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Le bilan du CSR à Maurice en 2015

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Le bilan du CSR à Maurice en 2015 | business-magazine.mu

Le Corporate Social Responsibility ou, tel que nous le connaissons à Maurice, le CSR, a existé depuis bien plus longtemps que le terme lui-même. Les premières écoles, dispensaires, orphelinats, maisons de retraite, lieux de culte, spectacles, concerts, journées sportives, fancy-fairs, et d’autres œuvres dites sociales ont de tout tempsété sponsorisés par les firmes privées ou les compagnies sucrières. D’ailleurs, le réflexe bien ancré dans nos habitudes locales d’aller voir le «grand missié» du business du coin pour sponsoriser la fête des enfants ou l’équipement de l’équipe de foot existe encore. Ce genre d’aide financière ou de ressources diverses s’apparenterait plus à ce qui est maintenant reconnu comme du mécénat issu de valeurs philanthropiques. Rien d’anormal à ce que ceux qui ont les moyens partagent et aident ceux qui en ont besoin, faisant ainsi leur effort pour améliorer la vie communautaire.

Seulement, cette aide ponctuelle et nécessitant un accès direct au patronat ou à quelqu’un qui avait contact avec celui ou ceux qui décidaient, ne pouvait plus s’accommoder des règles de bonne gouvernance prônées dans les modèles modernes de management de compagnies. Le Code of Corporate Governancesorti en avril 2004, et suivi par nombre de grandes compagnies locales, impose un «reporting» des dons faits en cours d’année, ce qui porte les instances dirigeantes à revoir la cohérence de leur choix de bonnes œuvres à soutenir. Certains groupes décident donc de mieux cibler leurs investissements dans les projets d’aide à la communauté et s’organisent en employant ou en dédiant un employé au suivi des projets et des organisations non gouvernementales. En 2009, le ministre des Finances en poste, las de solliciter l’effort volontaire des autres compagnies privées dans le combat contre l’extrême pauvreté, décide de légiférer en imposant une dotation de 2 % des profits à être investis dans des projets et/ou ONG accréditées.

Les Guidelines du CSR qui orientent les dons dans les domaines susceptibles d’être financés sont publiés et commence alors l’établissement d’une vingtaine de Fondations du secteur privé et la prolifération de nouvelles ONG. Malgré les règles claires visant à limiter l’appât du gain dans le monde du social et celui du business, une partie de la manne CSR se trouve détournée à servir les intérêts des uns et des autres. Néanmoins, plus de 60 % du fonds CSR national trouve son chemin dans des ONG respectables et dont le travail remarquable est digne des pays les plus avancés. Les fonds CSR permettent à ces organisations d’employer des professionnels dans leurs domaines respectifs et de se structurer.

Nos jeunes, vieux et nécessiteux ont enfin une aide de cœur efficace, régulière et visant à leur autonomisation. Bien sûr, il y a encore du travail à accomplir, afin de pérenniser les services sociaux offerts par nos ONG locales, mais avec l’apport des fonds CSR depuis 2010, nombre d’entre elles sont passées du stade de survie avec volontaires à la professionnalisation de leurs services, même au point d’être reconnues comme des experts nationaux dans leurs domaines. Le pays ne peut plus se passer de ces ONG nationales militant pour la santé, l’éducation alternative, les autrement capables, les démunis sans mettre en péril son équilibre social. L’expérience acquise par ces centaines de travailleurs sociaux employés pour ratisser le terrain et soutenir les divers besoins nous fournit maintenant une vision plus claire et détaillée de nos problèmes sociaux et des solutions nécessaires.

Comme l’a si bien dit notre nouveau ministre de l’Intégration sociale dans une interview: «Le problème de l’exclusion et de la pauvreté est multidimensionnel et exigera la collaboration des ministères». Il serait important d’ajouter des ONG et des Fondations du secteur privé. Monsieur le ministre : il n’y a pas «insuffisance d’effectifs sur le terrain», mais plutôt une insuffisance de collaboration multisectorielle entre les services gouvernementaux, l’armada des ONG et les ressources additionnelles offertes par le CSR. La preuve que la coopération multisectorielle est efficace à lutter contre les fléaux nationaux se trouve dans l’exemple de la lutte nationale contre le VIH/ Sida. À travers la méthode des 3 Ones imposée par le fonds mondial, soit un plan d’action national, un budget commun et un comité national multisectoriel assurant le suivi et l’évaluation de diverses actions, l’épidémie a reculé.

Ce qui est malheureusement loin d’être le cas dans d’autres domaines de la santé ou concernant les challenges de notre société tels la pauvreté (surtout féminine), la toxicomanie, le chômage, le squattage, les enfants vulnérables, etc. Yes we candirait l’un, mais à condition que nous unissions nos forces, nos connaissances et nos volontés pour arriver à travailler côte à côte, si ce n’est ensemble. Tâche ardue pour les représentants des trois mondes : privé-social-gouvernemental, avec des philosophies et des procédés différents, mais néanmoins nécessaires si nous voulons des résultats probants et concrets, voire mesurables. Un grand travail de planification et d’organisation dans la concertation régulière attend cette nouvelle équipe gouvernementale si elle projette de faire la différence dans le domaine social. Les ONG et le secteur CSR ne demandent qu’à aider.