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Démographie : élever un enfant coûte Rs 6 948 par mois

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Démographie : élever un enfant coûte Rs 6 948 par mois | business-magazine.mu

Les Mauriciens font moins de bébés. Au rythme démographique actuel, la population de l’île chutera de 21,31 % d’ici à 40 ans. Une véritable bombe à retardement ! A moins qu’on arrive à désamorcer la bombe à temps, les dégâts provoqués par ce recul de la fécondité seront considérables à tous les points de vue. Voilà le challenge qui attend ceux qui planchent sur la Vision 2030.

En l’absence d’un suivi de l’évolution de la population, la réaction face à ce dysfonctionnement et au phénomène du vieillissement de la population a été très timide jusqu’ici. L’on se souvient de l’appel lancé par le ministre de la Santé, lors d’un atelier de travail intitulé : Managing the fertility paradox in the Republic of Mauritius. «Il est nécessaire de sensibiliser les Mauriciens à la nécessité d’avoir plus d’enfants», avait déclaré Anil Gayan.

Encore faut-il comprendre les raisons du repli du taux de fécondité sous le seuil de remplacement des générations. De 2,1 enfants par femme, il est descendu à 1,4. Certes, il y a la réussite du programme de contrôle des naissances, mais d’autres facteurs découragent également les couples à avoir des enfants. Une étude de Business Magazine/VERDE est très révélatrice du comportement de la génération Y.

Cette génération, qui est en train de redessiner les contours de l’économie mondiale, semble avoir d’autres priorités que celle qu’on veut lui imposer. Pourtant, il faudra trouver des arguments solides pour la sensibiliser aux dangers associés au vieillissement de la population tout en tenant compte d’une perception bien répandue : élever un enfant coûte cher.

D’ailleurs, même le Premier ministre adjoint, Xavier-Luc Duval, a récemment dénoncé «l’irresponsabilité des parents» qui mettent au monde des enfants sans pour autant avoir les moyens financiers de les élever.

À ce titre, l’étude démontre que les charges financières pour élever un enfant de sa naissance jusqu’à l’âge de 3 ans est Rs 6 948 par mois durant la première année. Ces dépenses pourraient atteindre Rs 8 253 d’ici à 2020. Pour parvenir à ces chiffres, les participants ont été invités à détailler leurs dépenses par rapport à leur enfant de 0 à 2 ans. À ceux qui ont déjà un enfant et souhaitent en avoir un autre, il a été demandé d’estimer les dépenses qu’ils s’attendent à encourir les besoins de cet enfant.

L’exercice de collecte de données s’est déroulé entre le 5 septembre et le 3 octobre 2016. Quelque 400 personnes représentatives de la population mauricienne ont été interrogées à travers l’île.

L’équation salaire et nombre d’enfants

Il est à noter que la perception des sondés varie selon la structure familiale et les régions où ils habitent. Parallèlement, il a été permis d’observer que pour toutes les classes sociales, le minimum de salaire mensuel nécessaire à un couple pour offrir à un enfant «un niveau de vie raisonnable» se situe dans la fourchette de Rs 24 000 à Rs 36 000.

Plusieurs éléments influent sur la décision de concevoir un enfant. D’entrée, les sondés évoquent le salaire mensuel comme le principal facteur déterminant le nombre d’enfants qu’ils auront. Les participants estiment en moyenne qu’un salaire minimum de Rs 31 200 par mois permet de répondre raisonnablement aux besoins d’un enfant.

La sécurité d’emploi est une autre source de motivation, de même qu’une relation stable. Un fait intéressant relevé durant le sondage : la possession ou pas d’un logement est aussi tenue en ligne de compte lorsqu’il s’agit d’avoir des enfants. Les gouvernants gagneraient donc à considérer cet aspect dans le cadre de toute réflexion sur une politique de natalité. Surtout après avoir placé la barre très haut en promettant aux Mauriciens 10 000 nouveaux logements sociaux entre 2015 et 2020.

Par ailleurs, les sondés affirment pour la plupart que «l’âge idéal pour le mariage est de 27 ans et pour avoir un enfant de 29 ans». Notons que dans les années ‘90, l’âge moyen pour le mariage était de 25 ans pour les femmes.

Au vu de la situation, on aurait pu croire que le Mauricien ne se sent pas concerné par le vieillissement de la population, mais c’est le contraire qui est vrai. 58 % de ceux interrogés se disent très concernés par ce phénomène tandis que 14 % estiment que c’est une question qu’il faudra adresser dans 40 ans.

«Ceux âgés entre 21 et 30 ans sont d’ailleurs plus enclins à aider à trouver des solutions au problème du vieillissement. C’est cette catégorie de personnes qu’il faudra songer à cibler à travers des incitations», estime Venna Noonaram de VERDE. Ces personnes, fait-elle remarquer, notamment celles qui vivent en régions urbaines, habitent pour la plupart chez leurs parents. En revanche, il est constaté qu’en milieu rural, les jeunes dans la tranche d’âge de 21 à 30 ans sont plus nombreux à être propriétaires.

Qu’on se le dise, Maurice n’est pas le seul pays à faire face au vieillissement de sa population mais ici contrairement à d’autres États, nous sommes loin de mettre en place les politiques pour inverser la courbe. Même la Chambre de Commerce et d’Industrie a jugé opportun de proposer une redéfinition scientifique du seuil d’exemption concernant l’impôt sur le revenu afin que chaque dépendant soit traité de manière égale et aussi «pour résoudre le problème de notre taux de fécondité, qui est très faible».

Selon la Chambre, le calcul actuel comporte des lacunes et il a eu un impact sur notre taux de fécondité qui baisse de manière continue car la définition du seuil d’exemption n’incite pas les ménages à avoir des enfants.

La course à la croissance économique passera inévitablement par la croissance démographique. Reste à voir si les pouvoirs publics trouveront mieux que les discours pour améliorer la natalité. C’est le défi de la prochaine décennie !