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Fintech : rattraper le wagon du développement

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Fintech : rattraper le wagon du développement | business-magazine.mu

À travers le monde, la Fintech connaît une croissance exponentielle. Or, à Maurice, le secteur financier non bancaire, confiné dans une forme de léthargie, n’a pas été suffisamment réactif.

Le déploiement de la technologie dans les opérations financières est aujourd’hui une impérieuse nécessité. L’investissement dans les infrastructures IT et l’utilisation de l’Internet et du mobile permettent aux entreprises de réaliser des gains d’efficience considérables.

À Maurice, les conditions sont propices pour que les sociétés financières exploitent le filon de la Fintech (Financial technology ou technologie financière). En effet, 78 % de la population est connectée à Internet. De plus, 51 % des Mauriciens ont accès au Web sur leur mobile.C’est le secteur bancaire qui a été le plus prompt à saisir la vague. Valeur du jour, sur les 23 banques en opération, 18 offrent le service bancaire par Internet (Internet banking), révèle une récente étude de KPMG sur le Digital banking. Toutefois, seules cinq banques proposent des services bancaires mobiles (Mobile banking). Quand on vient aux Payment schemes, on ne retrouve que trois services : Juice, Orange Money et Emtel Mobile Service.

Le Mobile banking n’a vraiment démarré qu’il y a trois ans. En 2014, la valeur des transactions à travers le mobile ne se chiffrait qu’à Rs 400 000. Celle-ci est passée à Rs 163,5 millions en 2016. À janvier 2017, on comptait 889 071 abonnés aux services bancaires mobiles.

Dans le secteur financier non bancaire, le démarrage a été beaucoup plus lent. La faute peut-être à l’absence d’un cadre juridique sur la Fintech. Pour donner les moyens au secteur de décoller, le Board of Investment a pris les devants en mettant en place une Regulatory Sandbox Licence, un régime qui donne la possibilité aux opérateurs de s’engager dans ce créneau.

Rogers Capital, le pôle Fintech du groupe Rogers, fait partie de ces acteurs qui ont fait de la technologie financière leur modèle d’affaires. Pour son CEO, Kabir Ruhee, Maurice a un potentiel énorme dans le domaine de la Fintech. «Nous avons l’opportunité de devenir l’un des leaders dans la Fintech. Pour cela, il faut mettre en place toutes les structures en termes de réglementations et de facilitation», plaide-t-il. Mais, reconnaît-il, nous avons du retard à rattraper.

Utiliser des progiciels métiers

Non loin, le Kenya a bâti une industrie de Fintech sur des fondations solides. Aujourd’hui, 70 %de la population kenyane utilise les services bancaires en ligne à travers le système de financement M-Pesa. La désintermédiation bancaire est une réa-lité depuis 10 ans dans cet État d’Afrique de l’Est. Ne parlons pas des champions de la Fintech, à l’instar du Royaume-Uni, de Singapour, de la Corée du Sud, de l’Allemagne et de Hong Kong.

Kabir Ruhee est toutefois optimiste et entrevoit des jours meilleurs : «À Maurice, le taux de pénétration de la Fintech est encore faible, mais je pense qu’il y aura une avancée majeure compte tenu de l’ouverture du pays et des habitudes de consommation qui nous viennent de l’étranger. Les technologies de l’information sont en train de réinventer les modèles d’affaires de demain. Il va falloir aller plus loin car les disruptions technologiques vont réinventer les schémas de consommation des produits et services financiers».

Au niveau de BDO IT Consulting, l’on estime qu’à l’heure de la Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) et du Corporate Reporting Standard (CRS), où les autorités locales et internationales sont plus exigeantes sur les problématiques de mise en conformité et de diffusion d’information financière, les sociétés financières bancaires et non bancaires doivent mettre en place des infrastructures IT dignes de ce nom, notamment des progiciels métiers. Et Feizal Jownally, Partner, IT Governance and Consulting à BDO, de préciser que ce sera à l’avenir un élément crucial pour attirer les investisseurs étrangers. «Nous sommes dans un marché très global. Les investisseurs qui viennent à Maurice où ils font leurs dépôts chercheront à savoir quels sont les systèmes informatiques qu’utilisent les sociétés financières. Ils voudront également avoir l’assurance qu’il y aura une confidentialité absolue par rapport à leurs transactions. Imaginez un instant qu’un scandale de l’ampleur des Panama Papers touche Maurice. C’est la réputation de notre juridiction qui est en jeu», argue-t-il.

Dans les assurances, Quantum Insurance a innové en se lançant dans le segment de l’Insurtech. Une nouvelle façon de faire le métier des assurances qui s’est révélée payante car en proposant un service de souscription 100 % en ligne – ce qui implique le non-recours à des intermédiaires –, l’opérateur est en mesure de baisser de le montant de ses primesd’environ 15-20 % en moyenne. De plus, elle a de la marge pour apporter de la valeur ajoutée à ses produits. «La technologie étant de nature dynamique et évolutive, nous travaillons constamment sur des projets pour inclure les nouvelles fonctionnalités et garanties innovantes dont bénéficieront les clients. Hormis de souscrire à une police d’assurance en ligne, quelques mois après notre lancement, nous avons permis à nos clients de pouvoir entreprendre le renouvellement de leurs assurances en ligne à travers un espace personnel», souligne Devesh Biltoo, Chief Operations Officer de Quantum Insurance.

Le financement participatif est l’un des segments de la Fintech. Néanmoins, cette activité peine à décoller en raison de l’absence d’un cadre juridique. Lancée en mai 2016, Small Step Matters, une plateforme de crowdfunding social, organise des levées de fonds pour des projets philanthropiques. Le financement maximum par projet est de Rs 500 000. Entreprise à but non lucratif, elle identifie des projets et sollicite ensuite des dons auprès des bienfaiteurs. «Il n’y a pas de cadre juridique pour réglementer le crowdfunding social. Pour avoir le droit de lever des fonds, nous devons solliciter le Commissaire de police tous les trois mois afin d’avoir l’autorisation sous la Public Collections Act de 1965», déplore Céline Planel, Chairperson de Small Step Matters.

À l’échelle mondiale, ce sont les start-up qui tirent le marché de la Fintech. À Maurice, il y a peu d’entrepreneurs qui osent franchir le Rubicon. Investplace est l’un de ces projets astucieux qui s’est rapidement imposé. Opérationnelle depuis voilà un an, cette place de marché en ligne facilite la mise en relation des porteurs de projets, des investisseurs souhaitant avoir un pied à terre dans l’océan Indien et l’Afrique subsaharienne, et des experts ayant des compétences dans les opérations de fusion-acquisition.

Autre projet intéressant : MIPS. Cette plateforme d’e-payment est opérationnelle depuis plusieurs mois, mais ne sera lancée que la semaine prochaine. Cette start-up a été pensée par son fondateur et CEO, Sébastien Le Blanc. Elle démarre avec une équipe d’une quinzaine de salariés. La Mauritius Commercial Bank et la poste nationale sont partenaires dans ce projet ambitieux qui cible les PME souhaitant s’engager dans l’e-commerce, en leur offrant une plateforme sécurisée pour leurs transactions.