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Interview Rencontre

Brian Ah-Chuen: «Trouver les outils pour redynamiser notre économie»

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Brian Ah-Chuen: «Trouver les outils pour redynamiser notre économie» | business-magazine.mu

Brian Ah-Chuen, Strategic Business Executive à ABC Banking Corporation, fait le point sur la situation économique mondiale et évoque les conditions nécessaires à une redynamisation de la croissance sur le plan local.

BUSINESSMAG. Christine Lagarde estime qu’il y a des raisons d’être inquiet pour l’économie mondiale avec le relèvement des taux d’intérêt aux États-Unis, la hausse du dollar et le ralentissement de l’économie chinoise. Partagez-vous cette opinion ?

La directrice du Fonds monétaire International (FMI) doit, en effet, prévenir des conséquences possibles du relèvement des taux d’intérêt aux États-Unis, mais il y ù a beaucoup d’autres facteurs qui peuvent affecter l’économie mondiale. La croissance qui repart à la hausse aux États-Unis est tout de même un signe encourageant pour l’économie globale en règle générale. Même avec le ralentissement et la restructuration de l’économie chinoise, la croissance croît toujours à une vitesse raisonnable. La Chine a aussi signifié son intention de se concentrer sur son marché intérieur et développer les parties centrales et occidentales du pays. Le potentiel de croissance existe donc toujours.

BUSINESSMAG. La hausse des taux de la Réserve fédérale ne risque-t-elle pas de créer une plus grande volatilité des marchés ?

Si la FED souhaite augmenter ses taux d’intérêt, c’est parce qu’aujourd’hui les États-Unis montrent des signes qu’ils se remettent progressivement de la crise financière qui a été présente depuis 2008. Nous devons nous rappeler que le marché réagit de manière cyclique, il est donc tout à fait normal que les taux augmentent après avoir été aussi bas pendant si longtemps. La volatilité des marchés dépendra de la hausse réelle des taux, mais je pense qu’avec la communication en place sur cette potentielle augmentation dans les mois qui viennent, la volatilité ne se fera pas tant sentir. Dans le domaine de la finance, ce sont surtout les événements inattendus qui peuvent troubler les marchés et conduire à des crises.

BUSINESSMAG. Statistics Mauritius vient de revoir à la baisse ses prévisions de croissance à 3,6 % cette année. Est-ce que le miracle économique est encore loin ?

Nous ne devons pas oublier que Maurice est toujours un pays à revenu intermédiaire, ce qui veut dire que nous devons faire encore beaucoup d’efforts pour nous développer et atteindre le prochain palier de développement. Un miracle économique, par définition, implique une «chance exceptionnelle» ou «un fait extraordinaire et étonnant». Je ne crois pas vraiment à la chance ou aux choses qui arrivent par hasard. Il n’y a que le travail et la persévérance qui pourront nous amener vers une croissance intéressante.

Nous devons trouver les outils pour redynamiser notre économie locale, mais vu que le marché local est petit et restreint, il nous faut en même temps profiter des opportunités qui s’offrent à nous aussi bien en Asie qu’en Afrique. Les secteurs, qui ont porté notre croissance comme la construction ou le textile, sont en berne. Il faut trouver d’autres moyens pour se renouveler.

BUSINESSMAG. Les profits d’ABC Banking Corporation ont plus que triplé sur le dernier exercice financier. Quels sont les facteurs qui expliquent cela ?

Ce que je peux vous dire, c’est que ce n’est certainement pas le fruit d’un miracle ! Développer une nouvelle banque sur le marché mauricien est un challenge très intéressant et notre groupe a décidé de relever ce défi. Ce n’était pas évident car il faut le rappeler, le développement de notre banque s’est fait dans des conditions économiques très difficiles à partir de 2010. Mais le management de la banque et le dur labeur des
employés ont contribué à faire de ce projet un succès.

Le déménagement stratégique à WEAL House, qui a permis le regroupement de toutes nos activités sous un même toit, est un facteur qui a contribué à notre réussite. Nous nous sommes aussi concentrés sur le développement de nos activités sur le marché local pour les entreprises, mais aussi à l’international. Nous avons une équipe professionnelle et compétente qui a su faire la différence face à la compétition. Notre portefeuille de dépôts est passé de Rs 2,5 milliards en 2010 à Rs 11,2 milliards à juin 2015.

Dans les segments porteurs et très exigeants comme le Corporate & international banking, la banque a su se tailler une part du gâteau en proposant des services de qualité à la hauteur des attentes des clients. Après cinq ans, de plus en plus de clients, particuliers comme d’entreprises, nous font confiance et les résultats commencent à se faire sentir cette année.

BUSINESSMAG. Quelles sont vos parts de marché ?

Étant donné qu’ABC Banking Corporation est opérationnelle depuis moins de cinq ans, la part de marché de la banque ne peut pas être comparée à celle des banques qui opèrent à Maurice depuis des décennies. Notre ambition est de devenir une banque de choix, en particulier pour les entreprises et à l’international. La compétition sur le marché local est très féroce, mais nous pensons que Maurice a le potentiel de devenir un centre financier et une plateforme idéale pour le Private banking et la gestion de patrimoine. Notre système bancaire est stable et régulé, ce qui donne une confiance supplémentaire aux opérateurs internationaux. ABC Banking compte ainsi développer ces créneaux en capitalisant sur sa réputation, mais aussi sur l’efficacité et la qualité de ses opérations et de ses services.

BUSINESSMAG. Un rapport de la Banque centrale avait été très critique à l’égard des banques sur les frais bancaires et commissions. Comment avez-vous réagi face à ce rapport ?

Maurice est une économie de marché libre. Il y a plusieurs banques qui opèrent sur ce marché et les politiques de frais bancaires et commissions sont différentes en fonction des banques. Les Mauriciens ont un choix et peuvent comparer les différentes offres afin de trouver celles qui sont le plus à leur avantage. Tous les tarifs sont disponibles sur les sites Internet des différentes banques et également sur le site de la Banque de Maurice.

BUSINESSMAG. L’endettement des compagnies est en hausse de même que le niveau des créances douteuses. Qu’en est-il des prêts non productifs (non-performing loans) au sein d’ABC Banking ?

Nous sommes nouveaux sur le marché. Nous avons choisi d’être plutôt conservateurs dans notre approche et nous ne sommes donc pas vraiment affectés par les Non-performing loans. Mais comme la banque opère dans une industrie risquée, nous devons nous attendre à ce que cela peut nous arriver à tout moment. Nous devons juste faire notre travail correctement afin de nous assurer que nous réduisons ce risque.

BUSINESSMAG. En tant que banquier, quels enseignements tirez-vous de la fermeture de la banque Bramer ?

Je pense que c’est une situation difficile pour l’entreprise, les employés et les clients de cette banque. Donc, je préférerais ne pas commenter là-dessus. De plus, nous ne sommes pas en présence de tous les faits

BUSINESSMAG. Un nouveau Gouverneur à la Banque de Maurice suivant les dernières législatives. Comment jugez-vous la politique monétaire de la Banque centrale, ces derniers mois ?

La Banque de Maurice a toujours agi dans le meilleur intérêt de l’industrie et du pays. Toute notre économie dépend d’un secteur financier très stable et nous avons eu de la chance que la politique monétaire soit dans la continuité avec la succession de Gouverneurs.

BUSINESSMAG. Une des solutions pour contrer l’excédent de liquidités a été la hausse du Cash Reserve Ratio? Cette solution a-t-elle été efficace, selon vous ?

Les grandes banques n’ont pas eu de soucis avec le Cash Reserve Ratio étant donné que la plupart d’entre elles sont bien au-dessus de la limite requise. Toutefois, les petites banques telles que la nôtre, ont ressenti cette hausse car elle a limité notre capacité d’octroyer plus de prêts.

BUSINESSMAG. Concernant la réglementation des banques et les obligations de bonne gouvernance, diriez-vous que le système bancaire mauricien est suffisamment réglementé ou surréglementé ?

Le système bancaire mauricien est bien réglementé. Un élément essentiel qu’il ne faut pas négliger est l’importance de toujours garder la ligne de communication ouverte entre le régulateur et les opérateurs pour que l’industrie soit solide, mais ait toujours une marge de manœuvre pour croître de manière durable.

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