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Politique monétaire: divergences autour du statu quo

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Politique monétaire: divergences autour du statu quo | business-magazine.mu

Le marché ne s’est pas trompé cette fois-ci. à l’issue de la dernière  réunion du comité de politique, la décision a été prise de maintenir  le taux repo à 4,65 %. Le Gouverneur de la Banque de Maurice,  qui était en faveur d’un tour de vis monétaire, a été une nouvelle  fois mis en minorité.

Une fois n’est pas coutume, c’est avec presque deux heures de retard que le rapport du comité de politique monétaire a été rendu public, lundi soir. La raison évoquée, les débats ont été plus poussés notamment sur la situation dans le tourisme sans compter les profondes divergences au sein du comité sur la marche à suivre.   

Pour ne pas déroger à la tradition, les faucons regroupés autour du Gouverneur de la Banque de Maurice, Rundheersing Bheenick, ont, une nouvelle fois, insisté sur la nécessité de normaliser les taux pour contenir les risques d’une poussée inflationniste. Mais, au final, c’est le maintien qui l’a emporté avec pour résultat, le Gouverneur de la BoM se retrouvant en minorité pour la troisième fois consécutive depuis la reconstitution du comité de politique monétaire en début d’année. Une situation qui semble, toutefois, ne pas le déranger outre mesure.

D’ailleurs, Rundheersing Bheenick se félicite de l’émergence d’une plus grande convergence au sein du comité de politique monétaire. Car, dit-il, il y a désormais deux écoles de pensée au sein du comité contre plusieurs lors de la réunion précédente. La preuve, avec la demande d’un «présentateur» pour une nouvelle baisse du taux directeur de 15 points de base n’ayant pas été retenue.

Selon l’économiste ChandanJankee, la décision du CPM de ne pas toucher au Repo Rate indique que le focus a changé, du moins pour cette réunion, passant de la politique monétaire au Budget.

Une analyse que confirme l’économiste Pierre Dinan. Il y a des signes d’un début de bourgeonnement dans l’économie globale, mais la situation demeure fragile. En revanche, les risques de pressions inflationnistes se sont atténués. « C’est pour cette raison que je n’étais pas d’accord pour augmenter le taux. Je n’ai pas opté pour une baisse non plus car nous ne sommes pas certains de l’effet de transmission», a expliqué le membre du CPM. Il est d’avis que dans la conjoncture actuelle le statu quo est la meilleure décision en attendant de voir plus clair dans les nouvelles tendances qui se dessinent.

Une décision attendue

Contrairement à la réunion de juin qui avait vu une baisse surprise du taux directeur de 25 points de base, la décision de cette semaine était largement attendue par le marché. Dans un sondage de l’agence de presse Reuters, la semaine dernière, les analystes locaux et étrangers étaient unanimes à anticiper la posture du CPM.

Jacques Nel, économiste à NKC Independent Economists, un cabinet sud-africain se spécialisant dans l’analyse des pays africains, devait d’ailleurs expliquer sa prévision en faveur d’un maintien par le recul de l’inflation au mois d’août à 3,5 %. Il s’attendait à un impact de la tendance baissière de l’inflation sur les autorités monétaires.

Tandis que le CPM estime que les risques à moyen terme proviendraient des développements en matière salariale, Jacques Nel dit, pour sa part, ne pas s’attendre à des pressions inflationnistes émanant de l’économie locale. Toutefois, il n’écarte pas la possibilité que les changements au niveau de la liquidité globale puissent impacter sur l’inflation importée à travers des répercussions sur la roupie.

Pour expliquer l’analyse de la Banque centrale selon laquelle l’inflation en glissement annuel (year-on-year) devrait se situer dans la fourchette de 4,5 % à 4,9 % d’ici à décembre, Vikram Punchoo, Head of Statistics à la BoM, prend pour appui l’impact des mesures budgétaires, notamment la hausse de prix sur l’indice de prix à la consommation. Il n’y a qu’à regarder la tendance depuis 2011 pour s’en rendre compte, a-t-il déclaré à Business Magazine. Avec la décision annoncée du ministère des Finances de réduire davantage le déficit budgétaire, voire d’atteindre un surplus dans quelques années, le Budget 2014 devrait maintenir le cap s’agissant de la fiscalité. Rundheersing Bheenick souligne que le CPM a cherché à en savoir plus sur l’impact du Budget sur l’inflation auprès du Secrétaire financier, Ali Mansoor, à l’issue de sa présentation, mais celui-ci n’a pas voulu s’engager.

En même temps, ces nouvelles prévisions de la Banque centrale sur l’inflation sont en baisse par rapport aux prévisions de juin 2013. Une décision qui s’explique, selon RundheersingBheenick, par le fait que, contre toute attente, l’inflation s’est très bien comportée (well-behaved) durant ces derniers temps. Cela dit, il maintient que le comité de politique monétaire doit prendre des mesures prudentielles car les risques d’instabilité financière sont bien réels. Il en veut pour preuve le « déséquilibre» provoqué par la politique monétaire accommodante adoptée depuis 2011.

Réponse du berger à la bergère

« Avec le retour sur l’épargne en territoire négatif, le taux a chuté constamment passant d’un niveau de 25-26 % à 14,2 % actuellement. Il faut aussi aller voir le niveau d’endettement des compagnies locales et la progression des créances douteuses», fait-il ressortir. Le creusement du déficit de la balance commerciale est une autre source d’inquiétude pour la Banque centrale.

Au lieu d’inciter les entreprises à assainir leurs bilans, la baisse des taux d’intérêt n’a fait que les encourager à s’endetter davantage, note le Gouverneur de la BoM. Avec une capacité réduite du secteur privé à investir, Rundheersing Bheenick trouve que c’est le moment idéal pour le secteur public de prendre le relais en jetant les bases d’une croissance soutenue.

Comme pour répondre à l’argument du ministre des Finances, Xavier Duval, l’année dernière, selon lequel la politique monétaire avait coûté environ un point de croissance au pays, la Banque centrale réplique par la voix du First Deputy Governor, Yandraduth Googoolye que si les projets qui ont été renvoyés avaient été mis en chantier, le pays aurait pu réaliser une croissance de 3,3 %, voire plus cette année.

Une déclaration qui donne la possibilité à Rundheersing Bheenick de réitérer sa position que la solution aux problèmes structurels du pays ne réside pas dans la politique monétaire.

Bien que la BoM aitsuivi les pas de Statistics Mauritius en révisant à la baisseses projections de croissance de 3,2-3,7 % à 3,1-3,5 %, le Gouverneur de la BoM note quel’économiemauricienne «se défend très bien». Il trouve encourageant les réservationsdans le tourismeet les perspectives dans les secteurs du Seafood et de la manufacture qui, selon lui, devrait permettre à l’économie de se rattraper sur la mauvaise performance du premier et deuxième trimestre. Rundheersing Bheenick dit également constater « des signes de croissance ailleurs. »

Le Repo Rate inchangé en 16 rencontres

Sur les trente réunions du comité de politique monétaire pour fixer les taux d’intérêt, le taux directeur a été relevé en quatre occasions. Le CPM a décidé d’une baisse en dix rencontres et a laissé les taux inchangés en seize occasions.
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