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Shailen Sreekeessoon (Deputy CEO du pôle non bancaire de SBM Holdings) : «Maurice dispose d’un stock de réserves très solide»

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Shailen Sreekeessoon (Deputy CEO du pôle non bancaire de SBM Holdings) : «Maurice dispose d’un stock de réserves très solide» | business-magazine.mu

SBM Holdings poursuit sa stratégie de régionalisation. Après Madagascar, le Kenya et l’Inde, le groupe se tourne vers les Seychelles. Est-ce à dire que vous misez sur l’international pour accélérer votre croissance ?

La régionalisation est, en effet, un pilier important de la stratégie de croissance de la SBM, et se situe dans la démarche du groupe de devenir un acteur important dans la facilitation du business dans la région Asie-Afrique, avec Maurice comme centre de liaison. Des étapes importantes ont été franchies, l’année dernière, dans la stratégie de régionalisation. Au Kenya, l’acquisition de certains actifs et passifs de Chase Bank Limited (In Receivership) a rehaussé le profil de la SBM dans ce marché. Le groupe a également jeté les bases d’une future expansion en Inde avec la mise en place d’une structure de filiale à 100 %. Nos opérations à Madagascar et aux Seychelles font partie de notre stratégie plus large de présence dans l’océan Indien.

Notre objectif est de construire de solides franchises nationales dans chacune des zones géographiques où nous opérons. En même temps, nous souhaitons utiliser notre présence régionale pour explorer les synergies au sein des différentes opérations afin de fournir un service plus élargi et approfondi, et basé sur la proximité, car nous reconnaissons que les flux d’affaires en Inde, en Afrique et dans l’océan Indien sont appelés à croître de manière significative au fil du temps, avec l’appui d’une base d’investisseurs opérant de plus en plus entre ces régions.

Conformément à la stratégie du pays, nous visons à faire de nos opérations de banque commerciale et de banque d’investissement à Maurice un élément central dans l’établissement et le service de transactions interrégionales.

Notre démarche de régionalisation fait partie d’une stratégie à plusieurs volets qui vise également à élargir notre offre de solutions, à moderniser nos canaux de service, à agrandir notre base de talents et à renforcer nos pratiques de gestion des risques, entre autres.

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Si les activités à l’international constituent un fort potentiel de croissance ; en revanche, les risques sont réels. L’on en a eu la démonstration l’année dernière avec une hausse importante dans les prêts non performants. Dans sa volonté d’internationalisation, la banque a-t-elle pris les mesures adéquates pour renforcer ses procédures de gestion de risques ?

Le management du risque fait partie intégrante de la gouvernance de toute entreprise. À la SBM, l’expansion rapide de notre segment B dans le passé, plus particulièrement pour les prêts transfrontaliers, a accru les risques liés à ce segment. Nous avons maintenant renforcé notre gestion des risques, notamment à travers la mise en place d’un plan de mesures correctives pour le segment B. Celles-ci incluent le cadre d’analyse du risque-pays, une révision de notre concentration de risques, une formation pourvue à tous les niveaux afin de renforcer la culture du risque et l’amélioration du processus de crédit.

Nous sommes à présent satisfaits du progrès que nous avons accompli depuis. Et sommes d’avis que nous disposons de contrôles de risque adaptés pour ce segment. J’aimerais ici souligner que le segment B concerne les activités transfrontalières de SBM Bank (Mauritius) Ltd, notre banque locale, et non pas les opérations de nos subsidiaires régionales au Kenya, en Inde ou à Madagascar. La nouvelle approche de nos prêts transfrontaliers est plus robuste et résiliente et nous avons repris notre phase de croissance. Nous surveillons aussi de près les opérations de crédit de nos subsidiaires à l’étranger avec rigueur et beaucoup de contrôle. Notre groupe est bien capitalisé et fortement liquide.

Depuis l’année dernière, l’IFRS 9 est en vigueur. Avec cette nouvelle norme comptable, les banques doivent revoir leur mode de calcul pour la dépréciation des instruments financiers. Dans quelle mesure l’IFRS 9 permet-elle aux banques de mieux évaluer les risques associés à leurs actifs ?

L’IFRS 9 a notamment apporté des changements à l’évaluation des instruments financiers, à la comptabilisation des pertes de valeur et au modèle de provisionnement. La mise en place de la norme IFRS 9 permet une reconnaissance et une approche plus proactives de l’impact des risques sur la performance. Outre l’application du standard comptable, il incombe aux institutions financières de faire montre de prudence dans leurs opérations. La SBM a toujours insisté sur l’importance d’une gestion des risques appropriée et, avec notre plan de mesures correctives, nous avons renforcé nos pratiques de gestion des risques.

L’Afrique de l’Est est en pleine croissance. D’où la démarche du groupe de se positionner sur le Kenya, une économie qui a réalisé une croissance robuste de 6,3 % en 2018. Après bientôt un an d’opération, SBM Kenya a-t-elle trouvé sa vitesse de croisière ?

À la suite de l’achat de la Fidelity Commercial Bank au Kenya, en mai 2017, la SBM y a considérablement accéléré ses activités. En août 2018, le groupe a acquis les actifs et passifs dissociés de Chase Bank Limited (In Receivership). On est actuellement dans une phase de consolidation et de croissance dans ce pays et nous avons déjà commencé à observer les premiers signes positifs.

SBM Kenya dispose d’un fort potentiel compte tenu des fondamentaux économiques de ce pays. À noter qu’elle est passée de la 31e à la 11e places en moins de deux ans, devenant ainsi une banque plus importante au Kenya. SBM Kenya exploitera également les synergies avec d’autres entités du groupe afin de développer de manière ciblée les activités commerciales et les ventes croisées. On peut ainsi s’attendre à ce que la performance et la contribution de cette filiale s’améliorent à l’avenir, vu que le Kenya est un marché dynamique et en plein essor.

Quand est-ce que vous prévoyez de démarrer vos opérations aux Seychelles, et quelles sont vos ambitions sur ce marché ?

Nos opérations aux Seychelles débuteront bientôt. Cette expansion est conforme aux ambitions de croissance du groupe dans la région. Nous comptons offrir plus de choix et une meilleure prestation de service aux clients seychellois et à ceux de la région opérant aux Seychelles.

Votre vision est de devenir une banque globale. Cela dit, après les Seychelles, quel autre marché est dans votre viseur ?

Notre vision n’est pas d’être en concurrence avec les grandes banques au niveau mondial, mais plutôt d’être un acteur fort dans le secteur financier dans la région. Avec notre présence déjà établie en Inde, en Afrique de l’Est et dans l’océan Indien, l’accent est sur la consolidation des opérations dans chaque entité et le développement de la synergie régionale, en s’appuyant sur le développement de solutions adaptées, la mise en place de méthodes de travail appropriées, la gestion efficace des risques, l’innovation et l’agrandissement de notre base de talents. Nous ne comptons pas démarrer des opérations bancaires dans d’autres pays pour l’instant, sauf bien sûr si des opportunités exceptionnelles qui soient en ligne avec notre stratégie se présentent. Nous les évaluerons bien sûr au cas par cas.

Sur la Bourse de Maurice, l’action SBM Holdings est dans un cycle baissier depuis un an. À quand peut-on s’attendre à un rebond ?

Suivant la tendance mondiale, pas mal d’investisseurs étrangers désinvestissent dans les marchés émergents, y compris à Maurice. C’est d’ailleurs l’un des facteurs qui ont causé une chute dans le cours de notre action, ce qui est aussi le cas pour d’autres grosses capitalisations (blue chips) sur la Bourse de Maurice. Cependant, nous pensons avoir relevé certains défis majeurs. Le groupe a progressé de manière satisfaisante dans sa stratégie de diversification et de régionalisation en élargissant l’offre – notamment à travers ses services de banque d’investissement – et en se positionnant dans les marchés émergents de la région. De plus, le groupe a consolidé les pratiques en matière de gestion des risques et se trouve dans une position confortable de liquidités et de capital. Nous avons également démontré notre engagement en faveur du développement durable sur tous les paramètres. Notamment les paramètres économiques, sociaux, environnementaux et de gouvernance. Nous nous concentrons ainsi sur l’exécution de notre stratégie globale et sommes confiants qu’une bonne performance dans la durée aiderait grandement à créer une dynamique positive dans le cours des actions de la SBM.

},L’International Business Magazine a récemment décerné trois prix au groupe SBM. Faut-il y voir un signe de consolidation des différents segments de la banque ?

Effectivement, notre groupe s’est vu décerner trois récompenses par le prestigieux International Business Magazine, notamment les titres de Best Private Banking & Wealth Management Bank Mauritius 2019 et Best CSR Programme Mauritius 2019 à la SBM Bank (Mauritius) et celui de Best Stock Broker Mauritius 2019 attribué à la SBM Securities. Ceux-ci s’ajoutent à d’autres récompenses que nous avons reçues de la part d’institutions comme The Banker. Ces récompenses prennent notamment en compte la performance et les diverses initiatives entreprises par le groupe afin de croître ses parts de marché et de diversifier ses activités pour servir une clientèle variée. Elles sont une source de motivation supplémentaire à la formidable équipe de la SBM qui est déterminée à proposer des solutions et un service de qualité à la clientèle.

Parlons économie. Le dernier SBM Insights prévoit que l’économie mauricienne croîtra de 3,9 % cette année, avec un Pib estimé autour de Rs 511 milliards. Les mesures budgétaires auront-elles un impact sur notre performance ?

Nos prévisions de croissance avaient de manière générale pris en compte le scénario du Budget. On peut observer que la politique économique a été cohérente sur plusieurs exercices budgétaires autour de quelques axes clés. D’abord, l’amélioration du pouvoir d’achat des groupes moins bien lotis a favorisé une augmentation de la demande. 

Ensuite, il y a eu une amélioration au niveau de l’offre, notamment à travers les infrastructures publiques.

Ces ressources soutiennent l’investissement, créent des emplois, et consolident le potentiel de croissance. Et, finalement, on a encouragé un environnement propice aux affaires et à l’entrepreneuriat à travers une fiscalité légère et un cadre légal et régulateur favorable à l’avènement de nouveaux pôles de croissance, surtout en positionnant Maurice comme plaque tournante de l’innovation, des affaires et de la haute finance dans la région.

L’équilibre entre, d’une part, doper la performance courante tout en réalisant les objectifs sociaux et, d’autre part, réaliser la stratégie de croissance dans la durée est délicat, de surcroît dans un contexte économique global difficile et volatil.

Concernant nos prévisions, nous observons une détérioration dans l’environnement économique mondial, alors que l’inflation sera vraisemblablement encore plus faible que prévu. Nous surveillons la situation et réviserons nos prévisions en conséquence.

Mais, de manière générale, nous constatons que le pays arrive à tirer son épingle du jeu, avec une performance économique résiliente.

Maurice ambitionne de devenir une économie à revenu élevé. En se basant sur le modèle de SBM Insights, à quand peut-on s’attendre à atteindre ce statut ?

Passer d’une économie à revenu moyen à une économie à revenu élevé peut s’avérer difficile. Très peu de pays ont réussi cette transition dans les dix ou vingt dernières années. Prenant en considération les prévisions actuelles de taux de croissance, aussi bien que les changements potentiels dans la classification des pays en termes de revenus, Maurice devrait, selon le dernier plan stratégique triennal du gouvernement, passer à une économie à revenu élevé d’ici à 2023.

Il faut toutefois souligner qu’un pays à revenu élevé ne se mesure pas simplement en termes de chiffres, mais est aussi un état d’esprit. Cela implique tous les acteurs de l’économie tels que les ménages, les investisseurs et les régulateurs. Pour Maurice, les mesures prises pour l’amélioration de nos infrastructures, le renforcement de notre système éducatif, la numérisation et l’augmentation de la capacité de notre bande passante aussi bien que des initiatives prises en faveur du développement durable, de diversification, d’innovation, de renforcement des PME et la mobilité internationale des talents sont des mesures pour parvenir à cela. Mais il y a aussi des choix difficiles à faire en tant que pays et je souhaiterais plus de débats sur quelques sujets clés au niveau de la population. Par exemple, il faut voir dans quelle mesure nous sommes prêts à nous ouvrir aux talents étrangers ? Cela est un des facteurs pouvant catalyser la transition vers une économie à revenu élevé, mais avec des implications – pas nécessairement bonnes ou mauvaises – sur la société. Le cadre d’exploitation de la numérisation des services mérite également notre attention. Au final, nos choix de mesures économiques doivent bénéficier à la population mauricienne et être en harmonie avec nos valeurs nationales.

En cette période électorale, la communauté des affaires adopte une posture attentiste. Cette conjoncture risque-t-elle d’influer sur les décisions d’investissement ?

Après la crise financière mondiale en 2008-09, nous avons observé une timidité générale de la part des investisseurs privés, surtout dans les grands projets. Cette tendance a été renversée à partir de 2016, avec une reprise dans l’investissement privé. Si l’on se fie aux prévisions de Statistics Mauritius, l’investissement privé dans les travaux de construction, bâtiments inclus, devrait encore croître cette année. Nous observons un intérêt des investisseurs sur les récentes années dans les domaines de l’hôtellerie, de l’immobilier, des énergies renouvelables, de la construction, du dessalement et de la santé. Je ne pense pas que les entreprises vont longuement retarder leurs projets si elles estiment que ceux-ci sont rentables.

Depuis la présentation du Budget, la décision du gouvernement de puiser du surplus sur les opérations de change pour le remboursement anticipé de la dette publique divise. Quelle est votre posture sur la question ?

Le pays dispose d’un stock de réserves très solide. De ce fait, les craintes concernant une dépréciation effrénée de la roupie sont, selon moi, exagérées. Dans les circonstances actuelles, une roupie modérément plus compétitive serait de toute façon bénéfique à l’économie étant donné que les pressions inflationnistes sont à présent limitées. De plus, les risques liés au niveau de la dette – bien que loin d’être alarmants – sont plus élevés à ce jour que ceux liés à une dépréciation non contrôlée de la roupie. Dans l’ensemble, l’impact économique net de cette mesure devrait donc être positif. Parallèlement, je souhaite que les autorités mettent en place les règles nécessaires pour prévenir d’éventuels abus.

Il y a un rapport intrinsèque entre les réserves et l’épargne, de même qu’avec la balance des paiements. Le fait que nos réserves totalisent 11,8 mois d’importation est-il un signe de richesse ?

Je dirais plutôt que c’est une indication de notre résilience face aux chocs externes. À travers le monde, très peu de pays – même parmi les plus riches – ont une couverture à l’importation aussi élevée. Nous considérons généralement qu’une couverture à l’importation de 4 à 6 mois offre une protection raisonnablement bonne contre les chocs éventuels, bien que cette fourchette puisse varier dans les deux sens compte tenu des facteurs spécifiques à chaque pays.

Vous venez d’être nommé Deputy CEO du pôle financier non bancaire du groupe SBM. Quelles sont vos priorités ?

Tout d’abord, je tiens à remercier le Board et la direction de la SBM pour m’avoir fait confiance. J’en suis très «Nous visons à élargir notre clientèle le long du corridor Asie-Afrique» heureux et fier car la finance est un domaine qui me passionne.

Le secteur financier mauricien connaît un essor certain dans un contexte global qui devient de plus en plus complexe. Le secteur financier se réinvente en proposant des services à plus grande valeur ajoutée. Avec les incitations mises en place par les autorités, nous sommes confiants que nous pouvons, à la SBM, apporter notre contribution dans ce secteur. La création d’une banque d’investissement dans le pôle financier non bancaire du groupe est un pas dans cette direction.

Forts de la présence du groupe SBM dans la région, nous visons également à élargir notre clientèle le long du corridor Asie-Afrique, en utilisant Maurice comme plaque tournante. J’estime que les opportunités sont considérables. L’équipe actuelle a commencé un bon travail en jetant les bases de la banque d’investissement ainsi que d’autres services financiers. Pour ma part, je compte être à l’écoute de nos clients et aider à consolider l’équipe afin de proposer des solutions de finance adaptées et de construire un solide bilan.

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