Dépréciation du rand : lourdes pertes dans le textile en vue
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Depuis le début de l’année, le rand s’est déprécié de l’ordre de 12,96 % face à la roupie. Cette dégringolade de la monnaie sud-africaine se fait déjà sentir sur les entreprises mauriciennes qui exportent vers l’Afrique du Sud.
L’Afrique du Sud est un important partenaire commercial pour Maurice. A ce jour, elle constitue notre cinquième marché à l’exportation avec un montant de Rs 6,7 milliards en 2012 et notre cinquième plus gros acheteur avec des importations de Rs 10,53 milliards l’année dernière. L’affaiblissement du rand ne sera ainsi pas sans conséquence sur nos activités économiques.
Au 1er juillet, le rand s’échangeait à Rs 3,09 contre Rs 3,55 début janvier, soit une dépréciation de 12,96 % vis-à-vis de la roupie. « Le rand s’est déprécié, car l’Afrique du Sud fait aujourd’hui face à un problème structurel. Il a perdu 25 % face au dollar américain. Au fil des années, on a pu constater que le rand africain est une monnaie trop volatile. Pour se protéger, les exportateurs ont intérêt à libeller leurs produits en dollar américain qui est une monnaie beaucoup plus stable et profitable. Ce qui leur permettra d’éviter de lourdes pertes financières», analyse Feroz Dahoo, observateur économique.
Un avis que partage Ahmed Parkar, Managing Director de Star Knitwear, qui ajoute que cette dépréciation est due au difficile contexte socioéconomique auquel fait face le pays. « L’Afrique du Sud souffre d’un manque de visibilité au niveau de son économie. Le pays a ensuite essuyé une vague de grèves dans divers secteurs et depuis tout dernièrement, il y règne une instabilité politique.»
Perte de compétitivité
Que ce soit dans le tourisme ou le secteur manufacturier, l’Afrique du Sud est un important client pour les entreprises mauriciennes. Par exemple, l’exportation du coton en Afrique du Sud a rapporté des recettes de Rs 23 millions en 2012 contre Rs 690 000 en 2011. Les opérateurs du textile ressentent déjà les répercussions de la dépréciation du rand sur leurs activités. « Nous venons récemment de nous lancer dans l’exportation vers l’Afrique du Sud qui est considérée comme étant un marché à fort potentiel. L’Afrique du Sud contribue à environ 15 % de nos exportations», souligne Emmanuel Tsang Mang Kin, Chief Executive Officer de Tamak. Chez Star Knitwear, 40 % de ses exportations sont canalisées vers l’Afrique du Sud.
Cette situation pousse l’entreprise à imposer à l’acheteur sud-africain une charge additionnelle correspondant au manque à gagner sur la dépréciation du rand. « Comme on a coutume de dire, le malheur des uns fait le bonheur des autres. L’acheteur se tournera vers d’autres pays moins chers. On ne peut pas se permettre de perdre le marché sud-africain. Avec la crise de l’euro, le textile à Maurice est tributaire du marché africain», déplore Ahmed Parkar. Les pays concurrents qui profitent de la perte de compétitivité du textile mauricien sur l’Afrique du Sud sont le Japon ou encore le Bangladesh. Et Emmanuel Tsang Mang Kin de renchérir que « si la tendance se poursuit, nos exportations chuteront. »
Pour remonter la pente, Star Knitwear et Tamak diversifient leurs marchés. « A Star Knitwear, nous exportons depuis un certain temps nos produits vers d’autres pays africains. Mais ceux-ci n’ont pas le même ‘retail power’ que l’Afrique du Sud », explique Ahmed Parkar.
Finalement, ce sont les importateurs sud-africains qui sont les grands gagnants de cette dépréciation du rand, car ils sont en mesure d’imposer leurs tarifs et de choisir de nouveaux marchés à des tarifs inférieurs. Comme le souligne Feroz Dahoo, « la dévaluation du rand permettra de ‘booster’ les importations sud-africaines».