Jeux des îles de l’océan Indien : quelles retombées pour l’économie ?

Tous les regards seront braqués sur Maurice du 19 au 28 juillet. Le gouvernement n’a pas lésiné sur les moyens pour faire des 10e Jeux des îles de l’océan Indien (JIOI) un succès. Au niveau du Comité d’organisation des Jeux des îles (COJI), l’on se dit fin prêt pour accueillir cette compétition multisports qui regroupera sept pays de l’indianocéanie : Maurice, La Réunion, Madagascar, les Seychelles, les Comores, Mayotte et les Maldives.

Déjà, dans la Grèce antique et l’Empire romain, les Jeux étaient synonymes de prestige et de liesse populaire. Pour un petit État insulaire comme Maurice, qui ambitionne d’intégrer la ligne des pays à revenu élevé, le fait d’accueillir les JIOI pour une troisième fois – après 1985 et 2003 –, témoigne de sa capacité de se doter d’infrastructures sportives d’avantgarde. Ce genre d’événement sportif est reconnu comme un catalyseur pour la promotion du commerce et des investissements. De manière générale, les JIOI ont des retombées économiques, sociales et culturelles.

Il ne faut pas oublier que Maurice gagnera en visibilité. Celle-ci transcendera notre région. Plusieurs campagnes de marketing ont été réalisées. L’Association des Radios Télévisions de l’océan Indien (ARTOI) s’est associée à la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) pour que l’événement soit retransmis dans toutes les îles de l’océan Indien. À ce propos, la MBC a investi dans deux vans pour les transmissions live and direct.

Selon Giandev Moteea, trésorier et responsable de la commission finance et marketing du COJI, il est clair que la visibilité que nous apportent les JIOI a un coût économique. «Ces jeux auront inévitablement un impact sur plusieurs segments de l’économie. Pour chaque projet, qu’il s’agisse du transport, de l’hébergement, de la confection des médailles et de l’offre restauration, il y a eu une procédure d’allocation de contrats. Tout cela est bénéfique économiquement et a nécessité l’apport de nombreuses entreprises mauriciennes», précise Giandev Moteea, qui ajoute que cet événement sportif est définitivement source d’externalités positives : animation, cohésion sociale, création d’activités économiques, attraction touristique, aménagement du pays (transports, infrastructures, services publics).

Si pour le moment l’on n’a pas encore compilé les chiffres, les organisateurs s’attendent à des retombées économiques positives. Celles-ci découlent notamment de l’arrivée des supporters des îles voisines, de l’accroissement des activités dans les hôtels et restaurants, des recettes provenant de la billetterie et des emplois générés par la construction des infrastructures sportives.

Toutefois, selon certains observateurs, entre les prévisions euphoriques ex-ante et les retombées réelles ex-post, il y a souvent, malheureusement, un décalage. D’un autre côté, l’impact économique est difficile à prévoir et à évaluer avant la compétition sportive.

Trois ans d’organisation

Afin de garantir le succès de l’événement, le COJI, qui a mis sur pied en février 2016, a instauré 15 commissions. Par rapport aux activités des commissions, environ Rs 450 millions ont été injectées dans l’économie entre 2016 et 2019. La contribution provenant des 27 sponsors s’élève à Rs 120 millions. Mieux que l’estimation initiale de Rs 100 millions. Il faut savoir que l’argent recueilli du parrainage équivaut à 25 % du budget de l’organisation des JIOI. «Ces Jeux ont une telle valeur de cohésion sociale et de patriotisme que nous avons noté un réel engouement dans les entreprises en termes de contributions», souligne Giandev Moteea. Du côté de Mauritius Telecom, l’on se dit fier de s’associer aux JIOI. «MT est déjà Platinum Sponsor des JIOI mais par esprit de patriotisme, nous voulions faire plus, contribuer davantage pour que ce grand rassemblement sportif inter-île soit une réelle réussite», souligne Sherry Singh, le CEO de Mauritius Telecom qui, dans le cadre des JIOI, a développé le JIOI 2019 app. Autre poste de dépense : la préparation des athlètes. Grosso modo, les camps d’entraînement à Maurice et à l’étranger ont nécessité un budget s’élevant à plus de Rs 100 millions.

Concernant les projets d’infrastructures, le complexe de Côte d’Or est issu d’une commission mixte bilatérale entre la Chine et Maurice, en novembre 2016, avec à la clef une aide financière des autorités chinoises s’élevant à 350 millions de RMB, soit Rs 1,9 milliard, au moyen d’une combinaison de subventions et de prêts sans intérêt pour le financement du complexe. Le coût total de ce projet est de Rs 4,6 milliards. Celuici est réparti comme suit : Rs 1,05 milliard pour le centre aquatique, Rs 738 millions pour un gymnase polyvalent, Rs 1,97 milliard pour un stade de football et une piste d’athlétisme et Rs 922 millions pour les installations, y compris les travaux hors site et les frais de conseil.

«Les coûts de construction du Côte d’Or National Sports Complex ont été impactés par plusieurs éléments. Nous avons fait le choix de commanditer des études techniques complémentaires afin de ne prendre aucun risque au vu des conditions topographiques du site de construction. Dès la conception, nous avions placé la barre haute s’agissant de la qualité de l’infrastructure que nous souhaitions offrir aux Mauriciens», explique Avinash Gopee, Chairman de la Mauritius Multisports Infrastructure Ltd (MMIL).

Il précise qu’au-delà des Jeux des îles, ce complexe jouera un rôle déterminant dans le développement du sport en se positionnant notamment en tant que high performance centre. Ce complexe est également vu comme un tremplin pour l’économie du sport à Maurice. «Tout en assurant son autonomie et sa pérennité financière en devenant le berceau des principaux secteurs d’activité de Maurice, le complexe réalisera des économies d’échelle sur le long terme et générera d’importants retours d’un point de vue social», soutient-il.

Étant donné que 14 disciplines sportives ont été inscrites aux JIOI 2019, il était impératif d’utiliser les installations existantes. La plupart de ces installations ont dû être modernisées et rénovées. Ainsi, 18 sites ont été rénovés pour un montant de Rs 732 millions. Une somme qui inclut la TVA et les frais de consultant. Quant à l’accueil des athlètes et l’organisation pendant les Jeux, le coût est estimé à Rs 415,5 millions. 

Effet multiplicateur

Tous ces investissements ont, bien entendu, un effet multiplicateur sur l’économie. Beaucoup d’entreprises locales se sont vu octroyer des contrats par les différentes commissions. Les médailles – qui ont coûté environ Rs 3 millions – ont été fabriquées par Karl Ray Co Ltd, du groupe Goldfinger Jewels. Au total, 5 554 médailles – 538 en plaqué or, 538 en plaqué argent, 578 en bronze et 3 900 médailles de participation – seront remises aux athlètes, entraîneurs, juges, officiels et volontaires.

Concernant les équipements des athlètes, ils ont été également réalisés par une entreprise mauricienne. Les tenues officielles de couleur rouge et blanc ont été conçues par City Sport et portent la marque internationale Adidas. De plus, les produits dérivés des JIOI sont déjà en vente. À noter que City Sport est la seule entreprise à pouvoir vendre les produits officiels des JIOI. Selon l’accord entre le COJI et City Sport, l’entreprise devra reverser des commissions au COJI.

«Les compétitions vont se dérouler sur 17 sites. Nous avons dû louer des sites ou les aménager. Par exemple, les compétitions de rugby vont se faire à l’école Northfield et il nous a fallu louer ce site. Quant au tournoi de beach-volley, il se déroulera à Mon Choisy. Là encore, il a fallu créer l’espace nécessaire, aménager les gradins et tout cela a un coût. Il y a donc derrière un gros effet multiplicateur qu’on ne réalise pas forcément et qui est bénéfique à l’économie, à l’emploi, aux entreprises dont beaucoup de PME», étaye Giandev Moteea. Et d’ajouter que les mobilisations qui se font partout dans l’île sont également une source de business pour les artistes qui entrent en jeu.

Par ailleurs, les supporters étrangers apportent une importante source de revenus qu’il reste à quantifier. Et qui circuleront dans l’économie profitant, entre autres, aux hôtels, restaurants, commerces, prestataires de transport, entre autres.

Complexe multisports : le budget revu à la hausse

Il faut savoir que le complexe multisports devait initialement coûter Rs 3,9 milliards sur la base des valeurs auxquelles les contrats avaient été attribués. Cependant, conformément aux recommandations du rapport d’enquête géotechnique, il y a eu une augmentation des coûts s’élevant à Rs 765 millions. Le coût supplémentaire est dû à des modifications de la conception, corroborées par des travaux d’empilement supplémentaires, des modifications de la structure du toit des trois principales installations et des travaux mécaniques, électriques et de plomberie.