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Un environnement économique dégradé et plus complexe

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Un environnement économique dégradé et plus complexe | business-magazine.mu

«Growth for a greater good ». C’était le slogan du Budget 2012. Lors de sa présentation, le ministre des Finances, Xavier Luc Duval, s’était montré combatif mais serein quant au financement de son budget. Il s’était même payé le luxe d’annoncer qu’il maintiendrait le déficit budgétaire à 3,8 % du PIB et qu’il ramènerait le niveau de l’endettement public à 54 % de ce même PIB.

À l’époque, le ministre des Finances affichait sa volonté de relancer l’investissement afin de préparer le pays à la reprise. Le Joint Economic Council (JEC) avait d’ailleurs salué la loi de finances en estimant par la voix de son président de l’époque, Louis Rivalland, qu’il s’agissait d’un « budget pro-investissement ».

Aujourd’hui, force est de constater que la croissance n’est pas au rendez-vous. Au début de l’année, on tablait pour 2012 sur une progression d’environ 4 % de la richesse nationale, mais au fil des révisions à la baisse, on est désormais plus près des 3 %.

Statistics Mauritius table sur 3,2 % et la Bank of Mauritius (BoM) sur 3,3 %. Ces révisions sont intervenues alors que les perspectives des secteurs dépendants des exportations (tourisme et industrie manufacturière) se sont assombries du fait de la persistance de la crise dans la zone euro. Et les premiers chiffres avancés pour 2013 ne sont guère réjouissants puisque la Chambre de Commerce et d’Industrie parle déjà d’un taux de 2,9 %. On est donc très loin de l’objectif de doubler la croissance à 6 % au cours des cinq prochaines années.

L’inflation à 4,3 %

\Côté déficit budgétaire, il semble qu’il n’y ait pas de problème. Mais si Xavier Luc Duval a réussi à contenir le déficit budgétaire à 3 % du PIB, comme il l’a récemment annoncé, c’est, selon de nombreux observateurs, parce qu’il n’a pas dépensé tout ce qu’il aurait pu. Ce qui n’a sans doute pas été sans effet sur la croissance. Certains laissent par ailleurs entendre qu’il a reconstitué des réserves afin de pouvoir faire face en cas de coup dur. Un peu à l’image, en son temps, de Rama Sithanen qui avait alimenté des fonds pour financer son Stimulus Package.

En termes de dette publique, la situation est à première vue maîtrisée. Elle est passée de Rs 176,7 milliards à Rs 192,3 milliards entre septembre 2011 et septembre dernier et représente aujourd’hui 56,8 % du PIB. C’est plus que ce qu’avait promis le ministre des Finances, mais bien en deçà de la cote d’alerte des 60 % du PIB. Toutefois, on peut remarquer que la dette publique a progressé en un an de 8,8 %, soit plus de deux fois plus vite que la richesse nationale. À ce rythme, la zone rouge pourrait prochainement être atteinte.

Sur le front de l’inflation, la situation semble également maîtrisée. Selon les derniers chiffres de Statistics Mauritius, l’inflation moyenne sur 12 mois (headline inflation) est ressortie à 4,3 % en octobre, alors qu’elle se situait encore à 6,4 % un an auparavant.

Toutefois, l’inflation sur 12 mois (year on year inflation) est repartie à la hausse à 4,2 % en octobre contre 3,9 % en septembre et se situe à son plus haut niveau depuis janvier dernier.

Le gros point noir c’est l’investissement privé qui connaît un recul de 3,3 % en 2012 et devrait même enregistrer une plus forte baisse – de l’ordre de 4 % – en 2013 contre une hausse de 1,9 % en 2011. Les allègements fiscaux du Budget 2012 comme l’élimination de la Capital Gains Tax, la Solidarity Tax ou la taxe sur les dividendes n’auront donc pas véritablement porté leurs fruits. C’est qu’entre-temps, le moral des chefs d’entreprise s’est sérieusement dégradé. Selon la dernière enquête de la Chambre de Commerce et d’Industrie, l’indicateur du climat des affaires est retombé à son plus bas niveau depuis son lancement en juin 2010.

Pour la première fois, toutes les variables utilisées dans cet indicateur (perceptions des entrepreneurs sur la situation de leurs entreprises, niveau des commandes fermes, anticipations sur l’évolution des affaires au cours des trois prochains mois, perspectives d’embauches, niveau des stocks de produits finis) sont défavorables. Pour expliquer leur blues, les chefs d’entreprise sondés avancent notamment la surévaluation de la roupie, la politique fiscale et un environnement des affaires marqué par une concurrence déloyale.

Situation mondiale morose

Et ce n’est pas la situation internationale qui va leur redonner du baume au coeur. Un récent rapport de l’OCDE (Organisation pour la Coopération et le Développement Economique) prévoit pour le quatrième trimestre 2012 de faibles croissances sinon un recul d’activité pour certains pays du G7. Même si les États- Unis font un peu mieux avec une croissance trimestrielle attendue de 2,4 % du fait d’une amélioration du marché de l’immobilier, les perspectives de croissance mondiale restent moroses du fait de l’incertitude concernant la crise dans la zone euro.

D’un point de vue général, le climat des affaires et la confiance des consommateurs sont bas. Même en Chine, l’on constate un recul de la production manufacturière et des exportations. Et dans un contexte de rigueur avec des budgets d’austérité un peu partout dans les pays développés, il ne faut pas s’attendre à un véritable retournement de tendance. Xavier Luc Duval devra en tenir compte.

Joseph Stiglitz pour un budget expansionniste

\Joseph Stiglitz, le prix Nobel d’économie qui était passé à Maurice début 2011, appelle les gouvernements à dépenser plus. « Le danger est désormais que les politiciens et les marchés croient que la politique monétaire peut ressusciter l’économie. Malheureusement, son principal effet pour l’instant est de détourner l’attention de mesures qui stimuleraient vraiment la croissance, notamment une politique budgétaire expansionniste et des réformes du secteur financier afin de relancer l’activité de prêt », westime-t-il.
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