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Renégociation du traité fiscal : une chance pour Maurice ?

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Renégociation du traité fiscal : une chance pour Maurice ? | business-magazine.mu

La confirmation de l’aboutissement de la renégociation du traité a entraîné une grande appréhension pour nombre d’opérateurs du global business mauricien. En particulier, la révision de la clause concernant l’imposition des plus-values en cas de cession d’actions de sociétés indiennes par des sociétés mauriciennes fait craindre, à juste titre, une attractivité moindre de Maurice pour les holdings investissant en Inde. Ce cadeau fiscal – qui s’est révélé, faut-il le rappeler, autant bénéfique pour Maurice que pour l’Inde, en permettant notamment à la Grande péninsule d’attirer de nombreux investissements internationaux – arrive donc à son terme.

Cet épisode nous amène inévitablement à nous interroger sur la solidité des liens avec l’Inde au-delà des déclarations sans cesse réaffirmées. Au fil des mois de négociations qui se sont éternisés, nombre d’observateurs avaient noté que la fiancée rangeait ses valises tout en confirmant sa flamme. Cette insécurité mobilise depuis un certain moment déjà les opérateurs du secteur de global business, qui ont compris qu’il était temps de changer leur fusil d’épaule.

Management companies : bonne ou mauvaise nouvelle ?

Indéniablement, c’est une mauvaise nouvelle pour les Management companies qui se sont contentées depuis trop longtemps d’offrir à leurs clients une tenue de leur comptabilité et un secrétariat juridique à faible valeur ajoutée et qui ne disposeront pas de ressources pour se réinventer.

Par contre, cette même nouvelle sera le coup de fouet salutaire pour les autres Management companies qui ont compris, depuis quelque temps déjà, que les jours faciles étaient révolus et que leur avenir dépendrait de leur capacité à se structurer pour proposer des services à valeur ajoutée à une clientèle internationale. Ces services devront se destiner à accompagner le développement des opérations aux groupes internationaux, non seulement en Inde, mais surtout en Afrique.

Pour éviter les critiques des administrations fiscales des États investisseurs, les filiales mauriciennes des groupes étrangers devront être dotées de la substance économique dont elles ont besoin pour le développement de leurs activités locales.

Ces sociétés mauriciennes devront disposer, par exemple, des moyens humains et techniques pour rendre les services (administratifs, IT, comptables, financiers, juridiques, fiscaux et autres) dont leurs sociétés sœurs régionales auront besoin en support de leur propre développement sur le continent.

Cette nouvelle exigence de substance est une excellente nouvelle car elle amènera les Management compagnies à étoffer leurs offres de service, et donc leurs activités.

Cette nouvelle donne générera notamment de nouveaux emplois qualifiés à Maurice et permettra, par ailleurs, aux groupes internationaux de trouver localement le relais géographique dont ils ont besoin pour leur développement régional.

Les opérateurs locaux pourront souligner la stabilité politique de Maurice, le bon fonctionnement de ses institutions judiciaires, sa multiculturalité, la qualité et la compétitivité de sa main-d’œuvre locale, ainsi que le haut niveau de ses infrastructures aériennes, terrestres et portuaires. Ils font du pays une destination qui émerge souvent comme la plus compétitive pour les multinationales s’interrogeant sur la localisation de leurs holdings intermédiaires, quartiers généraux et / ou Services hub pour asseoir leur développement régional.

Les Management Companies pourront rappeler à leurs prospects qu’en plus d’être signataires de nombreux traités fiscaux de non-double imposition et de traités permettant de sécuriser les investissements de sociétés mauriciennes dans plusieurs États africains, Maurice est également signataire de traités destinés à créer de nouvelles zones économiques dans plusieurs États africains (Ghana, Sénégal, Madagascar).

Ces nouvelles zones économiques internationales, si elles sont bien exploitées, pourraient devenir un formidable outil de développement Sud-Sud et donner un avantage compétitif et déterminant à Maurice pour accomplir sa destinée africaine si les conventions correspondantes prévoyaient une clause permettant aux filiales africaines d’une société mère mauricienne de bénéficier du même régime fiscal que celui qui leur aurait été appliqué à Maurice.

On connaît le fardeau de la fiscalité africaine pour les groupes internationaux et ses taux confiscatoires avec, pour principale conséquence, la limitation de la présence continentale des groupes internationaux.

Cette situation les empêche de participer au développement durable du continent. Or, les zones économiques internationales devraient permettre d’employer la fiscalité comme levier de développement en incitant les grands groupes à augmenter leur présence sur le continent, et donc à contribuer davantage au développement durable, notamment en créant de l’emploi. Ce levier participerait surtout à l’essor de la classe moyenne africaine, moteur de l’économie et pourrait, de ce fait, réduire la pauvreté persistante sur le continent.

Cette approche «win-win» pour Maurice et les États africains concernés pourrait permettre à Maurice de devenir la porte d’entrée principale des investissements étrangers en Afrique.

Compte tenu des réflexions actuelles pour le prochain Budget national, le moment est propice pour activer cette piste.