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Coup de frein à la hausse de la consommation

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Coup de frein à la hausse de la consommation | business-magazine.mu

Véritable moteur de croissance, la consommation des biens et services n’a pas vacillé ces dernières années. Au contraire, elle affiche une hausse constante, bien qu’elle se soit modérée durant les années de crise économique. En 2008, la consommation avait crû de 6,7 %. Depuis 2009, elle a crû à des taux inférieurs à 3 % (Voir tableau).

« Il se pourrait qu’il y ait une baisse dans certains secteurs comme l’alimentaire, mais les gens continuent de consommer, notamment les gadgets technologiques et les tablettes tactiles. La tendance observée est que les gens dépensent moins sur les produits alimentaires, mais plus sur les loisirs qui incluent aussi les jeux de hasard et la technologie », observe l’économiste Eric Ng. Nicolas Merven, Chief Operating Officer d’IBL Retail (Groupe Winners), abonde dans le même sens. « Le budget alimentaire est sous pression. Il est affecté par de nouvelles dépenses comme les téléphones portables, l’Internet, celles sur le fastfood, les loisirs et les jeux de hasard.»

Changement de tactique

Pour tenter de contourner la pression sur le budget alimentaire, les importateurs/distributeurs doivent changer de tactique. Ainsi, chez Innodis, on s’adapte aux nouvelles tendances sur le marché. « Nous avons introduit des produits positionnés différemment, c’est-à-dire avec un niveau inférieur en termes de rapport qualité-prix. Cela nous permet de toucher un maximum de clients, même en cette période économique difficile… Aujourd’hui, le fait d’avoir le plus important réseau de distribution, les meilleures infrastructures et la plus grosse flotte de véhicules ne sont plus des atouts suffisants. Ce sont les ‘basics’ du business. La bataille commerciale ne sera pas forcément gagnée par les plus grosses entreprises, mais par celles qui sauront s’adapter par rapport aux changements du marché», souligne Sonny Wong, Senior Manager d’Innodis.

Plusieurs facteurs impactent sur la consommation et le pouvoir d’achat des Mauriciens, à commencer par le moral du consommateur, mais aussi la politique monétaire. Ainsi, la dépréciation de la roupie affecte la consommation en rendant plus chers les produits importés. Il faut savoir que 75 % des produits sur les rayons des supermarchés locaux sont importés. Innodis est l’un des poids lourds de l’alimentaire important plus de 60 % de nos besoins. Du côté de Winners, pour contrecarrer la hausse de prix des produits à l’importation, on importe de plus en plus directement des fournisseurs pour aider à maintenir les prix des produits importés à un niveau raisonnable, explique Nicolas Merven.

À cause de notre sur-dépendance des importations, affirme Eric Ng, le pays a besoin d’une politique monétaire prudente. « Avec le ‘pass through effet’, dès que la roupie se déprécie, il y a une répercussion rapide sur les prix des produits de consommation », analyse l’économiste. Sonny Wong confirme : « Depuis quelque temps, la roupie se déprécie face à l’euro et au dollar. Automatiquement, les prix à l’importation augmentent. »

Par contre, dans une certaine mesure, l’appréciation « relative » de la roupie ces deux dernières années a quelque peu permis de maintenir le rythme de la consommation, précise Eric Ng. Nicolas Merven est du même avis : la roupie que l’on dit forte est bonne pour les prix, dit-il, puisqu’elle génère une inflation faible. Si la roupie se dévalue, l’inflation augmente et pénalise le consommateur.

   Sonny      Eric      Nicolas

À cet égard, Eric Ng soutient qu’on ne peut déprécier délibérément la roupie. « Nous importons beaucoup et nous devons avoir une roupie stable. Quand la roupie est stable, cela rend nos importations compétitives. » Ainsi, selon lui, il ne fait pas de doute que la politique de la Banque de Maurice a contribué à protéger le consommateur : « La Banque mondiale doit voir l’intérêt national et pas les intérêts sectoriels. Le fait que le Gouverneur soit contre la baisse du taux d’intérêt démontre qu’il joue son rôle de chien de garde contre l’inflation. Il résiste aux lobbys du secteur privé qui, lui, ne s’inquiète pas de l’inflation. »

Pour Eric Ng, il est important que les opérateurs privés comprennent dans quelle mesure une baisse de l’inflation est importante pour leur business, « qui contribue à baisser les coûts de production et à rendre les produits et services plus compétitifs ». L’économiste ajoute que la croissance non inflationniste est ce à quoi nous devons aspirer. « La croissance inflationniste n’existe pas. Avec l’inflation, la croissance ne vaut pas la peine », argue-t-il. 

Feel good factor avec le PRB

\Pour cette fin d’année, certains observateurs estiment qu’il est probable que les Mauriciens consomment davantage. La conjoncture est, en effet, propice à la consommation, avec les mesures de détaxe sur certains produits annoncées dans le Budget, le Feel good factor déclenché avec le paiement du PRB en janvier 2013 et l’inflation en baisse. Ce regain d’activité dans la consommation pourrait aussi être dopé du fait que le pouvoir d’achat des Mauriciens ne s’est pas détérioré cette année, estime Eric Ng. « Généralement, les Mauriciens n’ont pas trop souffert en termes de pouvoir d’achat car l’inflation a reculé », ajoute-t-il.

Nicolas Merven est, lui, très optimiste quant à une augmentation des ventes de fin d’année. « Les Mauriciens ont été très prudents ces derniers mois. Ils doivent pouvoir lâcher la ceinture en cette fin d’année. Les prix ne devraient pas être un problème pour les prochaines semaines sauf en cas de calamités naturelles. Le PRB et les augmentations salariales de janvier 2013 vont venir soulager le budget familial et, par conséquent, faciliter la consommation des ménages. »

Par contre, Sonny Wong tempère. Il estime qu’il ne faut pas s’attendre à une demande exceptionnelle. « Nous étions habitués à des ventes de fin d’année formidables avant la crise mais depuis 2010, le Mauricien a changé ses habitudes d’achat. »

En revanche, pour 2013, la situation pourrait évoluer différemment. Et Eric Ng de souligner que: « Le pouvoir d’achat risque d’être laminé par l’inflation ». Une prévision qui risque de se matérialiser quand on sait que la Food and Agricultural Organisation craint une hausse du prix des commodités. Il faudra aussi compter avec une hausse du coût du fret et des matières premières, sans oublier une augmentation du prix de l’essence.

Rs 255 milliards en 2012

Les dépenses des ménages devraient atteindre, cette année, Rs 255 milliards. Elles étaient de Rs 237,1 milliards en 2011, Rs 220,3 milliards en 2010 et Rs 208,9 milliards en 2009.

Au détriment de l’épargne

Si la consommation est un relais déterminant dans la croissance, il faut souligner que malgré un contexte de crise économique, elle tend à être préférée à l’épargne. Ainsi, le taux d’épargne est en baisse depuis ces dernières années, il atteindra 14,6 % cette année, contre 15 % en 2010. « On épargne ce qu’on ne consomme pas. Une hausse de la consommation entraîne une baisse de l’épargne par rapport aux revenus. Avec la hausse des prix, les consommateurs puisent dans leur épargne pour pouvoir maintenir leur consommation », souligne Eric Ng.
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