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Textile : l’axe Maurice-Madagascar renforcé

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Textile : l’axe Maurice-Madagascar renforcé | business-magazine.mu

Les entreprises mauriciennes jouent un rôle majeur dans le développement de l’industrie du textile à Madagascar. La coopération entre Maurice et la Grande île est appelée à se renforcer.

Sonia Wear. C’est la dernière société à avoir exporté une partie de ses activités vers Madagascar. De plus en plus d’entreprises textiles mauriciennes étendent leurs activités vers la Grande île. Selon les derniers chiffres, 80 % des produits de textile exportés par Madagascar sont l’œuvre d’entreprises mauriciennes. Pour Lilowtee Rajmun, directrice de la Mauritius Export Association (MEXA), il s’agit d’une stratégie régionale établie entre Maurice et Madagascar : «Madagascar a besoin de Maurice et vice versa. Lors de sa récente visite à Maurice, le Premier ministre malgache, Jean Ravelonarivo, a fait un plaidoyer pour une coopération renforcée entre Maurice et Madagascar.» Une stratégie bénéfique, d’une part, à Madagascar «qui sait qu’elle a besoin de Maurice pour développer son économie, pour créer de l’emploi, pour être génératrice de revenus». Et d’autre part au textile mauricien, «qui se sert de Madagascar pour pérenniser la compétitivité ».

Les produits dits high-end (la gamme upper middle market) sont fabriqués à Maurice et ceux de catégorie low-end le sont à Madagascar. «Nos clients ont différentes gammes. Celles de produits qu’ils vont placer dans des ‘‘high exclusive shops’’ et d’autres dans des ‘‘common shops’’. Mais ces clients ne veulent plus travailler avec une quinzaine de pays pour fabriquer leurs différentes gammes de produits. Ils veulent concentrer la fabrication dans une seule destination», explique notre interlocutrice.

Pour Lilowtee Rajmun, si le textile mauricien souhaite demeurer compétitif, il n’a d’autre choix que de s’adapter aux exigences de ses clients : «Maurice est une petite île. Nous sommes loin des 250-300 unités de textile qu’arborent nos compétiteurs comme la Chine ou le Bangladesh.» Ce faisant, poursuit-elle, il se doit d’être le preferred manufacturer et d’accepter de fabriquer du high-end et du low-end. «C’est une des raisons qui ont incité le textile mauricien à exporter une partie de ses activités à Madagascar. Nous sommes obligés de jouer la carte régionale. C’est une façon d’être compétitif et stratégiquement placé sur le carnet d’adresses de nos clients», précise la directrice de la MEXA.

Le retour de l’AGOA

Bonne nouvelle pour le textile mauricien puisque l’African Growth and Opportunity Act (AGOA) signe son grand retour à Madagascar. Ce qui est synonyme du retour des investisseurs dans la Grande île. «L’AGOA va emmener beaucoup d’investissements dans le secteur textile à Madagascar», prévoit Lilowtee Rajmun. Avec la Chine qui coûte plus cher et les problèmes sociaux de Bangladesh, poursuit-elle, les investisseurs étrangers ont les yeux rivés vers l’Afrique : «Les clients américains attendent uniquement l’AGOA pour se tourner vers l’Afrique. Car avec l’AGOA, ils bénéficient d’un ‘‘duty-free’’ et d’un ‘’quota-free’’ qui leur donnent un avantage compétitif allant jusqu’à 40 % sur certains produits. Avec l’AGOA, Madagascar attirera des clients et ce sera bénéfique de facto pour Maurice.»

Hakim Fakira, Chief Executive Officer, Project Development and Financial Engineering Division de Socota Textile à Madagascar, abonde dans le même sens. Pour cet industriel, Madagascar représente une zone d’investissement attrayante. «En 2010, quand Madagascar avait perdu son éligibilité à l’AGOA, nous avons du jour au lendemain perdu 40 % de notre chiffre d’affaires. Cette année, notre croissance était limitée à 5 %», souligne-t-il.

Socota Textile a enregistré des croissances à deux chiffres ces cinq dernières années. «Pour ces croissances à deux chiffres, nous avons été limités au marché européen et à la SADC. Le retour de l’AGOA et la possibilité pour Madagascar de rentrer hors taxes en Australie et en Chine sont des potentiels qui me permettent de dire que nous avons la capacité de doubler notre chiffre d’affaires dans les cinq prochaines années», avance Hakim Fakira. Le groupe Socota est, dit-il, déjà en communication avec des clients qui «n’attendent que le renouvellement des accords pour les dix prochaines années pour reprendre les exportations vers les États-Unis».

Avec le retour de la Grande île dans le giron de l’AGOA, explique Lilowtee Rajmun, «la fabrication du tissu se fera à Maurice et le tissu sera exporté à Madagascar (garment making) pour faire le produit fini. Madagascar, avec 20 millions d’habitants et une croissance démographique de 3 %, dispose d’un bassin de main-d’œuvre». Cette formule a été adoptée par Socota Textile qui a exporté une partie de ses activités à Maurice avant de se retirer en 2008. «C’était vers la fin des années quatre-vingt. Nous étions venus accompagner le développement du textile à Maurice. C’était dans le cadre de ce qu’on appelait alors la deuxième phase de l’industrialisation», se souvient Hakim Fakira.

Socota Textile injecte alors un capital de plus de 30 millions d’euros (plus de Rs 1 milliard) à Maurice pour 450 emplois créés. «L’accompagnement du secteur du textile à Maurice consistait à mettre à la disposition des usines de confection, la création de tissus. Ce qui allait faire monter en gamme l’offre pouvant justifier l’augmentation des coûts à Maurice», explique Hakim Fakira. En 2008, avec le développement de Maurice et la migration de son économie vers d’autres secteurs, il n’y avait plus de raison de faire du textile : «Comme nous sommes un groupe régional, nous avons décidé de travailler sur les avantages compétitifs des deux pays. De ce fait, Maurice abrite nos quartiers généraux d’où partent tous nos investissements. Madagascar reste notre base de production.»

Une question reste entière : Madagascar ayant souffert de nombreuses années d’instabilité politique, n’est-il pas risqué d’y investir ? «Tous les pays en voie de développement comportent des risques supérieurs aux pays développés. Par contre, les possibilités sont immenses et les retours sur investissement justifient les risques», observe Hakim Fakira. Lilowtee Rajmun est du même avis. Selon elle, les compagnies mauriciennes se sont adaptées aux crises à Madagascar.

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