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Madagascar – Climat des affaires: Le GEM contrel’application de l’Advance cargo declaration

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Madagascar - Climat des affaires: Le GEM contrel’application de l’Advance cargo declaration | business-magazine.mu

À peine le secteur privé sorti d’une longue léthargie consécutive à la crise politique de 2009 à 2013, le gouvernement fait face aux accusations du GEM qui dénonce les dysfonctionnements du régime fiscal dont l’application de l’Advance cargo declaration.

Il  fallait s’y attendre. Le Groupement des entreprises de Madagascar, GEM, a multiplié les communiqués dénonçant les dysfonctionnements du régime fiscal appliqué par le gouvernement. Les menées subversives de quelques agents de l’Administration fiscale ont été citées comme contraires aux règles déontologiques et d’éthiques liées à leurs fonctions.

Sans le dire, le GEM a évoqué, à demi-mot, «des rackets» alors que le secteur privé vient à peine de sortir d’une longue léthargie consécutive à la crise politique de 2009 à 2013. L’État s’en défend en évoquant les souhaits du Fonds monétaire international (FMI) de voir le taux de pression fiscale faire un bond significatif. Comme cela ne suffisait pas encore, voilà que l’État malgache instaure l’Advance cargo declaration (ACD) pour les activités relatives à l’import-export. Pour le GEM, présidé par NoroAndriamamonjiarison, ces dispositions nouvelles se distinguent par leurs incohérences, leurs contradictions et leur manque de transparence.

En quelques points, le GEM démonte les rouages du mécanisme. Sur le plan légal, cette plateforme affirme que «le fondement même de l’ACD, mesure de mise en œuvre du Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires, ratifiée par Madagascar, étant un membre de l’Organisation maritime internationale (OMI), est inexact. Après vérification auprès de l’OMI, le système ACD ne figure ni dans la partie A des règles obligatoires, ni dans la partie B relative aux recommandations laissées aux choix des signataires».

Redevance de 50 - 85 euros injustifiée

Sur le plan pratique, le GEM remarque que «les informations permettant d’identifier les marchandises en partance ou en provenance de Madagascar dans le cadre de la sécurisation des navires, de leurs cargaisons et des installations portuaires, objet de l’instauration de l’ACD, figurent déjà dans le bordereau de suivi mis en place depuis 2007 à Madagascar. Il n’est pas démontré que l’ACD apporte une valeur ajoutée supplémentaire par rapport aux services fournis par le bordereau de suivi cargaison qui font l’objet d’une redevance. L’Autorité portuaire maritime et fluvial, APMF, ne fournit aucune prestation de service public justifiant, en contrepartie, le paiement de redevance allant de 50 à 85 euros. Le paiement des redevances ACD ne repose sur aucune base réelle».

 Enfin, le GEM réfute les thèses avancées par les promoteurs de l’ACD, dont l’État malgache, selon lesquelles cette nouveauté ne génère aucune surcharge financière aux entreprises. Les compagnies maritimes attestent le contraire. Pour elles, la redevance ACD n’est pas une composante préexistante du fret maritime et constitue par conséquent une surcharge additionnelle qui sera facturée aux chargeurs importateurs et exportateurs. Des coûts additionnels estimés à 100 euros par container, dont 15 euros en frais de traitement. Ce qui est en totale contradiction avec les assurances données à plusieurs reprises par les autorités malgaches. Sur la durée, le GEM évalue à 10 millions de dollars par an la surcharge à supporter par l’application des redevances ACD.

Pour toutes ces raisons et bien d’autres, plusieurs organismes patronaux et des associations professionnelles ont décidé de rompre le dialogue public-privé, tout en demandant l’annulation pure et simple de ces dispositions contraignantes. En fait, cette forme de discussion n’a été que de pure forme depuis toujours. Par exemple, des représentants du secteur privé ont été consultés par la Commission des finances à l’Assemblée nationale pour émettre leur avis sur le Budget en préparation. Mais le projet de loi de finance avancé par le gouvernement, avec de mauvaises surprises dans le régime fiscal, a été adopté sans la moindre retouche par des députés qui n’ont pas pris la peine de lire le dossier qui a été préparé à leur intention.

Ambatovy temporairement exemptée des redevances ACD

Les effets néfastes de l’ACD n’ont pas tardé à se manifester. Des containers de nickel d’Ambatovy prêts à l’exportation ont été bloqués au port de Toamasina pendant des jours pour le refus de cette firme minière de se conformer aux nouvelles formalités. «Dans ces conditions, nous sommes obligés de prendre des mesures drastiques : la fermeture de la mine à Moramanga et de l’usine à Toamasina n’est plus à exclure», menace Louis Roland-Gosselin, vice-président en charge du développement durable d’Ambatovy. Selon lui, la société ne pouvait plus vivre au-delà d’une semaine.

Déjà secouée par la chute des cours du nickel ces derniers mois, voilà qu’Ambatovy fait face à un autre problème de taille, minant de l’intérieur ses comptes d’exploitation déjà fragilisés par les fluctuations qui lui sont défavorables des prix du nickel sur le marché international. Les responsables d’Ambatovy mettent en avant la Loi sur les grands investissements miniers, LGIM, le régime sous lequel cette multinationale s’est installée, pour éviter d’avaler les pilules amères de l’ACD. Face à une telle éventualité, la fermeture d’Ambatovy déboucherait sur la perte de 6 000 emplois directs, sans compter les conséquences sur des prestataires de services, des petites et moyennes entreprises locales, bien rémunérées.

L’État a fini par jeter du lest. Il a décidé d’exempter de façon temporaire Ambatovy des redevances ACD. Mais le ministre des Transports, du tourisme et de la météorologie, Ulrich Andriantiana, qui a qualifié de mauvaise foi l’attitude des dirigeants d’Ambatovy, a insisté sur le caractère temporaire, soit limité dans le temps, du sursis accordé à l’exploitant de nickel et de cobalt. En tout cas, ce bras de fer entre l’État et les opérateurs économiques va ternir davantage l’image d’attractivité de Madagascar en matière d’investissements étrangers, déjà handicapée par les autres coûts de facteurs comme l’eau et l’électricité, les télécommunications et l’éternelle lourdeur administrative. L’ambassade des États-Unis, dans ses pages Facebook, a affirmé «ne pas reconnaître l’ACD». Une prise de position qui a influencé la décision de l’État malgache. Un petit recul pour mieux sauter ?

Face à ce tollé général, Michel Becquevort, le vice-président de l’Associated transport and port management, ATPMS, l’organisation promotrice de l’ACD à Madagascar, a donné sa version des faits. Il a plutôt décliné les débats sur ce que l’État malgache va engranger. «Ce système devrait générer pour l’État 15 millions d’euros par an en fonction de la densité du trafic maritime», selon ses prévisions. De quoi permettre la réhabilitation des ports ou l’extension de celui de Toamasina, appelé à s’agrandir dans les prochaines années. Mais Michel Becquevort s’est montré moins loquace sur la part de sa compagnie dans ce contrat.