Type to search

Parole d'experts Rencontre

Vers un second miracle économique?

Share
Vers un second miracle économique? | business-magazine.mu

Le 11 décembre 2014, un nouveau gouvernement est arrivé au pouvoir, en annonçant un second miracle économique. Trente ans après le premier miracle, le challenge est très intéressant car, avec plus d'USD 10 000 de PIB par habitant, les Mauriciens se trouvent aujourd’hui dans une division bien supérieure à celle des années 80. Les problèmes et les opportunités sont totalement différents, mais le miracle est possible, croyons-y !

Les principaux problèmes économiques de Maurice sont au nombre de trois : la productivité, la faible croissance de la population et les infrastructures déliquescentes. La productivité est le problème majeur, qui empêche Maurice d’atteindre depuis cinq ans un taux de croissance supérieur à 4 %. Pour la majorité des employés, la productivité ne s’améliore pas, à cause des faiblesses intrinsèques du système éducatif local ; du manque d’expérience des employés dans les secteurs en forte croissance comme les services financiers ; du manque de volonté de la majorité des employés de se dédier à leur emploi et créer de la valeur à long terme pour l’employeur. La faible croissance de la population (seulement 0,6 % de croissance annuelle ces dix dernières années) est la deuxième contrainte : l’île Maurice manque à la fois de ressources humaines à sa base, pour les emplois manuels simples, mais relativement mal payés et aussi dans le management, non pas en termes de qualifications, mais plutôt d’expérience professionnelle prouvée à l’étranger. Nous avons besoin de «cadres», c’est-à-dire des personnes expérimentées qui sont capables de former par l’exemple et grâce à leurs compétences, leurs collègues plus jeunes. Enfin, il faut déplorer la déliquescence à vue d’œil des infrastructures, notamment des routes nouvellement construites, mais impraticables, de même que la fourniture d’eau, très inégalitaire dans sa répartition car, malgré des pluies abondantes, chaque été une partie de la population souffre de coupures d’eau quasi-permanentes.

Nous soulignerons ici les opportunités offertes par l’Inde, par l’Afrique et par l’île Maurice elle-même. Nous avons très mal géré nos relations avec l’Inde ces cinq dernières années, même s’il est vrai que le manque de leadership en Inde a été fortement préjudiciable. Il fallait démontrer avec fermeté que le traité de non-double imposition entre l’Inde et l’île Maurice n’est pas une passoire, ce qui n’a pas été fait. Si les termes du traité sont ré-établis et gérés par les acteurs de l’investissement en Inde avec des standards équivalents à Singapour, les opportunités d’investissement en Inde vont à nouveau se multiplier, grâce à un contexte politique et économique désormais très favorable en Inde. Concernant l’Afrique, nous n’arrivons malheureusement à saisir que moins de 1 % des opportunités offertes par ce continent de 54 pays. L’île Maurice doit continuer à se rapprocher de l’Afrique, tout en revitalisant ses relations avec l’Inde. L’Afrique regorge de milliers de projets dont nous pouvons faire partie d’une manière ou d’une autre, à condition évidemment que le projet soit éthiquement sain, c’est-à-dire sans corruption. Enfin, l’île Maurice a, elle aussi, encore beaucoup de projets d’avenir, en plaçant une attention particulière sur la qualité du travail fourni. Ces projets existent dans la diversification agricole, l’industrie agroalimentaire, l’éco-tourisme, le BPO et les services financiers.

L’île Maurice possède des atouts majeurs, qui permettent de conserver un fort optimisme quant à l’avenir du pays. En premier lieu, sa diversité exceptionnelle, en termes géographiques (les différentes côtes et l’intérieur du pays ont chacun leur cachet propre), de population évidemment, mais surtout de secteurs économiques, car Maurice est un des pays les plus équilibrés du monde pour les contributions respectives de l’agriculture (elle-même diversifiée aujourd’hui), d’industries (même si nous aurions souhaité davantage d’industries locales non textiles, par exemple dans l’agroalimentaire) et de services : en premier lieu le tourisme, qui n’a jamais réellement régressé, contrairement à beaucoup de pays comme l’Égypte, la Tunisie ou, plus près de nous le Kenya, mais aussi le BPO et surtout les services financiers, qui possèdent un grand avenir avec davantage de cadres expérimentés. L’île Maurice demeure un exemple de réussite économique au niveau mondial, mais le plus dur reste à faire : le second miracle économique ne se produira que si le gouvernement et le secteur privé travaillent ensemble, avec la même vision patriotique qui a prévalu par le passé. De vrais partenariats public-privé doivent enfin voir le jour, permettant de conjuguer la rigueur et l’expérience des entrepreneurs du privé avec la sagesse et le recul nécessaires au gouvernement du peuple mauricien.