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Politique monétaire: la croissance l’emporte sur l’inflation

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Consommation: la croissance stagne | business-magazine.mu

En dépit des craintes exprimées par le Gouverneur de la Banque de Maurice sur l’inflation et le niveau inquiétant de l’excès de liquidités, le comité de politique monétaire a voté à une majorité en faveur du maintien du taux repo à 4,65 % à l’issue de sa dernière réunion.

Le comité de politique monétaire n’arrive toujours pas à se mettre d’accord sur la voie à prendre dans la présente conjoncture économique. Pour cause, la première réunion de l’année 2014 qui s’est tenue, lundi, a été une nouvelle fois marquée par de profondes divergences entre ceux qui militent pour un tour de vis monétaire et ceux qui « ne veulent pas mettre en péril la reprise économique en cours ». Au final, le taux directeur est resté inchangé à 4,65 %.

Pression sur la roupie

Cette décision du comité de politique monétaire était quelque peu attendue comme en témoigne un sondage effectué auprès d’analystes locaux et étrangers par l’agence de presse financière Thomson Reuters, la semaine dernière. La majorité des sondés voyait venir le statu quo afin justement de permettre à la reprise de commencer à s’enraciner étant donné que l’inflation est sous contrôle.

Jacques Nel, un économiste travaillant pour le compte d’un cabinet basé en Afrique du Sud, était de ceux qui anticipaient un maintien du taux directeur. Il en donne d’ailleurs les raisons. D’abord, dit-il, l’inflation s’est révélée être plus faible que prévu en 2013 à 3,5 % grâce principalement à des prix moins élevés des denrées alimentaires et du carburant. La force de la roupie face au dollar américain durant l’année écoulée a aussi pesé dans la balance.

Toutefois, il entrevoit des pressions tendant vers une dépréciation de la roupie vis-à-vis du dollar dans les mois à venir à cause du déficit du compte courant, mais aussi en raison des effets du US tapering sur le dollar vis-à-vis de l’euro qui, selon Jacques Nel, ne manquera pas d’avoir un impact sur le taux de change de la roupie.

This will, in turn, have an effect on import prices. In addition, the uncertainty with regards to emerging market currencies is another source of downside (depreciation) risk on a liquid currency such as the rupee. Consequently, a continuation of inflationary pressures from domestic sources (particularly wage hikes), and the unpredictable external environment which is still a salient source of upside inflation risk, should prevent monetary authorities from pursuing an expansionary monetary policy. Considering that the policy rate was only 50 bps above the y-o-y inflation rate at the end of December, the fear of negative real interest rates is further incentive not to decrease the policy rate.  In turn, while economic growth is expected to pick up gradually over the medium term, a rate increase is also unlikely due to recent lacklustre growth performance,” analyse Jacques Nel.

D’autres économistes à l’instar d’Eric Ng s’attendaient également à ce qu’une majorité des membres du comité décide de garder le taux directeur inchangé. Cela bien qu’il était en faveur d’une hausse et qu’il estime que les investisseurs anticipaient également un relèvement des taux d’intérêt comme le démontre le rendement sur les obligations de l’État dans le cadre des emprunts à long terme. Ceux-ci ont crû lors des dernières adjudications.

Rundheersing Bheenick, le Gouverneur de la Banque de Maurice, a également plaidé en faveur d’une augmentation du Repo Rate lors de la réunion de lundi. Cependant, il s’est retrouvé à nouveau en minorité. Ce qui ne l’a pas empêché de rappeler l’objectif premier de la Banque centrale qui est « de maintenir la stabilité des prix et de promouvoir un développement économique ordonné et équilibré ». Selon lui, il n’y a pas d’opposition entre la croissance et l’inflation. C’est un faux débat, insiste-t-il.

« Notre potentiel de croissance n’est plus ce qu’il était auparavant. Il ne le sera pas tant qu’il n’y aura pas de réformes structurelles. Et sans ces réformes, notre croissance potentielle se situe autour de 4 % », explique Rundheersing Bheenick. De son point de vue, la solution n’est certainement pas monétaire. Il pense que les efforts d’ajustement doivent être consentis ailleurs dans des secteurs qui n’ont rien à voir avec la politique monétaire.

Une divergence structurelle

Un avis qui n’est pas partagé par une grande majorité des membres du comité de politique monétaire où la divergence qui s’est installée depuis l’année dernière « est devenue structurelle », dixit Rundheersing Bheenick. D’où d’ailleurs la posture adoptée par cette même majorité face aux demandes répétées de la Banque centrale de relever le taux directeur.

Selon le Gouverneur de la BoM, il y a actuellement une intensification des pressions inflationnistes. Une situation qui est visible à travers l’inflation sous-jacente et qu’il faut à tout prix combattre. Or, le ministère des Finances et la Banque centrale ne sont pas encore parvenus à définir un taux d’inflation acceptable. Le niveau actuel, qui est de 4 % pour l’inflation en glissement annuel (year-on-year inflation), est élevé par rapport aux objectifs retenus (3 %) par les chefs d’État des pays membres de la SADC et de l’Union africaine, souligne Rundheersing Bheenick.

Le Gouverneur de la BoM identifie également une autre source d’instabilité qui ronge l’économie mauricienne et qui justifie, selon lui, un tour de vis monétaire. Il s’agit de la baisse continue du taux d’épargne. Un phénomène qui non seulement augmente la vulnérabilité de l’économie mauricienne, mais qui l’expose aussi à des chocs externes concernant la volatilité des flux de capitaux.

« Pour financer le déficit de notre balance commerciale, nous faisons appel aux financements extérieurs. Ces financements vont se renchérir et vont devenir plus difficile à trouver. Nous ne pouvons pas dépendre pendant trop longtemps du bon vouloir des étrangers pour combler le déficit. C’est l’une des raisons pourquoi certains au sein du CPM ont voulu arrêter le déclin de l’épargne. Pour renverser la vapeur, nous devons procéder à une augmentation du Key Repo Rate et, en même temps, prévenir un exode si jamais la volatilité qui a saisi les marchés comme l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud atteignait nos côtes. Ce n’est pas le cas, mais si cela devait arriver nous allons connaître des difficultés avec un taux d’épargne aussi bas », fait-il ressortir.

Qui plus est, Rundheersing Bheenick note qu’avec l’érosion du taux d’épargne, nous ne finançons plus nos investissements depuis 2008. La crainte est que si nous continuons à poursuivre dans cette voie en renvoyant systématiquement la hausse du taux directeur, nous risquons d’être confrontés au même problème que la Turquie qui s’est retrouvée dans l’obligation de relever drastiquement et en quatrième vitesse ses taux d’intérêt.

31e réunion du CPM

Depuis, la mise en place du comité de politique monétaire (CPM), le taux directeur a été relevé en quatre occasions. En revanche, il a été abaissé à dix reprises et est resté inchangé en dix-sept occasions.
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