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Emploi, un axe prioritaire du Budget 2014

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Emploi

À la veille du Budget, des mesures énergiques sont attendues du ministère des Finances non seulement pour doper la croissance, mais aussi redynamiser le marché de l’emploi afin de résorber le chômage. Le nouveau Secrétaire financier, Dev Manraj, a confirmé que l’emploi sera l’une des priorités de l’exercice budgétaire.

Depuis 2009, sous l’influence de la crise économique mondiale, le chômage a grimpé de manière constante. Une évolution qui inquiète tous les observateurs. De 7,3 %, il est passé à 8 % l’année dernière et devrait atteindre 8,3 % cette année. Mais la crise n’est pas la seule responsable de cette montée. L’économie fait face à des problèmes structurels : l’offre ne suit pas la demande. De même, le système éducatif ne répond pas aux besoins des entreprises. Comme le souligne Pradeep Dursun, directeur général par intérim à la Mauritius Employers’ Federation, notre système d’éducation encourage cette inadéquation entre l’offre et la demande. « L’école ne produit pas ce que l’entreprise veut», observe Pradeep Dursun. Pire, la partie vocationnelle n’a pas été suffisamment développée à l’école, précise-t-il : « Il n’y a aucun endroit où on prépare les jeunes au marché du travail, ni à l’école, ni dans la famille. On leur montre que l’objectif est d’avoir un diplôme. Or, un diplôme ne garantit pas nécessairement un emploi. Aujourd’hui les ‘soft skills’ prennent une valeur fondamentale dans le recrutement. Cette partie-là n’est pas suffisamment développée dans le système scolaire.»

Le résultat est une situation inextricable, car  si un des problèmes majeurs du chômage c’est qu’un tiers des chômeurs sont sous-qualifiés – ils n’ont pas de School Certificate –, désormais même les diplômés n’arrivent pas à trouver un emploi. Le ministre des Finances, Xavier Duval, le reconnaît lui-même. Il expliquait récemment que « beaucoup de ces jeunes diplômés ont probablement choisi des filières qui ne correspondent pas aux besoins du marché ou alors possèdent des qualifications supérieures à ce que les entreprises réclament. »

Du reste, l’un des axes prioritaires du Budget 2014 consistera à redynamiser le marché de l’emploi. Dev Manraj, le nouveau Secrétaire financier, en a apporté la confirmation récemment.

La conjoncture actuelle ne favorise pas la protection des emplois existants, selon certains observateurs, et pourrait même provoquer des licenciements. Le paiement de la compensation salariale est venue fragiliser la situation déjà précaire sur le marché de l’emploi, soulignait récemment Vincent d’Arifat, président de la Mauritius Employers Federation. « Si la situation économique s’améliore et que les entreprises arrivent à payer des compensations ce sera très bien, mais pour le moment nous craignons qu’il y ait des pertes d’emploi », dit-il.

Les remèdes du FMI

Le secteur privé devra débourser Rs 2,6 milliards pour le paiement de la compensation salariale, ce qui représente un montant conséquent. Vincent d’Arifat dit craindre des licenciements notamment dans les petites et moyennes entreprises qui n’ont pas les moyens dans la conjoncture actuelle de payer la compensation et pourraient avoir recours à des licenciements afin de ne pas augmenter le coût de leur masse salariale. 

Pourtant, il existe des solutions au problème du chômage. Pour résoudre le décalage entre l’offre et la demande, le Fonds monétaire International recommande de mieux aligner le cursus scolaire sur les réalités du marché de l’emploi. Le FMI insiste aussi que le système de compensation salariale doit être indexé sur les améliorations de la productivité. «Le seul moyen de contrer le chômage est d’avoir un taux de croissance élevé et supérieur à 4 %. Il nous faut un ‘pro-growth agenda’. Si la croissance reste inférieure à 4 %, cela fera grimper automatiquement le chômage », observe de son côté Renganaden Padayachy, économiste à la Chambre de Commerce et d’Industrie. Celle-ci reste d’ailleurs pessimiste sur le chômage pour cette année, prévoyant un taux de 8,6 %, alors que Statistics Mauritius table sur 8,3 %. Le FMI établit un scénario assez similaire sur l’évolution du chômage jusqu’en 2017.

Si le pays parvient à réaliser une croissance moyenne de 4,1 % sur les trois prochaines années, le taux de chômage devrait baisser de 1 % et atteindre 7 % sur les cinq prochaines années. « Un taux de chômage à 6 % d’ici à 2017 nécessiterait une croissance de 5 %»,précise le FMI dans son Staff report for Article IV Consultation, ce qui est légèrement supérieur aux estimations de l’institution qui prévoit un taux de croissance économique potentiel de 4,5 %. On peut alors s’interroger sur la pertinence de l’objectif annoncé des autorités pour un taux de chômage à 5 % dans dix ans. Si certains esquissent un sourire devant un tel optimisme, l’économiste Yousouf Ismaël estime, pour sa part, qu’un objectif si ambitieux ne pourra se concrétiser que s’il y a une réforme de l’éducation et un développement de la formation vocationnelle dans le pays.

Pradeep Dursun suggère, quant à lui, qu’on encourage la professionnalisation des différents métiers en introduisant le CAP (Certificat d’aptitude professionnel) comme c’est le cas en France, notamment.

« Le CAP c’est le socle minimum.En même temps, il permettra de valoriser plusieurs métiers dans les domaines de la cuisine, de la vente, etc. », souligne Pradeep Dursun qui, par ailleurs, met en garde contre le danger du chômage structurel. Un facteur décélérateur que l’économie ne peut se permettre. Le responsable de la MEF suggère également l’introduction d’un Youth Rate dans les entreprises : « Le Youth Rate pourrait, par exemple, concerner les jeunes de 16 à 25 ans. Il s’agit d’un salaire inférieur à celui des adultes et qui sert d’incitation pour les entreprises à employer des jeunes. C’est un projet valable pour les jeunes pour leur permettre de trouver plus facilement un emploi et cela permet parallèlement aux entreprises de réduire leurs charges. »

À la MEF, on semble de plus en plus convaincu que la solution au chômage passera par la capacité de notre économie à créer de l’emploi pour les jeunes.

Le spectre des pertes d’emploi

Pour l’économiste Yousouf Ismaël, un réel problème qui contribue au chômage à Maurice c’est que certains refusent de travailler pour des bas salaires. Le problème des bas salaires dans certains secteurs est plus grave que celui du chômage, souligne Yousouf Ismaël : « Nous avons beaucoup de chômeurs parce que certains ont fait le choix de ne pas travailler. D’autres préfèrent se tourner vers le secteur informel. » Par ailleurs, l’économiste souligne que le chômage ne peut qu’augmenter lorsque l’investissement privé baisse. Il observe également que le gouvernement crée de l’emploi pour les étrangers, notamment les ouvriers chinois sur les chantiers de construction et non pour les Mauriciens. Yousouf Ismaël prévoit des pertes d’emploi dans les mois à venir dans le secteur de la construction et dans d’autres secteurs.
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