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Madagascar : Maintenir le cap de la réforme

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Madagascar : Maintenir le cap de la réforme | business-magazine.mu

Les autorités doivent initier des réformes structurelles et fiscales pour sortir le pays  du marasme économique. Les bailleurs de fonds observent en coulisse.

Les contours des relations de Madagascar avec les bailleurs de fonds commencent à se dessiner. Les décaissements des financements annoncés devraient intervenir en avril 2016, précise Coralie Gevers, représentante de la Banque mondiale à Madagascar. De nombreux observateurs s’attendaient qu’avec le retour à l’ordre constitutionnel, la Grande île allait être arrosée par un déluge d’euros et de dollars de la part de ses partenaires financiers. Pour l’instant, il n’en est rien.

Le ministre des Finances et du budget, Gervais Rakotoarimanana, a déclaré que le gouvernement devra aller jusqu’au bout des réformes qu’il a initiées. Une fermeté longtemps attendue après les tergiversations constatées sur la conduite des affaires nationales par Hery Rajaonarimampianina depuis son investiture à la tête du pays en janvier 2014. Le pays a perdu beaucoup de temps. Un exemple flagrant : les retouches à n’en plus finir au Programme national de développement censé être le cadre de travail avec les bailleurs de fonds.

Ainsi, Gervais Rakotoarimanana tente de rattraper le temps perdu et affiche sa détermination à aller de l’avant devant la presse et en présence des représentants du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et de la Banque africaine de Développement. Cette déclaration s’adresse aux poches de résistance dans les sociétés d’État en difficulté financière. Pour ne citer que le cas de la Jirama, société nationale d’eau et d’électricité, toujours déficitaire en dépit des subventions que l’État lui accorde. Durant la Transition, le Trésor public a déboursé pas moins de 200 milliards d’ariary pour la Jirama, sans pour autant qu’elle puisse sortir de sa situation financière critique. Qui plus est, les abonnés à travers l’île ont été pénalisés par de longues coupures d’électricité.

Vers une coupe des subventions

 Ces subventions sont considérées par les bailleurs de fonds comme des dépenses injustes et scandaleuses car elles ne profitent qu’à 15 % de la population. De fait, ils recommandent qu’elles soient réduites de façon graduelle. À terme, ces mesures vont se traduire par la hausse des tarifs au kilowatt. Pourtant, des syndicalistes de la Jirama ont dénoncé un système de production qui se fait au détriment de leur société, au profit des fournisseurs du secteur privé. Ils ont affirmé que 80 % de l’ensemble de la productivité est achetée à ces partenaires-prestataires de services, pour 1 000 ariary le kilowatt, pour être vendu à perte aux alentours à 360 ariary aux abonnés. Selon les textes en vigueur, les coûts de l’électricité devaient être évalués suivant trois paramètres bien définis :les fluctuations des cours de l’ariary par rapport au dollar au marché interbancaire de devises, les variations des cours du baril du pétrole sur les places boursières internationales et l’indice des prix à la consommation. Toutes les conditions ont été réunies depuis longtemps pour une révision à la hausse des tarifications de la Jirama, mais les dirigeants, surtout ceux de la Transition, ont appréhendé une révolte sociale. D’où leur décision d’augmenter les subventions massives à la Jirama. L’actuel gouvernement refuse d’expliquer à la population les sacrifices à endurer pour obtenir les mannes financières des bailleurs de fonds. Et lors de l’inauguration d’une centrale thermique au nord de la capitale, Hery Rajaoanarimampianina a encore laissé entendre l’éventualité d’une intervention de l’État pour ne pas condamner les consommateurs. «Le kilowatt revient à 0,26 euro pour être livré à 0,16 euro. Qui va combler le gap ?Nous allons trouver la solution», a-t-il clamé. Le gouvernement a eu tort de ne pas avouer à l’opinion publique que les bailleurs de fonds sont des banquiers soucieux de rentabiliser leurs placements financiers. Ils attendent des contreparties de la part des décideurs malgaches.

Autre écueil : le retard de l’adoption de la loi de finances rectificatives. Gervais Rakotoarimanana a énoncé de nouvelles dispositions pour améliorer le taux de pression fiscale. Un des points sur lesquels il a été demandé au gouvernement de consentir des efforts particuliers. Au total, $1,6 milliard sur les $4,7 milliards attendus pour le Programme national de développement est à la disposition de l’État malgache. À titre de comparaison, Marc Ravalomanana, à l’issue de la crise politique de 2002, a pu arracher $2,47 milliards de dollars à la sortie de la réunion des Amis de Madagascar à Paris. Il se présente désormais comme l’homme de confiance des investisseurs étrangers.