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Rawat vs l’État : les enjeux de l’arbitrage

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Rawat vs l’État : les enjeux de l’arbitrage | business-magazine.mu

Dawood Rawat abat sa dernière carte pour contester la nationalisation des actifs du Groupe BAI. Il a invoqué le traité d’investissement France-Maurice pour chercher un arbitrage.

Un milliard de dollars. C’est la somme en jeu dans l’arbitrage opposant l’ex-Chairman Emeritus du Groupe British American Investment (BAI), Dawood Rawat, à l’État mauricien. Cette procédure d’arbitrage a été rendue possible grâce au traité d’investissement bilatéral – Bilateral Investment Treaty (BIT) – liant Maurice à la France. Ce traité a pour but de protéger les intérêts des investisseurs français à Maurice et un arbitrage sous son invocation ne peut être refusé.

C’est en sa qualité de citoyen français – il a une double nationalité mauricienne et française – que Dawood Rawat a obtenu cet arbitrage. C’est la première fois que le gouvernement mauricien doit faire face à un arbitrage d’une telle envergure et que les dispositions du traité d’investissement France-Maurice sont activées.

Revenons sur l’affaire BAI. Le 2 avril, la Banque de Maurice révoquait la licence de la Bramer Banking Corporation, filiale du groupe BAI, car celle-ci avait un sérieux problème de liquidité. Ce sera ensuite au tour de la British American Insurance d’être éclaboussée. Selon les autorités, les fonds opérés par l’assureur, en particulier le Super Cash-Back Gold, s’apparenteraient à un Ponzi de grande envergure.

Agissant en sa qualité de conservateur, PricewaterhouseCoopers soulignait, dans son rapport, qu’au 31 décembre 2014, la valeur des actifs de l’assureur BAI était largement exagérée. Dans le même temps, ses passifs étaient sous-évalués. La firme signalait ainsi un trou de Rs 12 milliards dans les actifs du groupe.

Depuis, les différentes filiales du Groupe BAI ont été nationalisées. Pour obtenir réparation, Dawood Rawat a requis les services du cabinet français de Gaulle Fleurance & Associés pour entamer des démarches de dédommagement par voie d’arbitrage, insistant qu’il y a eu une appropriation illicite (misappropriation) de son empire par l’État mauricien, dont les intérêts sont représentés par le cabinet suisse LALIVE, basé à Genève.

Le jugement de l’arbitre sera final

La somme de $ 1 milliard réclamée par Dawood Rawat représenterait la valeur estimée du Groupe BAI avant son écroulement.

«Les investissements réalisés sur le territoire d’un des États contractants par Ies ressortissants, sociétés ou autres personnes morales de l’autre État ne peuvent faire l’objet d’expropriation que pour cause d’utilité publique», indique le document du BIT. L’État mauricien aura à prouver qu’il a agi dans l’intérêt public, fait ressortir un avocat et arbitre approché par le gouvernement pour assister le cabinet LALIVE dans la préparation du dossier.

Le traité stipule que les mesures d’expropriation, de nationalisation, de dépossession directe ou indirecte qui vont à l’encontre des investissements sur l’un des territoires ne doivent être ni discriminatoires, ni contraires à un engagement spécifique. Elles doivent donner lieu au paiement d’une juste indemnité dont le montant est égal à la valeur des actifs expropriés, nationalisés ou qui ont fait l’objet d’une dépossession quelconque, au jour de l’expropriation, de la nationalisation ou de la dépossession. Cette indemnité doit être déterminée d’un commun accord dans son montant et dans ses modalités de règlement préalablement à la date du transfert de propriété.

La signature du traité avec la France remonte au 22 mars 1973. Elle relève d’un «engagement énorme» et procure à l’investisseur français toute la protection requise pour un arbitrage, observe notre interlocuteur. «L’État dispose cependant pleinement du droit d’intervention et d’expropriation des investissements si les choses ont été faites de manière légale et non-discriminatoire et si des compensations ont été accordées aux parties impliquées», ajoute notre intervenant. Il ajoute que le plaignant, en l’occurrence Dawood Rawat, peut formuler une demande pour une compensation provisoire en attendant le jugement relatif à l’arbitrage.

Avant d’aller de l’avant avec cette procédure, les deux parties devront tomber d’accord sur le choix d’un arbitre et d’un lieu neutre pour la tenue de l’arbitrage. La Suisse et Singapour sont actuellement cités. Le jugement de l’arbitre sera final et ne pourra être contesté par aucune cour internationale. Les deux parties auront la possibilité de soutenir leurs arguments avec le début de l’arbitrage en 2016.

Une chose est cependant sûre : il n’y aura pas de grand gagnant dans cet arbitrage, avance notre interlocuteur. Pour cause, le recrutement des services de cabinets de renom comme de Gaulle Fleurance & Associés et LALIVE est coûteux. Cet arbitrage pourrait durer entre deux et trois ans car il est compliqué.

En cas de jugement défavorable...

En cas de jugement défavorable, l’État mauricien sera dans l’obligation de payer le montant indiqué pour honorer les termes du traité France-Maurice sous peine d’effaroucher les futurs investisseurs, souligne l’avocat. Il y va aussi des relations diplomatiques entre Maurice et la France. En cas de dédommagement, l’État devrait, selon toute probabilité, utiliser les fonds publics à moins d’opter pour la vente des actifs désormais nationalisés.

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