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PME: rassurer un secteur en perte de confiance

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PME: rassurer un secteur en perte de confiance | business-magazine.mu

Les mesures destinées aux petits et moyens entrepreneurs font partie de la première stratégie clé du Budget. Bien accueillies, elles devront toutefois se traduire rapidement dans les faits, au risque d’affaiblir davantage un secteur capital.

Pour faire entrer l’île Maurice dans une «nouvelle ère de développement», selon les vœux du gouvernement, le ministre des Finances, Pravind Jugnauth, entend exploiter le potentiel que recèle le secteur des petites et moyennes entreprises (PME). La première de ses stratégies clés consiste d’ailleurs à «favoriser l’émergence d’une vague d’entrepreneurs modernes». «An economy that is ripe for change and entering a new cycle requires a class of entrepreneurs that is equal to the challenge, and who can s쳮d in the most sophisticated of markets», souligne Pravind Jugnauth dans son discours budgétaire. Le secteur des PME, faut-il le rappeler, pèse 62% dans la création d’emplois et contribue à hauteur de 40 % au produit intérieur brut (PIB), selon les chiffres publiés par le Board of Investment.  

Parmi les facteurs qui ont entravé le développement du secteur des PME jusqu’ici, Phalraj Servansingh, Managing Director de la Small and Medium Enterprises Development Authority (SMEDA), mentionnait en novembre, dans une interview accordée à Business Magazine, un manque d’innovation de même que des lacunes au niveau des facilités d’accompagnement. Le MD de la SMEDA reconnaissait, en outre, que «le plus gros souci des PME est le financement». L’on pourrait y ajouter l’inefficacité de certaines initiatives relatives à la promotion des PME, la lourdeur des procédures administratives, des carences sur le plan de l’information et de la formation ainsi que le manque de coordination entre les parties prenantes, voire la difficulté d’accès aux marchés d’exportation. Or, le Budget 2016-2017 contient une série de mesures destinées à répondre aux besoins et attentes du secteur.

Le ministre des Finances a annoncé, tout d’abord, la suspension du paiement de trade fees pour les permis de Rs 5 000 ou moins sur une durée de trois ans. Cette mesure profitera aux nouveaux entrepreneurs comme aux 75 000 existants, à l’exception de ceux engagés dans des activités telles que les jeux de hasard, le commerce de boissons alcoolisées ou de cigarettes.

La deuxième mesure présentée concerne l’allègement des charges fiscales. De fait, le congé fiscal de huit ans sera étendu aux entreprises nouvellement créées par des particuliers ou des sociétés coopératives, si tant est qu’elles soient éligibles à ce plan et enregistrées auprès de la SMEDA. De plus, les entreprises existantes enregistrées auprès de la SMEDA dont le chiffre d’affaires s’élève à moins de Rs 10 millions et les activités les rendent éligibles à ce plan, bénéficieront, elles, d’un congé fiscal de quatre ans.

En troisième lieu, Pravind Jugnauth fait état de la mise sur pied d’un National SME Incubator Scheme allant de pair avec une allocation de Rs 50 millions. Le gouvernement entend, par cette démarche, offrir aux jeunes entrepreneurs le soutien et l’encadrement dont ils ont besoin. Les PME pourront profiter, en outre, de nouveaux parcs industriels. Un parc dédié à l’agrobusiness sera créé sur une base pilote à Highlands, sur une superficie de 100 arpents. Ont également été annoncées la construction de deux parcs industriels dédiés aux PME à Plaine Magnien et Vuillemin, de même que la transformation de la zone industrielle DBM, à Coromandel, en un SME industrial park moderne et intégré.

Les banques critiquées

S’agissant du SME Financing Scheme, les PME pourront continuer d’en bénéficier durant trois années de plus. Ce plan d’aide sera de surcroît étendu aux entrepreneurs individuels et le taux d’intérêt y afférent passera de 7,4 % à 6 %. Amar Deerpalsing, président de la Fédération des petites et moyennes entreprises (FPME), ne se montre pas très enthousiaste par rapport à cette mesure, faisant valoir que «même si elles donnent l’impression de jouer le jeu, les banques savent se réinventer pour reprendre ce à quoi elles ont consenti à travers des ‘service charges’ qui ne sont soumises à aucune régulation». Une situation que déplore Amar Deerpalsing, d’autant plus, dit-il, qu’il existe «un rapport décriant certaines de ces pratiques». Le président de la FPME est d’avis qu’«il est plus que temps d’y mettre de l’ordre».

Globalement, le président de la FPME affiche malgré tout la satisfaction quant aux mesures proposées. «Les PME ont enfin eu ce qu’elles méritent. Ce secteur a été négligé et sévèrement fragilisé depuis l’arrivée au pouvoir du présent gouvernement. L’économie avait perdu son dynamisme avec pour résultat un niveau de confiance au plus bas parmi les PME. Enfin, les mesures correctives tant attendues ont été prises en considération dans le cadre du Budget 2016-2017. Cela aura définitivement un impact positif sur le secteur des PME qui a un énorme potentiel de croissance», soutient Amar Deerpalsing. Il ne peut s’empêcher, néanmoins, d’émettre certaines réserves par rapport à la mise en application effective des mesures annoncées : «Nous espérons cependant que le ministre des Finances s’attellera, dans les plus brefs délais, à traduire dans la réalité les diverses mesures annoncées en faveur des PME».

La réintroduction du Leasing Equipment Modernisation Scheme est la sixième mesure de la Stratégie 1 du Budget. Elle vise à faciliter l’accès des PME au crédit-bail et leur permettra, par là même, d’accroître leur productivité grâce à de meilleures machines. Le gouvernement s’engage aussi à fournir des services d’affacturage aux petits entrepreneurs par le biais d’une ligne de crédit de Rs 100 millions qui sera créée à leur intention.

Bien accueillie, la huitième mesure de la Stratégie 1 concerne la fusion entre le NRF Equity Fund et le SME Partnership Fund qui aboutira à la mise en œuvre d’un SME Venture Capital Fund. Le ministre des Finances a assuré que Rs 150 millions seront injectées dans ce fonds pour qu’il atteigne un montant de Rs 500 millions.

De l’avis d’Amar Deerpalsing, l’enjeu que constituent les produits importés semble avoir été oublié par Pravind Jugnauth. Or, ces produits représentent une «concurrence déloyale» que les petits entrepreneurs locaux ne cessent de dénoncer, insiste le président de la FPME. «Très souvent, en l’absence de contrôle sur les produits importés, certains exportateurs en profitent pour faire du dumping commercial sur notre marché, ce qui cause un tort immense à l’industrie locale, au point que notre base industrielle s’est affaiblie avec un repli de 25 % du PIB à 18 % du PIB», explique notre interlocuteur. Et Amar Deerpalsing de conclure que «nos produits artisanaux sont délaissés au profit des produits importés ‘low cost’ fabriqués industriellement et portant le logo ‘Made in Mauritius’. En conséquence, les artisans locaux sont sérieusement menacés».

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