Aujourd’hui, nous réalisons qu’avec cette collaboration entre le secteur privé et le gouvernement, un seul intervenant n’est plus suffisant. La structure du JEC ne peut pas demeurer telle quelle et telle qu’elle opère actuellement. Il fallait la rehausser et venir la
dynamiser avec d’autres éléments. Nous ne pouvons pas faire de la duplication de nos services. Et cette fusion renforcera la voix du secteur privé.

BUSINESSMAG. Comment se sont déroulées les discussions entre les représentants des deux organisations ?

Ahmed Parkar : Il y a eu des discussions pour établir une feuille de route. Pour réaliser cette feuille de route, le conseil du JEC a
suggéré d’embaucher un consultant qui se penchera sur la façon dont se fera la fusion. Il s’agira aussi de relever les aspects positifs et négatifs de cette fusion pour le secteur privé et les deux associations. L’économiste Pierre Dinan a été embauché à cet égard par les conseils du JEC et de la MEF. Il a rencontré les stakeholders, les anciens présidents des associations et les associations faisant partie du JEC et de la MEF. Le but étant de voir comment rendre cette fusion intéressante pour le secteur privé, le JEC et la MEF. À la suite de cet exercice, Pierre Dinan a pu définir la nouvelle structure de cette fusion.

BUSINESSMAG. Comment fonctionnera la nouvelle structure ?

Vincent d’Arifat : Cette nouvelle structure aura une nouvelle identité. Nous travaillons actuellement sur les autorisations pour le nouveau nom.

La nouvelle entité sera gérée par un National Council. Il faut savoir que la MEF est gérée par un conseil. Mais avec cette nouvelle structure, nous comptons apporter de la différence. En effet, valeur du jour, les membres de la MEF sont nominés par le Conseil. Alors qu’avec la fusion, nous allons amener de la démocratie, la perception de bonne gouvernance. Une partie des membres seront élus et choisis par les membres existants. Au sein de la nouvelle structure, il y aura un panel représentatif de différents secteurs de l’économie. Un CEO va chapeauter la partie macro-économique – c’est la partie que le JEC s’occupe aujourd’hui – et un COO qui s’occupera du fonctionnement de l’organisation, mais aussi de toute la partie de services directs offerts aux entreprises. Car nous aurons des membres qui sont des associations, de grandes entreprises et des PME. Bien que les besoins ne soient pas toujours les mêmes, les priorités de la nouvelle structure ne changeront pas. Notre objectif restera le même : promouvoir un environnement économique favorable au développement et à la création de la valeur ajoutée.

Ahmed Parkar : Comme je l’ai dit plus tôt, la structure du JEC ne peut demeurer telle qu’elle est aujourd’hui. Un CEO et un COO seront nommés pour représenter la nouvelle entité avec des responsabilités mieux réparties entre les deux.

Vincent d’Arifat : Il ne faut pas oublier qu’Ahmed Parkar avait abattu un très gros travail à la Chambre de Commerce et d’Industrie où il avait revu toute la constitution pour plus de bonne gouvernance et de démocratie, entre autres. Et c’est ce que nous sommes en train de faire avec la MEF et le JEC.

BUSINESSMAG. Quand la fusion sera-t-elle effective ?

Vincent d’Arifat : La MEF est actuellement dans une phase où elle doit communiquer plus sur cette nouvelle structure. Nous devons expliquer à nos membres les changements mais aussi les bénéfices que cette nouvelle constitution entraînera. À souligner que cette nouvelle structure est aussi importante pour la MEF car nous avons également besoin de rehausser nos services. La MEF date de 50 ans. Aujourd’hui, nous devons nous adapter aux réalités économiques de Maurice. Pour que la MEF et le JEC franchissent cette étape, la MEF orga-nisera en mai, une Special Gene-ral Meeting au cours de laquelle les membres nous donneront leur approbation.

Ahmed Parkar : La fusion est en bonne voie et s’apprête à être finalisée. Elle s’inscrit dans l’avenir de ces deux associations. Il s’agit essentiellement d’un transfert des membres du JEC et de la MEF sous une nouvelle entité. Une fois votée, cette fusion laissera un bel héritage au secteur privé.

Vincent d’Arifat : Avec cette nouvelle structure, nous serons à 1 100 membres. Mais l’objectif est de recruter de nouveaux membres afin d’être concrètement le représentant de tous les secteurs de l’économie mauricienne.

BUSINESSMAG. La nouvelle structure devrait accorder une plus grande importance aux PME. Concrètement quels sont les services qui seront offerts aux entrepreneurs ?

Vincent d’Arifat : Il faut savoir que 60 % des membres de la MEF sont des PME. Il y a déjà une assistance offerte aux PME. Il y a également des associations de PME qui sont membres de la MEF. Il y a deux niveaux de services : un premier à travers les associations et un second directement aux les membres. Les services visent surtout à l’amélioration des conditions et des relations entre l’entrepreneur et son équipe. Nous dispensons des formations sur la motivation, et sur bien d’autres aspects. En effet, les PME ont besoin de ce support au jour le jour. Contrairement aux grosses entreprises, les PME n’ont pas de département des ressources humaines. Elles ont besoin d’un soutien à ce niveau-là.

Ahmed Parkar : Sur la question des PME, il faut rappeler que Vishnu Lutchmeenaraidoo, le ministre des Finances, a fait ressortir qu’à Maurice, même les plus grands conglomérats sont aux yeux du monde des PME. Je pense qu’il y a un grand travail à faire des deux côtés – soit du secteur privé et du gouvernement – pour que les PME deviennent l’épine dorsale de notre économie.

Il est vrai que les plus grandes économies au niveau mondial doivent leur succès aux PME. Mais, en même temps, ces pays sont bien structurés. Par exemple, la Suisse est tributaire des PME. Les entrepreneurs en Suisse sont des professionnels de haut niveau qui fabriquent des montres de qualité et autres produits à forte valeur ajoutée. À Maurice, il existe beaucoup de compagnies qui peuvent grandir davantage et progresser en termes de qualité, mais elles n’ont pas l’appui nécessaire. Il existe un manque de soutien financier et d’encadrement sur la façon de gérer un business. C’est là où le gouvernement doit apporter sa contribution. C’est bien de mettre sur pied une SME Bank, mais il faut que le gouvernement puisse offrir un encadrement à ces PME à fort potentiel. Un encadrement financier, mais aussi au niveau marketing est nécessaire. Les PME ont besoin de suivi.

Vincent d’Arifat : Il y a eu déjà des programmes de «mentoring» à la MEF. Bien sûr, ce sont des programmes qui peuvent revenir, à travers cette nouvelle structure.

BUSINESSMAG. Les autorités estiment que l’économie mauricienne a le potentiel de réaliser une croissance de 5,7 % en 2016-17. Cette performance est-elle réalisable ?

Vincent d’Arifat : Le plus important est d’y croire et de travailler dans cette direction. Ce n’est pas une question de mettre en doute la possibilité d’atteindre ces 5,7 %, mais d’unir nos forces pour y arriver.

Ahmed Parkar : Je pense qu’une croissance de 5,7 % est réalisable. Bien que nos marchés traditionnels rencontrent actuellement beaucoup de problèmes, nous constatons que certains secteurs se portent à merveille. Les derniers chiffres pour le secteur touristique sont excellents avec une croissance de 48 %pour le Royaume-Uni et de 20 %pour d’autres marchés. Le tourisme demeure un pilier important de notre économie car il est générateur d’un nombre grandissant d’emplois. Le tourisme n’est pas une industrie insulaire mais multi-facettes qui contribuera au ‘growth rate’. Les signes sont plutôt positifs pour ce secteur.

Notre industrie textile tire profit d’une roupie plus compétitive. De plus, nous constatons que beaucoup de clients reviennent vers Maurice. La dépréciation de la roupie permet à un grand nombre de sociétés de pratiquer des prix qui attirent des investisseurs à Maurice. Le BPO est aussi appelé à connaître une belle croissance cette année avec plusieurs projets à l’agenda. Il est notamment question de connecter l’île entièrement et d’augmenter la bande passante. Ces développements donneront lieu à des synergies positives pour notre économie. Pour toutes ces raisons, je pense qu’une croissance de 5,7 % est réalisable.