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Recyclage, nettoyage et traitement d’eau: Sursaut d’espoir pour le ‘vert’

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Recyclage

Absent ces six dernières années de toute décision politique, le secteur vert n’a connu aucun développement majeur. Avec la vision verte du gouvernement et dans le sillage de la création de villes intelligentes, le secteur du nettoyage, du recyclage et du traitement d’eau pourrait enfin connaître cette évolution tant espérée.

Léguer un environnement sain à la génération future. C’est la voie dans laquelle s’est engagée la nation mauricienne. Un désir qui remonte à 2008, avec l’annonce du projet MID (Maurice Ile Durable) – lancé par l’ex-Premier ministre Navin Ramgoolam. Ayant demeuré au stade de slogan, le projet n’a jamais abouti.

Néanmoins, selon les opérateurs engagés dans le recyclage, si le MID avait franchi le cap de slogan, le secteur du recyclage, du nettoyage et du traitement d’eau aurait connu un rapide essor. Un point qu’avance notamment Raj Essoo, Managing Director d’Atics, entreprise évoluant dans la collecte des déchets. «Le MID est demeuré une idée et ne s’est jamais vraiment concrétisé. Si ce projet avait pris forme, il aurait contribué à développer davantage ce secteur.» Dani Joseph, Manager, Chemical Division, de Coroi Maurice, laisse entendre que le MID a incité les acteurs dans ce secteur à chercher des solutions innovantes. C’est le cas pour le domaine du traitement d’eau où des solutions avant-gardistes ont été mises en place afin de permettre aux Mauriciens de gérer l’eau de façon durable.

Outre d’être un des grands absents de toute décision politique ces six dernières années, le citoyen mauricien n’a pas l’esprit vert. Une remarque que font les opérateurs dans ce secteur. «Les Mauriciens n’ont pas cerné toute l’importance du vert. Le vert est resté un concept pour les Mauriciens ; ils ne le mettent pas en pratique dans la vie quotidienne. Il est impératif de leur inculquer l’importance du recyclage.» Un point que partage également Mathias Echevin, Managing Director de la compagnie Solutions Eau et Environnement (SEE) : «Nous ne constatons pas d’engouement à ce sujet.» Il avance toutefois une autre raison derrière ce manque d’engouement de la part des Mauriciens : «L’esprit vert a un coût qui n’est généralement pas rentable à court terme.»

Bien que le vert n’ait pas la faveur chez les particuliers, les entreprises ont, pour leur part, cerné tout l’enjeu autour du vert. Un fait que confirme Dani Joseph de Coroi Maurice. «La ‘green attitude’ gagne les entreprises mauriciennes au-delà des lois.» Depuis quelques années, on constate à Coroi Maurice le désir de plusieurs chefs d’entreprise d’être plus respectueux de l’environnement. De ce fait, un grand nombre de compagnies se sont engagées dans la certification ISO 14000 ou ISO 22000. À l’instar de Mathias Echevin, Dani Joseph souligne que néanmoins le vert a un coût et «le gouvernement doit encourager les petites et moyennes entreprises dans cette direction.» Cependant, pour Bernard Struyven, Deputy Manager de Manser Saxon Facilities Ltd, si certains acteurs sont conscients de l’enjeu vert et traitent ou font traiter leurs effluents, d’autres les rejettent dans le milieu naturel, polluant l’environnement «avec des conséquences qui peuvent parfois être irréversibles

À quand le tri sélectif ?

En raison du manque d’intérêt de la part du précédent gouvernement sans oublier le désintérêt des Mauriciens, ce domaine fait aujourd’hui face à de nombreux défis. L’un des plus gros demeure le recyclage des déchets. À Solid Waste Recycling Ltd (SWRL), on soutient que le recyclage des déchets est le plus grand défi de ce siècle. «Le volume de déchets municipaux qui nous concerne directement est en constante augmentation», indique Patrick Maurel, PDG de SWRL. Ainsi, environ 37 000 tonnes de déchets sont transférées à Mare Chicose chaque mois. Les camions d’Atics transportent quotidiennement entre 20 et 30 tonnes de déchets vers Mare Chicose.

Effectivement, dans le segment du nettoyage et du recyclage des déchets, malgré sa fulgurante ascension économique et sociale, Maurice demeure toujours au stade de la collecte et de l’enfouissement des déchets. «Bien que nous utilisions des camions à bennes à ordures, ce secteur n’a connu aucun changement innovant depuis ces 20 dernières années», laisse échapper Raj Essoo. Effectivement, Maurice n’a pas toujours adopté le tri sélectif. La collecte sélective, avec des camions spécifiques à différents compartiments pour accueillir des déchets de nature différente, aurait dû être déjà une réalité dans différentes régions de l’île. «Nous nous targuons d’être en avance dans toute une kyrielle de secteurs face aux autres pays de la région de l’océan Indien et de l’Afrique mais on constate que l’île de La Réunion a une longueur d’avance sur nous, dans ce secteur.»

En ce qu’il s’agit du traitement d’eau, Mathias Echevin de SEE et Dani Joseph de Coroi Maurice partagent le même avis : Maurice n’est pas en retard dans ce segment. «Notre savoir-faire nous permet de travailler dans l’ensemble des pays de la région, notamment à l’île de La Réunion», explique Mathias Echevin. Même son de cloche du côté de Coroi Maurice : «À quelques petites différences près, Maurice utilise les mêmes techniques de traitement d’eau potable et d’eau industrielle que l’île de La Réunion.» Mais Dani Joseph remarque que l’île sœur devance Maurice sur les normes de rejets d’effluents car elle suit la législation européenne: «De ce fait, les industries et collectivités locales doivent investir davantage dans le traitement des effluents. À l’île Maurice, les normes sont moins élevées.» Un fait que soutient Bernard Struyven de Manser Saxon Facilities Ltd : «Le renforcement des règles existantes et des contrôles plus systématiques permettraient de changer les habitudes, cela associés à des actions de sensibilisation. Le retard constaté par rapport à l’île de La Réunion peut être rattrapé en quelques années si Maurice se donne les moyens.»

Élan vert du gouvernement

Conséquence : la station d’enfouissement de Mare Chicose est en passe d’être saturée. «Pour l’heure, aucune solution de rechange adéquate n’a encore été trouvée», déplore Patrick Maurel. À SWRL, une unité de compostage a été mise en place pour solutionner en partie ce problème. Elle transforme en moyenne 6 500 tonnes de déchets solides municipaux par mois, soit environ 17,5 % du volume total généré. Mais on en revient toujours à la même problématique : l’absence d’un système de tri sélectif. «La quasi-absence du tri sélectif des déchets à la source fait que nous sommes malheureusement contraints, nous aussi, de renvoyer une partie des déchets réceptionnés vers Mare Chicose.» Les déchets que reçoit SWRL sont de toutes sortes : matelas, chaises, postes de télévision, bouteilles. «Nous procédons à un tri à l’arrivée, et tout ce qui peut être recyclé est mis de côté. Le reste est enfoui.»

Cependant, le gouvernement, au pouvoir depuis fin 2014, semble accorder un certain intérêt au recyclage. Nouvelle preuve de cet engagement pour le vert est qu’au Conseil des ministres du 29 janvier, le ministère de l’Environnement a indiqué qu’il compte élaborer un plan national pour le recyclage et annonce la signature d’un accord avec les Nations unies pour le tri des déchets industriels. De plus, comme le souligne Raj Essoo d’Atics, depuis son installation à la tête du pouvoir, ce gouvernement aborde des sujets comme le projet d’incinération des déchets ou encore d’énergie produite à partir des déchets. «Il y a une lueur d’espoir avec plus d’ouverture pour ce secteur. C’est bien d’en parler mais nous espérons que les projets abordés se matérialiseront», lâche le Managing Director d’Atics.

À SWRL, on avance que le gouvernement a toujours été un partenaire privilégié dans son projet de compost à partir des débris de végétaux, et cela dès le début. Avec la nouvelle vision verte du gouvernement, ce partenariat va perdurer «car la production de compost à partir de déchets solides municipaux (DSM) permet d’atteindre trois objectifs importants : la mise à disposition de la matière organique aux petits planteurs de légumes et de fruits, une économie appréciable sur le coût de transport des déchets vers Mare Chicose et une diminution du volume total de DSM enfouis annuellement.» Sous le nouvel élan vert du régime en place, SWRL compte lancer une vraie révolution dans ce domaine. Il s’agit du projet ‘waste to energy’ basé sur le procédé de gazéification et de vitrification au plasma.

Patrick Maurel, PDG de SWRL, explique que cette méthode répond aux normes européennes concernant l’environnement avec zéro émission de gaz toxiques. «En effet, le processus de plasma est une technique écologiquement propre et utilise, lui aussi, le DSM comme ‘carburant’.» Ainsi, en l’absence d’oxygène dans la réaction, le gaz produit est exempt de phénols.

De plus, les très fortes températures générées au niveau du réacteur, de l’ordre de 5 000°C, empêchent la formation de gaz toxiques tels que dioxines, furanne, protoxyde d’azote ou anhydride sulfureux, entre autres. «Les rejets sous formes de scories peuvent être réutilisés dans le secteur de la construction ou pour la fabrication de routes.»

La vision verte du gouvernement, soulignent les opérateurs, apportera du changement dans le segment du traitement d’eau. Comme l’explique Dani Joseph, Manager, Chemicals Division de Coroi Maurice : «Le gouvernement veut que l’eau potable soit fournie à toute la population en 24/7. Cela impliquera d’importants investissements, notamment, pour traiter toute cette eau et la rendre potable.» Ce qui signifie qu’il y aura donc de la place pour de nouvelles technologies, de nouveaux produits… «Il faudra aussi traiter beaucoup plus d’effluents afin de les réutiliser au moins pour l’irrigation.»

Pour Bernard Struyven de Manser Saxon Facilities Ltd, le nouveau gouvernement est conscient de l’enjeu vert et agit pour que progressivement la situation s’améliore aussi bien pour l’eau que pour les déchets. «Son action pour arrêter la distribution de sacs en plastique au 1er janvier 2016 en est un exemple, mettant Maurice en avance par rapport à d’autres pays plus développés, à l’instar de la France où l’arrêt de la distribution de sacs en plastique sera appliqué le 1er juillet 2016.»

Grande demande pour le traitement d’eau

L’annonce de la mise en chantier des six Smart cities par le gouvernement donnera un nouveau souffle à ce secteur. Par exemple, au niveau de la collecte des déchets, chaque poubelle sera munie d’un ‘sensor’. La création de ces villes intelligentes sera également bénéfique aux opérateurs évoluant dans le segment du traitement d’eau. «Si le projet de Smart cities maintient son objectif d’être autonome en eau, il y aura beaucoup de débouchés en ce qui concerne le captage d’eau et le traitement localisé des effluents à des fins d’irrigation dans ces villes intelligentes.»

Le marché du traitement d’eau est en croissance et Dani Joseph impute cette demande croissante à une hausse de la consommation. Pour cela, il s’appuie sur les chiffres de Statistics Mauritius. Ainsi, comparé à 2013, l’utilisation totale d’eau a progressé de 0,8 % en 2014. La consommation d’eau dans les secteurs domestique, industriel et touristique a aussi connu une hausse de 6 %. «De 2013 à 2014, le volume d’eau traité par les stations de la CWA a augmenté de 5,5 %. 66 % du volume d’eau vendu par la CWA se rapportait à l’utilisation domestique, la différence étant utilisée par les industries.» Dani Joseph soutient que cette demande atteindra dans les années à venir des sommets avec l’augmentation du nombre d’hôtels, l’apparition des villes intelligentes. Et cela ne fait que réjouir les opérateurs évoluant dans le domaine du traitement d’eau.

Qui dit grande demande, dit concurrence accrue. «Nous sommes confrontés à plusieurs compétiteurs, de surcroît sur un petit territoire comme l’île Maurice. Nous notons aussi que certains clients ont tendance à ne regarder que le prix des produits et négligent ainsi la valeur ajoutée et un suivi technique spécialisé», se plaint le Manager de la Chemicals Division de Coroi Maurice. Avis partagé par Mathias Echevin, directeur de SEE, qui également déplore le fait qu’à Maurice, un certain nombre de clients ne jugent essentiellement que sur le prix, sans étudier les solutions techniques qui font la différence en termes de qualité, de fonctionnement et de maintenance.

Perpétuelle innovation

Alors, pour se différencier et faire grossir son portefeuille clientèle, les opérateurs dans ce segment misent gros sur l’innovation eue égard aux solutions proposées. En effet, si le pôle nettoyage et recyclage souffre d’un manque d’innovation, le traitement d’eau est un domaine avant-gardiste. Par exemple, comme tient à le rappeler Mathias Echevin, la stratégie de SEE a toujours été l’innovation : «Nous proposons sans cesse de nouvelles solutions techniques.» Dans cet esprit, SEE organise gratuitement tous les deux ans un séminaire ; il s’agit d’une plateforme d’échanges entre l’ensemble des acteurs du domaine de l’eau et de l’environnement «et durant laquelle nous présentons de nouvelles techniques.» Le prochain séminaire aura lieu à la fin de cette année.

Par ailleurs, l’année dernière, SEE a réalisé un certain nombre de projets innovants. Mathias Echevin cite le traitement par voie totalement naturelle de bassins d’agréments. «Il s’agit de la filtration plantée sans aucun ajout de réactif chimique. Ce projet est une première à Maurice.» Autre projet innovant est la réutilisation des eaux usées pour les toilettes d’une entreprise, également une grande première à Maurice.

Coroi Maurice mise sur son partenariat avec Nalco, le leader mondial dans le traitement d’eau. «L’expertise des ingénieurs de Nalco et leur réseau international permettent à Nalco/Coroi d’offrir un service technique pointu à toutes les industries qui ont besoin de traiter de l’eau d’une manière ou d’une autre. Les résultats obtenus depuis 2011 chez nos clients sont positifs aussi bien en termes de résultats techniques, qu’environnementaux ou économiques», se targue Dani Joseph.

L’innovation fait également la différence chez Coroi. «Nalco étant une société qui mise sur l’innovation, Coroi apporte beaucoup à l’industrie en termes de nouveaux produits, de techniques de traitement l’eau et de nouveaux équipements.» La dernière en date est la technologie Pareto, un petit équipement qui permet une meilleure diffusion de produits dans l’eau pour un traitement amélioré et, par ricochet, une réduction de la quantité de produits utilisés.

Coroi, de son côté, apporte un service logistique selon un protocole établi avec les clients. «Notre équipe de techniciens utilisent les équipements de protection individuelle prescrits par la législation afin d’assurer une manipulation sécurisée des produits sur les sites de production des clients.» La société étoffe son équipe technique avec le recrutement d’ingénieurs chimiques afin que Coroi/Nalco soit encore plus proche des besoins des clients.

Manser Saxon Facilities Ltd préfère jouer sur la carte du tarif et des solutions adaptées au contexte local. «MSFL se différencie en assurant des prestations adaptées au marché, au coût le plus juste, ce qui est rarement le prix le plus bas.»

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