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Interview Rencontre

René Leclézio (Managing Director, Promotion and Development) – «TRIPLER LE CHIFFRE D’AFFAIRES DE LINDUSTRIE DE L’ART À RS 1 MD»

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René Leclézio (Managing Director

La nécessaire régénération de Port-Louis ira de pair avec l’essor d’une activité culturelle et artistique riche et variée, souligne René Leclézio, Managing Director de Promotion and Development.


BUSINESS MAGAZINE. La fondation ArtIs a été lancée à la mi-juin par Promotion and Development en vue d’encadrer les jeunes dans leur formation à l’univers artistique. Quelle est la genèse de cette initiative de mécénat culturel ?

René Leclézio : Promotion and Development (P&D) était régulièrement sollicitée pour parrainer des concerts, des publications de livres, et on voulait aider de façon plus structurée. Le conseil d’administration a voté un budget annuel pour aller dans ce sens et nous avons recruté Géraldine Hennequin-Joulia comme consultante pour mener à bien ce projet avec un comité composé principalement d’artistes qui sont sur le terrain et connaissent la réalité. Le projet a évolué ces trois dernières années dans sa forme actuelle. On souhaite à présent ouvrir le projet à d’autres entreprises.

Géraldine Hennequin-Joulia: Dès le projet initial, on est parti avec l’idée de rechercher l’excellence pour les jeunes. Le projet a évolué pour aider les jeunes aussi à concrétiser leur projet d’être des artistes et, au-delà de cela, de se professionnaliser dans les métiers de l’art. Du coup, ce qui nous permet de leur proposer, au-delà des cours, une vraie orientation pour pouvoir faire carrière dans l’art. À Maurice, on se gargarise souvent de la création d’une industrie de l’art en obliquant la notion que cette aspiration ne pourra se matérialiser s’il n’y a pas les métiers de l’art. Il ne suffi t pas d’avoir des artistes, il est primordial d’avoir ce tissu qui favorise l’émergence de cette industrie. L’idée avec l’accompagnement artistique qu’offre P&D aux jeunes est justement de leur donner ce premier éclairage.


BUSINESS MAGAZINE. Pendant trois ans, quelles actions ont été prises, combien de jeunes sont entrés dans la démarche et comment s’est fait le ciblage ?

Géraldine Hennequin-Joulia: On ne cible pas au départ une région, un quartier. Il est vrai que le projet a commencé sur une base pilote, et s’est étendu pendant deux ans sur la côte ouest. Depuis l’année dernière, cela a pris un ancrage plus port-louisien. C’est aussi parce que Promotion & Development est en train de travailler à l’émergence d’un centre d’arts à Port-Louis. L’idée est d’intégrer la communauté avoisinante dans cette initiative et de la laisser s’approprier la culture au travers du centre d’arts. Mais au-delà de cela, elle vise à assurer le frottement des plus jeunes à divers univers et possibilités artistiques. Aujourd’hui, grâce au suivi d’artistes-pédagogues et aux échanges culturels, on met à la disposition des jeunes qu’on accompagne une formation complémentaire et de qualité à celle qu’offre l’éducation nationale. Plus de 300 jeunes se sont inscrits depuis trois ans et on soutient presque une trentaine de jeunes pour une formation aux arts plastiques, arts du spectacle (la danse et le théâtre) et la musique.

René Leclézio : Nous estimons qu’il y a 500 artistes à Maurice, dont 60 % sont des musiciens, et évaluons le chiffre d’affaires de l’industrie entre Rs 300 millions et 350 millions par an, soit en moyenne une rémunération de Rs 80 000 par artiste chaque année, sans oublier les intermédiaires comme les fournisseurs de salles, etc. En somme, 80 % des artistes ne peuvent pas gagner leur vie convenablement. Une représentante de l’Unesco était venue à notre rencontre, et elle a suggéré un salaire minimal pour les artistes enregistrés. Si on estime, par exemple, le salaire minimal d’un artiste à Rs 12 000 mensuellement, il faut que ce dernier vende au moins pour Rs 3 000 de produits et services autour de concerts, et en termes de CD dans le mois. Et là, sachant qu’il peut soutenir à la limite une famille, en vivant de son art, il peut aspirer à évoluer dans cette voie. Comment pourrait-il progresser, voire poursuivre dans la voie artistique, quand il a à tirer le diable par la queue ?

C’est diffi cile pour l’art d’évoluer quand les artistes sont à essayer de survivre. En Angleterre et en France, ils ont compris cela il y a longtemps et ils encouragent les artistes en prélevant le soutien qui leur est accordé dans les fonds de la Sécurité sociale. 


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BUSINESS MAGAZINE.Quelles sont les ambitions de Promotion & Development à long terme avec ce projet d’encadrement artistique d’un pool de jeunes ?

René Leclézio : Mon ambition est de faire ce chiffre d’affaires de Rs 350 millions devenir un milliard à moyen terme, de tripler ce chiffre d’affaires. Pour cela, il faut avoir une qualité de service qui n’existe pas sur le marché. C’est important que de l’argent entre dans le circuit quelque part. À un certain moment, à Maurice, on avait dédié un pourcentage des gains de la loterie au développement des arts à Maurice ; on ne sait pas ce qu’il en est advenu.


BUSINESS MAGAZINE. Est-ce la raison pour laquelle P&D investit dans la promotion de l’industrie créative à Maurice, comme d’autres entreprises du pays allouent des moyens fi nanciers aux projets ayant trait à l’éducation, à l’environnement, à la pauvreté ?

René Leclézio : Pas mal d’artistes sont issus de milieux pauvres ou à faibles revenus, et donc c’est quelque part un combat contre la pauvreté. José Thérèse a fait un formidable travail auprès d’au moins 200 jeunes de Roche Bois, recalés par le système du CPE, et qui auraient peut-être fi ni par se retrouver dans la rue.

Géraldine Hennequin-Joulia : Être artiste est un métier noble. Soutenir l’art, c’est aussi revaloriser ce que Maurice a de son âme; c’est extrêmement important. Ce n’est pas un métier comme un autre ; on le fait parce qu’on a du talent. On le fait aussi parce qu’il y a beaucoup d’apprentissage derrière.


BUSINESS MAGAZINE. Bien que l’engagement ne se mesure pas à la valeur des moyens fi nanciers investis, pouvez-vous nous dire cependant combien P&D a contribué ces trois dernières années pour contribuer à l’émergence d’une industrie créative ?

René Leclézio : Notre budget annuel est d’un peu plus de trois millions de roupies. Je pense que c’est au-delà de Rs 10 millions pour les trois dernières années.


BUSINESS MAGAZINE. La Fondation ArtIs a été lancée à la mi-juin pour rechercher le partenariat d’autres entreprises mauriciennes dans ce projet pérenne… 

Géraldine Hennequin-Joulia : En effet, on n’avait pas de fondation avec pour vocation d’investir dans la jeunesse du pays. C’est vraiment miser sur la création qui émergera demain. C’est pertinent pour les entreprises de venir donner collectivement un coup de pouce à cette initiative. Quand on vise l’excellence, on n’a pas forcément tous les moyens ici pour y parvenir, avant tout parce que ce n’est pas notre métier premier.

Dans le sillage du lancement de la fondation, des conventions de partenariat sont établies. Le premier pas, c’est d’aller du côté de La Réunion parce qu’il y a des convergences possibles. On a un échange avec Le Lycée Ambroise Vollard, qui offre des formations post-bac.  

On a une première approche avec l’École des Beaux-Arts de l’île de la Réunion. L’idée est d’essayer de formaliser tout cela et de favoriser de vraies avenues de coopération parce qu’il n’y a pas de formation aux arts à Maurice. Ce n’est pas qu’une affaire de diplômes, car un artiste ne se mesure pas aux diplômes qu’il détient. Ce qui est important, c’est ce frottement avec d’autres jeunes qui sont aussi des créatif ; faire l’expérience de l’ailleurs est vraiment important et partager surtout des projets communs avec des personnes d’horizons et de cultures différents.


BUSINESS MAGAZINE. L’encadrement artistique des jeunes et le Caudan Arts Centre s’insèrent-ils dans la même dynamique, c’est-à-dire redonner à Port-Louis son statut de cité culturelle ?

René Leclézio : : Le théâtre sera un outil qui nous permettra d’expérimenter de nouvelles choses et de les faire découvrir aux jeunes. Au sujet du théâtre, par exemple, on a eu fréquemment accès au théâtre européen et pas assez au théâtre asiatique et celui issu de la culture africaine. Nous comptons développer l’axe africain et asiatique, et certainement il y a un marché pour cela à Maurice. Quand je vois le succès des fi lms de Bollywood ou des acteurs de Bollywood qui viennent à Maurice, je me dis que le potentiel est là. L’Inde a une grande culture du théâtre. Le théâtre en sanskrit est un théâtre très visuel, très en mouvements, peu porté sur la parole. Pourquoi ne pas permettre au public mauricien d’aller à la rencontre de ce type de théatre ? On va essayer en tout cas dans le cadre de notre Arts Centre.


BUSINESS MAGAZINE. Ditesnous en davantage sur cet Arts Centre.

René Leclézio : Il y aura 430 places avec tout l’équipement moderne, que ce soit son ou lumière, un système de sonorisation dessiné par des ingénieurs britanniques, un mécanisme de climatisation silencieux installé sous le plancher. C’est une grande aventure pour nous. L’Arts Centre sera polyvalent. Au-delà des spectacles, des concerts, des projections de fi lms et des spectacles étrangers, des conférences qu’on pourra y tenir, on veut apporter l’offre de diffusion des spectacles locaux à la diaspora mauricienne. L’ouverture est prévue pour le 1er décembre. Il y aura toute une série d’évènements dans ce sens à partir du dimanche 2 décembre. Rs 1 milliard a été investi dans ce projet.



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