Une âme baroudeuse à l’engagement total

YEUX rieurs, débit de paroles rythmées, éclats de rire à peine contenus, Patricia Buisson-Hays-Narbonne est d’une spontanéité rafraîchissante qui se raconte sincèrement. «J’ai 42 ans, je suis mariée à Hubert et je suis l’heureuse maman de deux petits garçons : Victor, six ans, et Geoffroy, dix ans. Il paraît que je parle trop vite», lâche-t-elle, un brin gênée. «Ce n’est pas une de mes qualités», ajoutet-elle presque comme pour s’excuser. Elle aurait pu se targuer de son remarquable parcours mais ne s’en vante nullement. Assis en face d’elle dans une ambiance décontractée, nous nous fions aux apparences sans chercher à contrecarrer l’évidence. La jeune femme est d’une simplicité, d’une franchise si évidentes qu’il faudrait être mesquin pour y voir un quelconque déguisement ou faux-semblant. Petite, elle se voyait institutrice et se remémore encore les tendres souvenirs d’elle qui jouait à la maîtresse devant ses poupées et devant Frédéric, son frère de cinq ans son cadet. Mais une fois au lycée, elle se découvre l’âme aventureuse et voulait absolument partir découvrir le monde. Née à Bois Colombes, en région parisienne, elle est issue d’une famille assez multiculturelle : des origines allemandes du côté de son papa et espagnoles et polonaises du côté de sa maman. «Mon grand-père était polonais et il a fui son pays à l’époque de la guerre. En France, il a intégré la légion étrangère, il a rencontré ma grand-mère, et sont tous les deux partis fonder leur famille en Afrique du Nord. Ma mère a d’ailleurs grandi en Algérie et au Maroc jusqu’à l’âge de vingt ans, avant de revenir en France», raconte-t-elle. En parlant de sa maman, celle-ci, nous dit-elle, est sa source d’inspiration et un exemple de solidité. Considérée comme le roc de la maison, sa mère leur a inculqué d’importantes valeurs tout en insistant sur la tolérance et le respect. «Ma mère nous a appris que les choses ne sont pas construites pareil ; nous avons tous nos références et nos cultures. Elle a toujours travaillé et a fait naître en nous l’amour du travail bien fait depuis que nous sommes petits. Elle nous a toujours obligés à bien étudier. C’est quelqu’une à qui j’ai envie de ressembler», soutient-elle.

ENVIE D’AILLEURS

À mesure qu’elle grandissait, son envie d’ailleurs s’intensifiait. Le meilleur moyen, pour elle, de donner vie à ce désir était d’intégrer l’ESCE (École Supérieure du Commerce Extérieur) International Business School. Cela lui a permis de faire des stages à l’étranger pendant son cursus et à la fin de ses études, elle ne voulait que d’une chose : partir ! Mais il lui a fallu patienter encore quelques années. En 1998, elle est engagée chez Elf – elle y avait déjà suivi un stage pendant ses études – en tant que chef de secteur Réseau de stations-service. En 2001, elle est en charge avec son équipe de la politique des prix des stations-service en France. Tous les jours, elle définissait les prix des produits en sui-vant le cours du pétrole. Elle revient après sur le terrain en tant que Chef de région Cartes Carburants en 2005 et s’occupe des commerciaux qui, eux, vendaient des cartes Total aux professionnels. Elle fait cela pendant trois ans sur un tiers de la France et bougeait constamment. Puis, avec son mari, ils ont souhaité avoir un bébé et a donc demandé à revenir sur un travail plus sédentaire. Elle intègre alors le siège avec un poste au département finance ; sa tâche consistait à consolider les résultats de la filiale France, à définir le budget et la stratégie à long terme. Entre-temps, elle a son premier bébé et, en 2011, elle est propulsée au poste de directrice Marketing du Réseau et Cartes Carburants. Là, elle développe un nouveau programme de fidélité qui fidélise et récompense les clients dans les stations-service Total. Programme dont elle est particulièrement fière et qu’elle aurait bien aimé développer à Maurice. Ensuite son deuxième garçon est arrivé. Cela faisait déjà 15 ans qu’elle évoluait au sein du groupe et elle voulait absolument partir travailler à l’étranger. Avec le gestionnaire de carrière chez Total, ils arrivent à trouver quelque chose qui pouvait la satisfaire. «J’ai accepté le poste de directrice opérationnelle adjoint de la zone Méditerranée / océan Indien. J’ai pu me balader pendant deux ans sur dix pays, soit le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Érythrée, Madagascar, Mayotte, Maurice et La Réunion. C’était un très bon compromis pour moi car cela répondait à mes besoins de partir et de découvrir de nouvelles cultures. En revanche, ce n’était pas un bon compromis personnel car j’étais absente quasiment toutes les semaines et je ne voyais plus mes garçons.», dit-elle. Son rêve d’ailleurs se concrétisera cette année quand elle est choisie pour prendre la direction de Total Mauritius. Cette envie de voyager, nous avoue-t-elle, lui vient de sa famille. C’est un besoin qui ne s’explique pas ; une envie de découvrir autre chose. Et à Maurice, elle y trouve son compte : «Depuis que nous sommes arrivés, mon fils aîné m’a dit qu’il ne veut plus repartir. Nous nous imprégnons de la riche culture mauricienne.»

En aparté

Un trait de caractère

«Je suis une personne très engagée, et j’attends la même chose de mes collaborateurs. J’ai aussi besoin de transparence et d’honnêteté.»

Un pays marquant

«L’Érythrée. Je suis en admiration devant la résilience de ses habitants. L’Érythrée et l’Éthiopie viennent de signer un accord de paix qui met fin à des décennies sombres de guerre. Cela a apporté de l’espoir et un certain optimisme au sein des populations de ces deux pays.»

Un auteur

«Je bouquine surtout des polars. J’adore les livres de Fred Vargas. Ses histoires se passent toujours dans des recoins de la France. Elle a un personnage fictif qui est un vieux policier hors norme qui fait voir les choses différemment.»

Un genre cinématographique

«J’aime bien tout ce qui est dramatique même si cela me fait tout le temps pleurer. Mais en ce moment je suis très film d’action pour pouvoir les regarder avec mes garçons.»

Une philosophie

«J’essaie de vivre chaque instant comme si c’était le dernier. Chaque moment m’est précieux.»