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Frédéric Narassiguin : «Optic Développement va renforcer sa présence dans l’océan Indien»

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Frédéric Narassiguin : «Optic Développement va renforcer sa présence dans l’océan Indien» | business-magazine.mu

À tout juste 40 ans, Frédéric Narassiguin vient de remporter le prestigieux Prix de l’Opticien de l’année 2016 décerné par le Syndicat des importateurs et distributeurs en optique lunetterie. Le PDG d’Optic Développement revient sur son parcours et jette un regard éclairé sur le marché de l’optique à La Réunion.

BUSINESSMAG. Vous revenez de Luxembourg où l’on vous a remis le Prix de l’Opticien de l’année. Que représente cette distinction pour vous ?

Recevoir ce prix a été une grande fierté, pour moi mais aussi pour le groupe Optic Développement et tous mes collaborateurs. Je pense notamment à mon adjointe, Isabelle Balbolia, qui me seconde et me conseille depuis tant d’années. C’est tout le travail d’expertise mené au sein de nos magasins qui a été ainsi récompensé et reconnu par nos pairs. Lorsque l’on m’a remis ce prix au Sénat, j’ai eu une pensée spéciale pour mon île que j’ai dû quitter pour les études à 18 ans, puisqu’il fallait bien aller se former en métropole à l’époque, mais que j’ai retrouvée avec bonheur ensuite. L’occasion m’était donnée de mettre en avant La Réunion, de prouver qu’ici aussi, on est capable d’innover, d’être vu et reconnu ! Je tiens à remercier les personnes qui m’ont toujours soutenu dans mes projets : mes parents sans qui je n’aurais pas pu devenir opticien et qui n’ont pas hésité à consentir à des sacrifices pour financer mes études, les familles Deleflie, Cazal et Padieu. J’ai aussi une pensée pour mon oncle Germain, aujourd’hui décédé.

BUSINESSMAG. Si l’on voulait résumer votre carrière professionnelle, on pourrait dire qu’elle est étroitement liée à Optique de Bourbon…

Oui, c’est Optique de Bourbon qui m’a donné ma chance et m’a vu et fait grandir dans le métier. J’ai décroché mon diplôme d’opticien lunetier à l’Institut et Centre d’Optométrie (l’ICO forme les opticiens depuis 1917) de Bures-sur-Yvette en 1998. Figurez-vous que c’est en cette même année que l’on me faisait signer un contrat à durée indéterminée pour travailler comme collaborateur dans le magasin de Saint-Paul, où j’étais entré comme stagiaire en 1997 quelque temps après mon baccalauréat.

Un an à peine après l’obtention de mon diplôme, en 1999, j’étais nommé directeur du magasin. Tout en ayant la responsabilité du magasin, en 2002, j’ai suivi une licence, puis une maîtrise de management et sciences de gestion à l’Institut d’Administration des Entreprises (IAE) de Saint-Denis. Pendant ce cursus à l’IAE, je suis devenu directeur adjoint de l’enseigne Optique de Bourbon, avant de passer un master 2 management des entreprises, toujours à l’IAE, et d’être nommé directeur d’Optique de Bourbon pour La Réunion et Mayotte.

BUSINESSMAG. Comment s’est passée l’implantation d’Optique de Bourbon sur le territoire réunionnais ?

L’enseigne représente une belle réussite dans le paysage de l’optique réunionnais avec une présence forte depuis 1981, date de l’ouverture d’un premier magasin au Port et de boutiques à Saint-Paul et Saint-Denis sous l’impulsion d’un groupe d’entrepreneurs venus du monde médical, dont Michel Deleflie (qui est aussi, soit dit en passant, le président-directeur général du groupe de santé Clinifutur, l’un des 10 premiers groupes d’hospitalisation privés français). En une vingtaine d’années, l’opticien est allé au plus près de la clientèle réunionnaise en ouvrant des points de vente à Saint-Joseph, Saint-André et Saint-Louis. En 2001, pour les 20 ans d’existence, avec l’ouverture des boutiques de Saint-Benoît et Sainte-Clotilde, nous comptions déjà 11 magasins et 50 collaborateurs. En 2006, soucieux de nous renouveler, nous avons lancé un nouveau concept architectural, baptisé «Soleil» et dont a bénéficié notre magasin de Saint-Leu, bâti selon ce concept novateur, tandis que nous entreprenions un vaste programme de modernisation des magasins existants.

BUSINESSMAG. Une modernisation qui s’est aussi traduite par un nouveau logo en 2014…

Oui, le logo d’Optique de Bourbon a été remasterisé, avec la fleur d’hibiscus pour marquer un autre élan, mais aussi réaffirmer notre attachement à La Réunion. Et il n’y a pas que son nom qui fait d’Optique de Bourbon une enseigne fière des valeurs de notre île.

Depuis quelques années déjà, Optique de Bourbon lance des campagnes de publicité pour mettre en avant les talents de La Réunion, notamment la jeunesse réunionnaise, qui dynamisent l’image d’une Réunion qui avance. C’était déjà le cas en 1991 avec les courses automobiles de Malik Unia qui sillonnait les routes de l’île avec nos couleurs. Aujourd’hui, les people qui véhiculent l’image de la marque Optique de Bourbon sont des chanteurs à l’instar de Missty, T Matt, Stéphanie Thazard, des personnalités publiques comme la présentatrice télé Katiana Castelnau ou encore l’humoriste Thierry Jardinot. Nous sommes, par ailleurs, partenaires de Miss Réunion depuis 2008 et, en 2010, Valérie Bègue (Miss Réunion et Miss France 2007) est devenue notre égérie. Toujours en 2010, nous avons lancé la première collection «péi» de lunettes, en partenariat avec L’Effet Péi, autre marque emblématique de La Réunion.

J’ajouterai qu’en dehors de cet ancrage profondément réunionnais, Optique de Bourbon a acquis un rayonnement régional quand, en 1991, l’enseigne a commencé à s’implanter à Mayotte.

BUSINESSMAG. Pour être tout à fait complet sur Optique de Bourbon, vous avez aussi lancé deux déclinaisons spécifiques. Dans quel but ?

En 2015, nous avons en effet créé le concept ODB Kids. Un magasin pour les enfants de 0 à 15 ans. Nous en comptons quatre : à Saint-Denis, Saint-Leu, Saint-Joseph et Saint-Paul (ces deux derniers ayant été ouverts cette année). Et cette année, nous avons ouvert deux grands espaces ODB Sports, au Port et à Saint-Paul, pour les sportifs qui seront guidés par des conseillers qualifiés et expérimentés, et surtout passionnés de sport, pour trouver les marques adaptées à leur pratique sportive : natation, vélo, sports automobiles…

Dans les deux cas, on raisonne en termes d’espaces dédiés pour équiper et conseiller des publics qui ont besoin d’une attention particulière : dans le cas des enfants, par exemple, pensez à la révolution que représente la présence permanente des écrans ; alors qu’il y a vingt ans, la question ne se posait pas encore de cette manière. Cette exposition dès le plus jeune âge nécessite aujourd’hui une prise en charge spécifique.

BUSINESSMAG. Depuis 2011, vous êtes le président d’Optic Développement. Quelle a été votre ambition en créant ce groupe ?

Optic Développement, c’est 178 collaborateurs, 32 points de vente (le 32e magasin est une enseigne Optique de Bourbon, située à Saint-Pierre), une croissance de 7 % entre 2014 et 2015. La tendance des premiers mois de cette année est à une légère croissance, à 2 %. Une dynamique commerciale tout de même satisfaisante qui est due, à mon avis, à la réactivité du groupe en termes de qualité de produits, de diversification et de recherche de la satisfaction clients. Je peux ainsi compter sur une équipe de vendeurs et de dirigeants à qui je fais entièrement confiance. Avec notre mode de management participatif, on raisonne de manière collective afin de donner aux collaborateurs tous les moyens pour développer leurs compétences.

Jusqu’en 2011, je ne m’occupais que d’Optique de Bourbon, avec les réussites que je viens d’évoquer. Le développement de l’enseigne m’a inspiré un projet plus global pour s’approcher au plus près des attentes des Réunionnais et leur proposer un plus large choix dans le domaine de l’optique, de l’audio et de la contactologie. C’est de cette envie de structurer un ensemble d’offres qu’est né le groupe, qui rassemble trois marques.

BUSINESSMAG. Dans quelle mesure ces trois marques sont-elles complémentaires ?

Comme les Réunionnais n’ont pas les mêmes demandes en matière d’optique, Optic Développement se positionne sur l’idée d’une segmentation du marché. Celle-ci s’est traduite par la présence de trois enseignes (une marque locale et deux franchises) qui développent trois politiques commerciales différentes.

Optique de Bourbon, pour résumer, c’est la vitrine premium du groupe. Nous y présentons des modèles haut de gamme et des marques de référence. On peut y trouver des marques de lunettes associées à une image de prestige (comme les lunettes que portait Daniel Craig dans le dernier James Bond).

La deuxième marque est la franchise Afflelou, qui a conquis depuis longtemps le public métropolitain et séduit les Réunionnais avec des concepts axés sur l’accessibilité et qui ont révolutionné le marché de l’optique, comme les offres Tchin Tchin (une deuxième paire de lunettes pour 1 euro de plus) ou Win Win (garantie à vie des lunettes, monture et verre, et changement gratuit des verres si la vue évolue dans les deux premières années).

Avec Optical Discount, enfin, l’accent est mis sur les prix remisés et la fidélisation du client. En souscrivant au club OD, le client pourra profiter de remises de -20 % à -50 % sur de grandes marques de lunettes toute l’année. Il n’aura certes pas les toutes dernières technologies ni les tout derniers modèles de lunettes, mais il aura accès à une large gamme de produits et grâce aux prix remisés, il pourra changer plus souvent de paires de lunettes si l’envie lui en prend.

BUSINESSMAG. Revenons sur l’acquisition de ces deux franchises. Dans quelles conditions cela s’est-il fait ?

Il me fallait adopter une stratégie pour élargir l’offre tout en considérant les différents critères qui poussent les clients à s’équiper en optique : choix, marques, prix... Je me suis mis dans la perspective de rechercher une véritable opportunité pour le marché local de l’optique. Je tiens à préciser que ces franchises ne se sont pas imposées de force à La Réunion. Au contraire, si elles ont pu s’installer ici, dès 2013, c’est parce que je les ai sollicitées en tenant compte de ce qu’elles pouvaient apporter comme dynamisme. Pour tout vous dire, Alain Afflelou représentait le seul choix possible pour moi, car nous partageons les mêmes valeurs de travail et d’innovation permanente.

Il m’avait d’ailleurs confié lors des négociations : «Vous qui connaissez bien le territoire, vous êtes le mieux placé pour devenir notre partenaire local». De son côté, Frédéric Poux, le président du directoire d’Afflelou, m’a fait confiance pour développer la carte Afflelou dans la zone océan Indien. Vous savez, par ailleurs, qu’Alain Afflelou a racheté l’enseigne Optical Discount en 2015. En 2014, Optic Développement avait repris les magasins Atol de La Réunion en les orientant vers l’enseigne Claro by Alain Afflelou, avant de les transformer en boutiques Optical Discount. Je précise, au passage, que l’on peut faire du discount tout en proposant un produit de qualité. Certes pas de qualité premium, mais de qualité convenable tout de même. L’un n’empêche pas l’autre.

BUSINESSMAG. Vous avez été le président du Syndicat des Opticiens de La Réunion pendant huit ans. Que retenez-vous de cette période ?

Sous ma présidence, j’ai impulsé deux innovations : la charte Opti Soins et la charte des 3 O (pour Ophtalmologiste, Orthoptiste et Opticien). Opti Soins visait à rassembler l’ensemble des acteurs de la santé visuelle pour convenir d’un code éthique reprenant les valeurs éthiques, valables à la fois pour les adhérents et les consommateurs. La charte des 3 O ambitionnait la mise en place d’un parcours de santé visuelle du patient en identifiant le rôle des différents intervenants, tout en rappelant l’essentiel, que le patient est libre de choisir son ophtalmologiste, son orthoptiste et son opticien.

BUSINESSMAG. Vous avez aussi milité pour la formation des jeunes…

C’est une de mes grandes satisfactions d’avoir pu concrétiser le projet de création d’une école d’optique à La Réunion ! L’embauche des jeunes réunionnais me paraît primordiale car à La Réunion aussi nous sommes capables. Si nous sommes fiers de nos racines réunionnaises, il faut faire en sorte de faire partie de cette dynamique qui investit et réinvestit au niveau local, notamment au niveau de la formation. En 2011, le Syndicat des Opticiens de La Réunion signait un accord-cadre avec l’État, la Région Réunion et le Pôle Emploi pour une formation post-baccalauréat en optique ouverte pour la période 2012-2017, pour le baccalauréat professionnel, le brevet de technicien supérieur et la licence d’opticien-lunetier. Au sein de mes magasins, j’emploie d’ailleurs des jeunes en alternance ou en contrat de professionnalisation. En grande majorité, ces jeunes finissent par décrocher un emploi au sein de nos structures. J’encourage aussi les cadres de mes magasins à se former pour devenir managers seniors.

BUSINESSMAG. En 2011, le Syndicat des Opticiens de La Réunion avait saisi l’Autorité de la concurrence pour contester la vente de lunettes par la Mutualité de La Réunion…

Plus précisément, nous avions saisi l’Autorité pour contester l’offre avec zéro euro de reste à charge proposée aux adhérents de la Mutualité de La Réunion. Nous estimions que cette offre portait préjudice à l’activité des opticiens indépendants. Il faut ajouter qu’en 2012, l’Autorité a statué sur un fait de marché et jugé que les pratiques de la Mutualité de La Réunion ne nous lésaient pas économiquement. Ceci étant, nous aurions souhaité que la Mutualité de La Réunion se conforme aux mêmes règles que nous autres, opticiens indépendants, en se déclarant ouvertement comme vendeur en commerce de détail et pas en tant que simple mutuelle de santé.

BUSINESSMAG. Quels sont les projets d’Optic Développement pour les prochains mois ?

Nous allons renforcer notre présence dans la zone océan Indien. À la fin de l’année, nous allons ouvrir deux magasins Afflelou, l’un à Maurice et l’autre à Mayotte.

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