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Airbnb – Son effet multiplicateur sur le secteur informel

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Airbnb - Son effet multiplicateur sur le secteur informel | business-magazine.mu

Airbnb est un phénomène qui prend de l’ampleur à Maurice, sans pour autant que les instances régulatrices ni les opérateurs ne puissent en prendre la réelle mesure, et encore moins le réglementer. Pourtant, c’est un pur produit de l’économie actuelle basée sur le libre-échange et le partage. Indéniablement, il profite à l’économie locale à travers l’apport de devises étrangères. Ainsi, Airbnb a un effet multiplicateur surtout sur le secteur informel.

Arvind Bundhun, directeur de la Mauritius Tourism Promotion Authority (MTPA), explique que ce qui se passe à Maurice ne diverge pas de la tendance ailleurs, dans le monde. «La location de chambres, d’appartements ou de villas à des touristes ne date pas d’hier. Avec le développement de la technologie, l’émergence d’Airbnb a permis à nombre d’hôtes d’entrer dans un réseau mondial qui leur assure une visibilité jamais atteinte jusqu’ici. Il est évident que Maurice, destination touristique par excellence, ne saurait être en reste», commente-t-il.

Si le directeur de la MTPA est conscient du fait que l’essor des hébergements Airbnb inquiète les hôteliers, principalement touchés par cette concurrence, il est d’avis que c’est une évolution du secteur du tourisme qui ne peut être évitée. Premièrement, Airbnb participe à l’économie de partage, qui est désormais une tendance avec laquelle il faudra composer. Deuxièmement, le voyageur du 19e siècle n’est pas celui de la fin du 20e , qui venait en vacances pour la plage, le soleil et la mer. «C’est quelqu’un qui veut aller à la rencontre de l’habitant, de sa culture et de son quotidien», résume cet interlocuteur. Et de revenir sur les nouvelles tendances qui redéfinissent aussi le secteur : «Le tourisme ne peut évoluer dans un cadre privilégié, et nous devons accepter cela. Si les clients choisissent Airbnb sans doute pour le prix, ils le font aussi pour être indépendants et entre amis ou en famille. Vivre dans ce type de logement leur permet de mieux découvrir la vie à la mauricienne», enchaîne Arvind Bundhun. Il dit d’ailleurs noter que de plus en plus d’hôteliers encouragent leurs clients à sortir de l’hôtel et d’aller à la rencontre des locaux.

Pas un obstacle au secteur touristique

En avril 2019, quelque 4 800 logements étaient recensés sur le site d’hébergement Airbnb. Alors qu’aucune instance régulatrice locale ne pouvait chiffrer le nombre de logements listés, le ministère du Tourisme a pu avoir des données agrégées concernant Maurice Airbnb pour la période couvrant juillet 2018 à juillet 2019. Il y avait 5 600 hôtes actifs sur le site proposant des hébergements à Maurice. Selon cette même source, la durée moyenne d’un voyage pour lequel ce type d’hébergement est privilégié serait de 6,5 jours alors que quelque 74 800 touristes auront été accueillis par ces hôtes pendant cette période.

Le nombre de logements enregistrés sur le site Airbnb est en net contraste des chiffres officiellement communiqués. «La Tourism Authority n’a que 1 000 opérateurs référencés hors hôtels (résidences, guest houses, appartements, villas…), représentant environ 8 000 chambres», indique Arvind Bundhun, qui parle de menace pour l’image de l’industrie touristique locale en raison du manque de contrôle qualitatif et sécuritaire. «Tout en n’étant pas contre ce phénomène qui se justifie par la maturité de la destination, les hôteliers souhaitent que le secteur informel soit un concurrent loyal au niveau des normes et des taxes perçues mais aussi au niveau des prestations afin que l’image de Maurice ne soit pas écornée», souligne le directeur de la MTPA.

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Qui dit informel dit également revenus qui échappent à l’État, notamment les taxes qui ne sont pas perçues car les activités ne sont pas déclarées. L’économiste Arvind Nilmadhub est d’avis que l’informel, incluant Airbnb, ne peut être un obstacle au développement du secteur touristique. Au contraire, il estime qu’Airbnb est complémentaire au développement et au changement dans le secteur touristique : «Airbnb accroît la visibilité de notre île et permet d’attirer des touristes qui n’ont pas un gros budget. C’est moins coûteux pour eux mais ils ont aussi plus de flexibilité dans leur choix. Par exemple, ils peuvent habiter quelques jours à Grand-Baie et par la suite bouger vers Tamarin pour quelques jours de plus».

Revenant à l’impact sur l’économie mauricienne, celuici estime que plus de touristes venant à Maurice et choisissant des hébergements et des expériences Airbnb vont aussi amener à professionnaliser d’autres services tels que les guides touristiques ou encore développer des métiers pour faire découvrir d’autres facettes moins connues de Maurice. La réglementation reste néanmoins de mise, insiste Arvind Nilmadhub : «Je pense qu’il est important d’introduire une taxe sur Airbnb, particulièrement les recettes qu’il a réalisées à Maurice».

De toutes parts, la réglementation est réclamée. D’ailleurs, Arvind Bundhun indique que le nouveau ministre a été mis au courant de la situation. Il s’attend à ce qu’il y ait des mesures pour qu’Airbnb soit encadré et joue sur un pied d’égalité avec les hôteliers.

Kaz’alala : un succès d’une offre inspirée d’Airbnb

Quatre mois après l’ouverture de Kaz’alala, projet de Hosted Bed & Breakfast inspiré d’Airbnb, le succès est au rendez-vous pour Island Living. «Nous enregistrons de très bons résultats qui viennent nous conforter dans le choix que nous avons fait de développer le tourisme expérientiel», se réjouit Vincent Cavalot, Chief Experience Officer à Island Living. Il explique qu’Island Living avait délibérément fait le choix d’une formule qui s’inspire d’une tendance révélée par Airbnb pour répondre à un besoin. «La forte popularité de cette plateforme de vente est venue démontrer l’émergence d’un besoin nouveau : le touriste nouveau se tourne vers Airbnb parce qu’il recherche une expérience personnalisée ; à l’hôtel ‘standard’, il préfère la maison de l’habitant parce qu’il veut découvrir le lieu visité dans son authenticité, faire des rencontres, vivre comme une personne locale», ajoute-t-il. Vincent Cavalot indique que ces attentes ont été confirmées par plusieurs études et parle de celle réalisée par l’Online Tourism Agency auprès de 22 000 touristes issus de 29 marchés et les données compilées dans 180 millions de commentaires clients. «Elle révèle cette quête d’expériences et de lieux authentiques et préservés, mais aussi le souci de voyager ‘responsable’. Plus de 50 % des voyageurs interrogés (57 % chez les 18-25) choisissent leurs destinations en fonction de leur impact sur l’environnement et la communauté et 71 % des voyageurs indiquent que goûter la gastronomie locale est important pour eux pendant leur voyage», cite-t-il. «C’est dans cette perspective que nous avons restauré des maisons créoles qui racontent le passé de la localité. Mais Kaz’alala ne répond pas seule à cette attente ; c’est tout le domaine de Bel Ombre, avec sa forêt endémique, son musée de coquillages et ses balades historiques, qui s’offre comme une alternative au tourisme de plage», résume Vincent Cavalot.

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