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AGOA – Un potentiel commercial exploité à 79,2 %

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AGOA - Un potentiel commercial exploité à 79

En 2016, 56,4 % des exportations mauriciennes vers les États-Unis ont été réalisées sous l’African Growth and Opportunity Act (AGOA). Or, selon l’United States International Trade Commission, le taux d’utilisation du régime s’élevait alors à 74,2 %, pour même s’étendre à 79,2 % si l’on ajoute les 5 % des exportations sous le Generalized System of Preferences (GSP). C’est dire l’importance de cet accord qui donne à lMaurice un accès dutyfree et quota-free à 4 981 produits jusqu’en 2025.

La position géographique de Maurice à proximité du continent africain et son vaste territoire maritime, ainsi que sa longue adhésion aux valeurs de démocratie, font du pays un allié naturel des États-Unis. Et l’ambassadeur David Reimer a récemment rappelé que les relations diplomatiques et commerciales entre Maurice et les Etats-Unis datent de plus de 225 ans, ajoutant que «les États-Unis souhaitent que le commerce entre les deux pays s’accroisse. Nous voulons voir plus de produits américains dans les commerces mauriciens, plus de voitures américaines sur les routes mauriciennes et plus de technologies américaines dans les industries mauriciennes». D’ailleurs, Maurice bénéficie des avantages en franchise de douane et sans quota sous le régime de l’AGOA depuis l’an 2 000.

Malgré cet optimisme affiché, une ombre plane sur ce tableau prometteur. Les ÉtatsUnis sont catégoriques : l’île de Diego Garcia abrite une joint US-UK base, dont la mission est de protéger et de porter assistance rapidement au trafic maritime dans l’océan Indien. Rappelant que 25 % de la pêche maritime mondiale et plus de 50 % des containers transitent dans ces eaux, l’ambassadeur David Reimer prévient que «toute modification de cet état des choses entraînera des répercussions». Et, pour conclure, enjoint fortement les entreprises mauriciennes de commencer à se préparer à l’après-AGOA qui doit expirer en 2025. Si Maurice rejoint le club des économies à revenu élevé, comme les Seychelles, cette non-éligibilité pourrait arriver plus tôt que prévu.

Pour rappel, l’AGOA est un vaste programme visant à promouvoir le commerce entre les États-Unis et les pays d’Afrique, notamment ceux résolument engagés sur la voie du développement de leurs économies de manière démocratique. Cette loi a été promulguée en 2000 sous l’administration Clinton. Certains y voient une initiative cherchant à s’assurer la présence commerciale américaine face à la Belt and Road Initiative du gouvernement chinois. Pendant cette période d’une durée de presque vingt ans, l’accord de l’AGOA a été renouvelée plusieurs fois et, sauf décision contraire, devrait expirer en 2025.

Maurice bénéficie, comme tous les autres pays, des accords de l’AGOA portant sur 3 509 produits. De plus, sous la catégorie de pays moins avancé, le pays est éligible à a dérogation de Third Country Fabric Rule, ce qui étend les avantages à 1 472 produits supplémentaires. Ces 4 981 produits représentent la totalité des produits couverts par le Generalized System of Preferences (GSP) américaine.

Selon Somduth Soborun, ancien ambassadeur de Maurice aux États-Unis et président du Council of Foreign Relations, «l’AGOA a été exploitée majoritairement par l’industrie textile. Or, des milliers de produits pouvaient bénéficier de cet accord d’exportation ‘duty-free’ et ‘quota-free’. Malheureusement, cette information n’est pas descendue vers ceux que l’AGOA visait vraiment : les petites et moyennes entreprises». Ce dernier explique qu’en attendant l’échéance de 2025, les entreprises mauriciennes auraient tout intérêt à profiter des conditions préférentielles de l’AGOA pour pénétrer le marché américain. Et d’ajouter que «l’AGOA est une mine d’or».

Somduth Soborun est d’avis que, sous l’AGOA, plusieurs secteurs peuvent plus facilement se développer aux États-Unis, notamment, la joaillerie, l’agriculture et les produits de la mer, les produits en plastique et en métal, les sacs à main en cuir ainsi que les produits de mode. Pour aller plus loin, Somduth Soborun verrait bien l’institution d’une AGOA Promotion Authority pour connecter les entreprises des deux pays et promouvoir les avantages de cet accord.

Les entreprises mauriciennes peuvent bénéficier de ces accords duty-free et quotafree jusqu’en 2025. Toutefois, cette éligibilité reste conditionnée par le GDP per capita de la Banque mondiale. Ainsi, en 2017, en se qualifiant comme une économie à revenu élevé, les Seychelles ont perdu cette éligibilité. La sortie des accords de l’AGOA impacte fortement les économies concernées. En 2009, suite au renversement du président malgache, Madagascar ne faisait plus partie de l’AGOA et avait vu les exportations de son secteur textile chuter, de 42 % à moins de 10 %. Plusieurs années plus tard, Barack Obama devait réintégrer Madagascar au retour de la stabilité politique.

L’éditionLes marchés en baisse reprennent

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D’après Statistics Mauritius, en 2018, Maurice a exporté pour plus de Rs 4,8 milliards de produits textiles vers les États-Unis, soit plus de la moitié des exportations totales qui s’élevaient à Rs 8 milliards. Selon Geerish Bucktowonsing, Head of Manufacturing (Traditional) de l’Economic Development Board, les marchés qui étaient en baisse reprennent. Ainsi, rappellet-il, l’édition 2019 du salon Texworld, qui s’est tenue du 21 au 23 janvier à New York, a eu des retombées positives pour les neuf opérateurs locaux qui s’étaient déplacés. Les entreprises ont ainsi pu rencontrer de nouveaux acheteurs souhaitant diversifier leurs sources d’approvisionnement. «Maurice peut tirer profit du fast-fashion, produire des produits textiles en petites commandes et pour toutes les saisons, avec une garantie de rapidité de livraison par avion, entre autres», dit-il.

Par ailleurs, de nouveaux produits commencent à être exportés, notamment, l’exportation de la vanille et du poisson en conserve, comme le thon est en hausse. Maurice a, en effet, exporté pour Rs 487 millions de vanille et Rs 8,1 millions de thon. Selon Geerish Bucktowonsing, lors d’un récent congrès en Afrique du Sud, des représentants de l’USAID ont déploré que «la totalité des produits exportés par l’Afrique ne dépasse même pas les exportations du Brésil. Ainsi, le renouvellement de l’AGOA doit faire l’objet d’une négociation bilatérale. Et de conclure : «Il faut rester vigilant et se préparer à l’expiration prévue de l’accord de l’AGOA. Toutefois, le contexte étant extrêmement favorable au développement du commerce avec les pays africains, Maurice doit développer sa communication avec les États-Unis et éventuellement prévoir des collaborations et partenariats avec d’autres pays africains, membres de la SADC ou du COMESA, par exemple, pour développer cet axe du commerce.»