Type to search

Édito

Diversion

Share
Diversion | business-magazine.mu

Ne détournons pas les yeux. Nos enfants ne nous le pardonneront pas. Nous assistons depuis quelques années à une dégradation des mœurs politiques et des valeurs démocratiques dans le pays. À qui la faute ?

Il est facile de trouver un bouc émissaire. D’ailleurs, c’est devenu une pratique courante pour justifier les dérives. Aujourd’hui dans l’opposition, Navin Ramgoolam dénonce le système lorsqu’il est invité à réagir au mandat de perquisition émis contre trois journalistes du groupe La Sentinelle. «Je suis moi-même victime de ce système», déclare l’ancien Premier ministre.

Faut-il s’en émouvoir ? Quel crédit accorder aux paroles d’un politicien qui ne manquait pas non plus, du temps où il régnait sur l’Hôtel du gouvernement, de s’attaquer aux journalistes ?

Non, nous ne disons pas que les journalistes sont des êtres spéciaux, bien au contraire. Ce que nous réclamons, en revanche, c’est une égalité de traitement de la part des institutions. Nous savons que nous pouvons compter sur le judiciaire à ce sujet. Heureusement, d’ailleurs ! Par contre, nous ne pouvons pas en dire autant de certaines institutions jadis respectées et respectables.

Ces institutions dirigées par des hommes et des femmes à l’échine flexible sont à l’origine de l’état de confusion générale dans lequel se trouve la nation. Les signaux sont brouillés. La population a perdu ses repères. Pire, elle a perdu foi en bon nombre d’institutions car elles ont fini, à force de se laisser instrumentaliser par les pouvoirs successifs, par créer deux catégories de citoyens au sein de la République : ceux à qui on déroule le tapis rouge parce qu’ils sont bien connectés et ceux qui subissent parce qu’ils osent dire la vérité aux puissants. Les exemples sont légion.

Le récent recadrage public du vice-Premier ministre et ministre du Logement et des terres, Showkutally Soodhun par la citoyenne Nirmala Maruthamuthu est dans une grande mesure la conséquence d’un sentiment d’exaspération. Les signes ne trompent pas, à moins qu’on se soit complètement déconnecté de la réalité. Gageons que non, car si cela devait être le cas, il serait extrêmement difficile au pouvoir en place d’affronter la réalité sur le terrain lorsque le moment viendra. Certes, dans ce genre de situation, l’on cherche des exutoires. Tel a toujours été le cas et la presse s’est révélée la parfaite tête de Turc pour les dirigeants du pays. Nous y sommes habitués malgré d’occasionnelles tentatives (sincères ou pas ?) d’apaisement.

Face à de telles pratiques qui consistent à diviser et à détourner le regard des vrais enjeux, il est primordial pour la profession de garder son sang-froid, de maintenir la tête sur les épaules. Car, malgré toutes les accusations portées contre nous, oui contre nous, référence est ici faite à l’ensemble de la profession, nous demeurons un rempart contre les dérives totalitaires. Ce rôle de chien de garde, la presse devra continuer à l’assumer pleinement pour freiner l’effritement de certaines valeurs. Le meilleur moyen de s’acquitter efficacement de cette responsabilité est de rester concentré sur les faits.

Les autorités devront en faire autant, que ce soit dans l’affaire Yerrigadoo ou dans toute autre affaire portée à leur attention. C’est ainsi que fonctionnent les vraies démocraties. Le reste n’est que politique !