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Édito

L’invité surprise

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Le débat économique qui fait rage depuis plusieurs semaines entre le ministère des Finances, par l’entremise de sa Research Team, et la Banque de Maurice dans le sillage de l’interview de Rundheersing Bheenick à Business Magazine pourrait prendre un nouveau tournant avec le discours du Premier ministre, le Dr Navin Ramgoolam, lors des réunions annuelles de l’Association of African Central Banks, la semaine dernière.

Navin Ramgoolam s’est, en effet, invité au débat. Non pas pour arbitrer le bras de fer qui se joue entre la Banque centrale et le ministère des Finances à chaque rencontre du comité de politique monétaire, mais pour y ajouter d’autres thèmes de réflexion d’actualité économique.

Aux questions sur la croissance, le chômage, l’inflation, la lutte contre la pauvreté, les risques de dérapage au niveau de la balance des paiements, entre autres, le chef du gouvernement est venu ajouter un autre défi majeur qui, selon lui, guette de plus en plus les pays émergents : les risques d’une fuite de capitaux.

Alors que la croissance donne l’impression de ralentir dans les pays émergents, les investisseurs semblent, selon Navin Ramgoolam, commencer à s’interroger sur les perspectives à long terme dans ces pays. Au dire du Premier ministre, si une telle situation est associée à une reprise économique dans l’Ouest, nous courons le danger de voir un retournement au niveau de l’influx de capitaux vers les marchés émergents. Ce qui pourrait poser de sérieux soucis pour le continent africain, auquel nous appartenons bien évidemment. Le Premier ministre se charge d’ailleurs d’identifier les nouvelles sources d’inquiétude qui pourraient venir bouleverser les perspectives de croissance africaine.

Des points qui méritent certainement que l’on s’y attarde dans la conjoncture actuelle en attendant Godot, pour ne pas dire le fameux White Paper sur la réforme électorale.

Jusqu’ici, les pays émergents ont été les principaux moteurs de croissance en Afrique. Or, un ralentissement aura de lourdes répercussions sur les économies du continent. Tout comme un revirement dans les taux de change ne sera pas sans conséquence.

Le Premier ministre s’est montré concerné par la possibilité d’un « general shift in risk aversion and flows of funds back to the West leading to an abrupt change in liquidity in Africa and risks of financial problems being revealed, or paradoxically and the danger of investors looking for the next hot market and money flowing into Africa pushing up exchange rates and asset prices and thereby causing distortions… »

Dans les deux cas, Navin Ramgoolam est d’avis qu’il est impératif d’avoir la stabilité financière de même que des structures solides sur le plan de la réglementation pour s’assurer de la durabilité de la croissance en Afrique.

Cette prise de position du chef du gouvernement sur la stabilité financière, qui ressemble étrangement à celle de la Banque de Maurice, ne manquera pas d’alimenter les débats dans les chaumières. D’autant plus que Navin Ramgoolam ne manque pas de féliciter les Gouverneurs de Banques centrales pour leur contribution à une plus grande stabilité des prix, à l’amélioration de la gestion des taux de change et pour leur rôle dans la création d’un environnement dynamique et sain favorisant une croissance forte et inclusive.

Un succès que le Premier ministre attribue à un «greater freedom from political intervention». Cette phrase de Navin Ramgoolam devait d’ailleurs être suivie d’une pique lancée à l’égard du ministre des Finances, Xavier Luc Duval, et du Gouverneur de la Banque de Maurice, Rundheersing Bheenick, tous deux réunis pour l’occasion bien que le premier nommé ait joué un rôle très effacé en la circonstance.

À travers ce discours, Navin Ramgoolam montre qu’il s’intéresse également aux défis économiques du moment. Cela aurait été plus rassurant s’il pouvait user de son charme de « rassembleur » pour essayer de trouver le juste équilibre entre les positions diamétralement opposées de la Banque de Maurice et du Trésor public sur plusieurs questions économiques alors que les perspectives de croissance ne cessent de s’assombrir. Car aussi longtemps que le pays va se montrer hésitant et désuni sur la voie à prendre pour remonter la pente et créer de la richesse, nous allons continuer à revoir à la baisse nos prévisions. Comme cela a été le cas récemment pour les arrivées touristiques.

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