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Vidia Mooneegan : «Il faut améliorer le coût de faire du business»

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Vidia Mooneegan : «Il faut améliorer le coût de faire du business» | business-magazine.mu

Alors que Maurice aborde une nouvelle décennie, les espoirs sont grands. La croissance devrait se situer autour de 3,9 % en 2020, l’inflation restera en dessous de 1 % et le chômage devrait être contenu autour de 6,8 %. Peut-on dire que nos fondamentaux économiques sont solides ?

Nous sommes dans un environnement très volatil avec beaucoup de challenges à l’échelle internationale. Maurice étant interconnecté avec tous les blocs économiques du monde, nous devons commencer à réfléchir par rapport à ce qu’on doit changer et faire différemment pour saisir les opportunités qui se présentent.

Nous sommes géographiquement bien situés dans l’océan Indien. Il est important d’optimiser sur les opportunités qui se trouvent autour de nous. Historiquement, nous avons toujours été liés avec l’Europe. Désormais, il s’agira de voir comment nous pouvons construire des ponts avec l’Asie et l’Afrique. Cela demande qu’on repense la façon de faire le business. Il faut comprendre que chaque pays a sa propre culture et sa propre dynamique. Maurice doit devenir beaucoup plus global dans sa réflexion afin d’être un partenaire d’autres pays.

Sur le plan du chômage, nous n’avons pas fait suffisamment de progrès ces dernières années. Certains disent qu’il faut une croissance supérieure à 5 % pour pouvoir résoudre le problème de l’emploi. Maurice étant un petit pays avec une main-d’œuvre limitée, il se doit de monter en gamme. Cela demande une réflexion pour savoir comment créer des opportunités et faire les choses différemment en termes d’innovation. L’investissement dans les technologies sera le moteur de la croissance. Les États-Unis nous donnent un bel exemple. Malgré la récession, leurs investissements dans les technologies n’ont pas diminué. Environ 48 % de tous les investissements publics et privés sont axés sur la technologie. Cela rend la machine productive manufacturière beaucoup plus dynamique. Si Maurice souhaite prendre une nouvelle dimension pour sa croissance, il faut voir comment combiner l’investissement dans l’équipement et la technologie au lieu de se focaliser uniquement sur l’efficience des employés. 

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Ces dernières années, l’investissement privé a été revu à la baisse. Comment inciter le privé à investir davantage ?

Aujourd’hui, les entreprises locales regardent de près le retour sur investissement vu que le marché local est restreint. Dans l’optique d’avoir du rendement, beaucoup de ces entreprises investissent dans d’autres pays. À ce niveau, nous pouvons dire qu’il y a eu une nette augmentation des investissements.

Étant un petit marché avec beaucoup d’acteurs, Maurice fait face à une problématique de masse critique. Nous atteignons le stade de saturation dans plusieurs secteurs. Car les opérateurs ne peuvent aspirer à la croissance avec le marché local uniquement. Il faut se tourner vers l’international et dans la région. C’est dans cette direction que les chefs d’entreprise sont en train de réfléchir. Nous l’avons vu dans le textile et nous le verrons dans d’autres secteurs comme l’agriculture.

Ces indicateurs macroéconomiques cachent toutefois des réalités : le sucre, le secteur d’exportation et le tourisme sont en perte de vitesse. Ces secteurs font face à des problèmes structurels et systémiques. Comment leur rendre leur dynamisme ?

Le secteur cannier peine, mais a encore sa place dans notre économie. Il faudrait que des efforts soient entrepris de part et d’autre pour maintenir à flot ce secteur qui a longtemps porté notre économie, et dont de nombreuses familles dépendent toujours. Nous devons absolument discuter de la viabilité du secteur. Un rapport de la Banque mondiale à ce sujet est actuellement en préparation. Il faut voir les autres axes de croissance. La question de l’énergie et de la biomasse est primordiale pour la filière sucre, étant donné que cela peut favoriser à la fois les petits planteurs et l’industrie. De plus, de nouveaux accords avec la Chine pourraient ouvrir de nouvelles perspectives pour les sucres spéciaux à valeur ajoutée. Autant d’initiatives qui vont donner une bouffée d’oxygène à ce secteur.

Le secteur manufacturier fait face à de sérieux défis dans un contexte mondial de plus en plus compétitif. De plus, les nouvelles contraintes salariales sont en train d’augmenter le coût d’opération. D’ailleurs, plusieurs d’entre elles ont dû cesser leurs opérations. Si nous ne réagissons pas rapidement avec des mesures adéquates, cela risque d’empirer.

L’United Nations Industrial Development Organization souligne qu’il est nécessaire pour les pays à revenu intermédiaire de ne pas entamer de désindustrialisation trop rapide. Il est indispensable aujourd’hui que le gouvernement travaille de pair avec la communauté des affaires sur les politiques industrielles nationales. Cela nécessitera une amélioration technologique, plus particulièrement en ce qui concerne de possibles gains de productivité grâce à l’intelligence artificielle. En outre, les marchés africains devraient jouer un rôle croissant dans notre stratégie. La connectivité et l’efficacité des transits portuaires et aéroportuaires sont également importantes, surtout compte tenu des changements climatiques. Nous devons aussi renforcer les capacités de nos fabricants locaux, afin qu’ils puissent internationaliser leurs entreprises et se positionner avec succès sur les marchés régionaux et internationaux.

Le secteur financier est aujourd’hui tout à fait en mesure de maintenir sa progression de manière durable et continue, mais il nous faut rester vigilant et continuer à améliorer nos institutions pour rassurer les investisseurs. Maurice est désormais pleinement conforme aux régulations de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de l’Union européenne. Un plan directeur a été préparé et doit maintenant être mis en place intégralement. Nous avons une belle carte à jouer, mais il nous faudra mettre l’accent sur la conformité, faire preuve de plus de souplesse et miser sur la facilitation de faire des affaires. Si nous y parvenons, alors le pays pourra devenir le centre e-KYC de la région.

Concernant le tourisme, il semblerait que nous soyons moins compétitifs. Mais il ne faut pas oublier que ce secteur fonctionne par cycles. Le professionnalisme bien établi de l’industrie hôtelière et une bonne collaboration avec le secteur public nous ont permis d’atteindre le seuil de 1,3 million de visiteurs par an. Il y a néanmoins un besoin évident de consolider la destination, en nous assurant que le pays reste beau et propre, tout en recherchant de nouveaux segments. Nous devrons aussi nous engager dans une stratégie claire au niveau des marchés non traditionnels comme la Chine, le Moyen-Orient et l’Afrique.

Qu’en est-il des technologies de l’information et de la communication ?

Au niveau des Tic, la croissance reste relativement bonne, mais nous pouvons mieux faire. 

Le secteur est appelé à se réinventer pour pouvoir exploiter les opportunités créées par l’industrie 4.0. Nos entreprises doivent investir de plus en plus dans les dernières technologies, les compétences numériques et étudier de nouveaux partenariats et modèles de fonctionnement. Investir dans nos talents accélérera la création d’emplois de haut niveau, et nous serons ainsi en mesure de retenir nos talents tout en attirant l’expertise étrangère.

Les opportunités sont nombreuses, notamment en Afrique. Mais encore faut-il qu’on puisse les exploiter. Il faudrait favoriser la valeur ajoutée à l’externalisation de routine, et créer la propriété intellectuelle où nous sommes moins compétitifs. Le marché principal pour les opérateurs, c’est l’Europe. Il faudra miser sur l’Afrique, qui représente un vrai potentiel pour Maurice.

Si nos contraintes géographiques limitent nos exportations en termes de produits, ce n’est pas le cas concernant les services. Il faut continuer à produire. C’est en créant des produits que les entreprises technologiques créent de la valeur ajoutée. Maurice doit être plus ambitieux. Nous nous mesurons souvent avec l’Afrique. C’est bien ! Toutefois, nous devons nous comparer avec les meilleurs pays du monde et ne pas viser seulement à être le premier sur le continent africain. De par notre histoire, nous avons une aversion aux risques : nous voulons toujours de la protection. Il faut être en compétition pour devenir le meilleur.

Les opérateurs des Tic font face à un manque de ressources. Que faut-il faire pour trouver la main-d’œuvre nécessaire pour répondre à la demande grandissante ?

Nous avons un bassin de talents. Il est important d’avoir une feuille de route pour la main-d’œuvre, les activités économiques et les secteurs que nous allons développer pendant les dix prochaines années. C’est par rapport à cela que nous saurons combien de personnes doivent être formées pour être avocats, ingénieurs ou autres.

Malheureusement, nous n’avons pas un tel plan. Beaucoup de jeunes choisissent des filières par accident. Souvent, ils se rendent compte après leurs diplômes que les emplois disponibles ne sont pas compatibles avec leurs compétences. C’est un gaspillage de talents et cela amplifie la problématique de l’offre et la demande. Il y a beaucoup de postes à remplir dans les Tic, mais on ne trouve pas des profils compatibles. Une meilleure structure permettrait de résoudre ce genre de problème. L’une des forces de la main-d’œuvre mauricienne c’est sa capacité d’adaptation.

Quoique s’inscrivant dans la modernité, la nouvelle législation du travail impose un coût financier sur les entreprises en difficulté. Comment le secteur privé doit-il se réorganiser pour faire face à ces nouvelles exigences ?

Il convient de souligner que les membres de Business Mauritius ne sont jamais contre un projet de loi qui tend à améliorer les conditions de vie des Mauriciens. Néanmoins, il reste primordial que ce genre de réforme qui touche très profondément à la structure sociale économique du pays se fasse avec beaucoup de précautions et de consultations. Cela permettrait d’éviter les conséquences inattendues. Les nouvelles lois du travail créent pas mal de chamboulement au niveau des entreprises.

Dans plusieurs pays où l’on a instauré le salaire minimum, l’on constate que ce sont les PME qui en subissent les répercussions. Elles sont contraintes de restructurer leur business pour subsister. Les PME devraient effectivement bénéficier d’une place plus importante dans notre paysage économique. Plus de 60 % des membres de Business Mauritius sont des PME et pourraient jouer un rôle prépondérant dans la croissance du pays.

Mais pour atteindre cet objectif, le gouvernement et les organismes de soutien doivent se focaliser sur certains points vitaux : la promotion de l’entrepreneuriat, l’instauration d’un environnement favorable à la création d’entreprise et surtout la facilitation de l’accès au financement. Tout entrepreneur devrait bénéficier d’avantages particuliers et de subventions par rapport à son domaine d’activité ; ce qui n’est pas forcément le cas ici même si nous allons maintenant dans la bonne direction.

Plusieurs mesures ont été mises en place par Business Mauritius ces derniers temps, avec la collaboration d’entités gouvernementales ou privées, pour favoriser l’entrepreneuriat. Je pense, par exemple, au lancement de Mo Santé, un plan d’assurance destiné aux PME, ou encore le SMEG (SME for Growth) Working Group. D’autres initiatives allant dans ce sens seront adoptées à l’avenir.

La nouvelle législation du travail réhabilite les employés dans leurs droits. Mais qu’en est-il de la productivité ?

La productivité inclut le capital humain, l’investissement dans les équipements, dans la structure ou encore dans la technologie. La productivité peine dans certains secteurs par manque d’investissement. L’on a beau essayer de pousser les employés pour qu’ils travaillent vite et soient efficaces, mais il est clair qu’il y a une certaine limite.

Cela dit, la productivité à Maurice n’est pas au niveau que nous souhaitons. Nous n’avons pas fait suffisamment pour inverser la tendance. Ce n’est pas en rendant les conditions pour les entreprises plus difficiles que cela va s’améliorer. Plusieurs entreprises ont fermé leurs portes l’année dernière et si l’on tarde à agir, nous verrons probablement la même chose cette année.

En cette nouvelle année, les défis sont nombreux. Si le conflit commercial entre les États-Unis et la Chine s’apaise, il n’empêche que la conjoncture internationale reste précaire, notamment, avec l’imminence du Brexit. De même, plusieurs économies mondiales sont en net ralentissement. Quels sont les risques pour Maurice ?

Maurice est interconnecté avec le monde entier. Ce qui se passe à l’international va indéniablement affecter nos exportations. Si le pouvoir d’achat diminue sur le marché de l’export, nous serons ainsi impactés. Il en est de même pour le nombre de touristes qui risque de diminuer.

Selon le dernier World Economic Report du Fonds monétaire international (FMI), publié le 20 janvier, la croissance mondiale devrait passer de 2,9 % en 2019 à 3,3 % en 2020, et à 3,4 % en 2021.

Par rapport au dernier World Economic Outlook d’octobre 2019, nous notons une baisse de 0,1 % dans les prévisions pour 2019 et 2020 et une augmentation de 0,2 % pour 2021. 

Cette révision négative pour 2019 et 2020 découle de certaines incertitudes sur certains marchés émergents, notamment l’Inde, mais aussi de l’impact des crises sociales sur l’économie mondiale, selon le FMI. Il note toutefois des signes d’une possible amélioration future, notamment à travers une politique monétaire mondiale plus accommodante, un léger mieux dans les tensions commerciales entre les ÉtatsUnis et la Chine, ou encore une baisse des inquiétudes liées au Brexit.

Certains risques restent néanmoins toujours présents, à l’image des tensions géopolitiques exacerbées entre les États-Unis et l’Iran. Celles-ci pourraient impacter les relations entre les États-Unis et leurs partenaires commerciaux. Les tensions géopolitiques sont indépendantes de notre volonté. Toutefois, l’accord signé entre les États-Unis et la Chine a apaisé les tensions. Nous avons tout de suite vu l’effet sur la Bourse avec beaucoup plus de confiance.

Par ailleurs, le «Brexit deal» a été voté au Parlement britannique. Cela rassure qu’il n’y aura pas de «no deal Brexit». Il nous faudra étudier tout cela de près et suivre avec attention le déroulement des événements. Si on a comme ambition de devenir une économie à revenu élevé, Maurice doit pouvoir de façon autonome bâtir sa résilience face aux situations internationales difficiles.

Il y a une autre lecture : le Brexit pourrait aussi représenter une opportunité pour Maurice avec la volonté affichée du Royaume-Uni d’approfondir ses relations commerciales avec l’Afrique. Vos commentaires ?

Dans ce contexte mondial assez instable, Maurice a non seulement une carte à jouer sur le Brexit mais sur plusieurs points. L’Angleterre aura un accord commercial avec Maurice. Toujours est-il que cela dépendra de notre relation avec le Royaume-Uni, car d’autres pays veulent aussi trouver des accords.

Les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine pourraient également nous ouvrir de nouvelles opportunités, qu’il nous faudra saisir au vol. Je pense surtout aux produits de niche en petite quantité et à haute valeur ajoutée.

Notre pays a un modèle de croissance qui est basé en grande partie sur une industrialisation visant l’exportation, la libéralisation du secteur privé, les investissements directs étrangers et l’adhésion au commerce mondial. Dans ce contexte, il est important d’accélérer notre compétitivité avec un cadre légal et des mesures pour améliorer le coût de faire du business tout en maintenant et promouvant l’efficacité de notre régime fiscal. Il est aussi très important de gérer au mieux le déficit budgétaire et la dette publique.

On parle d’un nouveau modèle économique qui prône un juste équilibre entre l’économie, le social et l’écologie. Cela dit, quelle devrait être la trajectoire de développement de l’économie mauricienne pour ces dix prochaines années ?

Le National Business Roadmap lancé par Business Mauritius, l’an dernier, a identifié quatre secteurs prioritaires : les ressources naturelles, le capital humain, la gouvernance et la vulnérabilité environnementale. Comme vous le savez, le National Business Roadmap est un plan stratégique pour le secteur des affaires dans son ensemble et sur le long terme. Le développement économique de Maurice doit marcher de pair avec l’inclusion sociale et le développement durable. L’on peut même créer une industrie à partir de l’économie verte. Il y a d’autres grands enjeux tels que l’Afrique, la politique d’industrialisation du pays, les secteurs de la santé et du tertiaire, entre autres.

Je suis persuadé que nous devons aussi nous donner la chance de promouvoir l’innovation à tous les niveaux et dans tous les secteurs. En comparaison avec des pays similaires au nôtre, nous avons quand même pris un certain retard par rapport au développement d’une culture intégrant l’innovation et incluant les technologies digitales, comme par exemple l’intelligence artificielle. L’innovation est, en effet, le moteur par excellence de la croissance économique et un pilier essentiel pour bâtir une économie compétitive. Si nous voulons nous appuyer sur l’innovation pour grandir, il est essentiel d’avoir des talents de premier ordre. Pour cela, notre système éducatif doit être revu de toute urgence. D’ailleurs, les résultats récents du School Certificate sont alarmants. Nous devons analyser ce qui ne fonctionne pas et, ensemble, trouver des solutions.

Les nouvelles technologies refaçonnent les industries. On parle, notamment, de l’émergence de la FinTech comme un pôle de croissance. Doit-on accélérer la transition ?

De nos jours, la technologie est l’épine dorsale de toute grande économie. Une technologie efficiente est indispensable désormais pour favoriser la croissance économique. D’ailleurs, nous pouvons constater que tous les pays à forte croissance sont ceux qui s’appuient et investissent énormément dans ce domaine. Il y a pas mal de travail qui a déjà été effectué pour la transition vers les nouvelles technologies.

Nous avons eu la mise en place du Mauritius Africa Fintech Hub, l’année dernière. Maurice peut également s’appuyer sur son centre financier international bien établi et connu à travers le monde. Nous avons aussi une industrie technologique très active. Pouvoir compter sur une bonne technologie permet d’être beaucoup plus proactif face aux changements macroéconomiques. Avec une bonne base technologique, on peut réagir plus rapidement, notamment, grâce à la possibilité de créer rapidement de nouveaux produits.

En investissant dans la technologie, l’on attire forcément de nouveaux talents plus à même de faire face aux défis contemporains. De plus, les produits technologiques ont l’avantage de pouvoir être commercialisés partout à travers le monde en peu de temps et sans problèmes logistiques, surmontant ainsi l’obstacle géographique. Nous avons aujourd’hui la possibilité de créer un business de classe mondiale à Maurice grâce à la technologie, à condition bien sûr que nous nous y investissons à fond et que nous nous donnons les moyens de nos ambitions. On constate, par exemple, que plusieurs de nos secteurs traditionnels sont en train de s’essouffler. Or, la technologie peut aider à rendre ces derniers plus productifs et profitables en les réinventant. Une convergence entre les deux secteurs que sont la technologie et la finance permettra de créer un FinTech hub très solide. La FinTech peut devenir un des piliers de notre économie dans les années à venir. Il y a déjà des paramètres comme le Regulatory Sandbox Licence qui permettront au secteur de se développer.

Comment dissiper le climat de suspicion qui règne envers le secteur privé, qui est vu comme détenteur du pouvoir et capable de pressions sur l’État pour arriver à ses fins ?

Il y a ceux qui disent le contraire, soit qu’on est «at the receiving end». Paradoxalement, on nous accuse aussi de trop collaborer avec l’État, et de ne pas montrer nos crocs ! Which is which ? Je pense que nous sommes très proactifs. Il y a un système de consultation qui est déjà en place, mais comme dans toute démocratie – et nous l’avons vu avec la Workers’ Rights Act –, c’est le gouvernement qui décide au final.

Cependant, nous sommes d’avis qu’il faudrait un système de Regulatory Impact Assessment qui permettra de quantifier et de comprendre l’impact de ces décisions/politiques et de prendre des décisions cohérentes en se basant sur des données concrètes, et non sur l’affectif ou des considérations uniquement d’ordre politique.

Je dois dire que les institutions internationales comme la Banque mondiale reconnaissent qu’une des spécificités de Maurice est l’étroite collaboration entre le gouvernement et le secteur privé. Plusieurs entrepreneurs africains me disent que tel n’est pas le cas pour tous les autres pays du continent. Il nous faut maintenir ce débat d’idées.

Je suis convaincu, et cela a déjà été dit par mes prédécesseurs, que le pays a avancé à chaque fois que le gouvernement et la communauté des affaires sont parvenus à véritablement travailler ensemble. Nous ne pensons pas qu’il est sain de travailler en solo ou de s’agiter dans des directions opposées. Quand cela se fait, il y a peut-être de petites victoires populistes ou autres, mais au final nous n’avançons pas. Il est important que le secteur des affaires et les autres partenaires sociaux de notre économie (les regroupements de travailleurs, par exemple) soient tous partie prenante du dialogue. Nous devons devenir des forces de proposition, et non d’opposition. Et ce dialogue doit se faire de façon continue et sur tous les projets visant à faire avancer Maurice.

Nous ne pouvons pas nous agiter dans des directions opposées, mais il faut plutôt travailler vers une entente et une compréhension communes, même si cela ne nous empêche pas d’exprimer une opinion ferme lorsque cela est nécessaire. Notre pays est fondé sur ce dialogue public/privé, et Business Mauritius est le pont entre les deux. Le prochain test, ce seront les consultations budgétaires. Nous viendrons avec des mesures concrètes et je pense que le gouvernement sera à l’écoute quand nous aurons des buts en commun.

La restructuration de Business Mauritius a-t-elle porté des fruits concrets ?

Certainement ! Je pense qu’aujourd’hui au niveau de Business Mauritius, nous avons une équipe qui a été renforcée. Nous avons également des commissions qui ont été mises en place sur le capital humain et le développement durable. Nous sommes devenus des incontournables dans le paysage économique à Maurice où nous sommes de plus en plus sollicités, que ce soit par le gouvernement ou par les organisations internationales.

Pour que Business Mauritius soit un partenaire efficace du développement du pays et que cela apporte des résultats concrets, il nous a fallu nous doter d’une structure solidifiée. Cela est chose faite, et l’un des premiers fruits de cette restructuration est justement l’élaboration du National Business Roadmap. Nous avons plusieurs projets pour cette année, dont le National Skills Matching Platform, le Code of People Practice et le Sustainability Pact.

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