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Interview Rencontre

Dan Maraye « La croissance économique pour 2012 ne dépassera pas 3,2 % »

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Dan Maraye « La croissance économique pour 2012 ne dépassera pas 3

BUSINESSMAG. Quelle est votre analyse de la performance économique en 2012 ?

L‘ile Maurice étant une petite économie ouverte nous dépendons beaucoup de ce qui ce passe dans le monde extérieur. Avec les conditions imprévisibles qui prévalaient au début de l’année et qui, à mon avis, prévalent toujours à travers le monde, les révisions à la baisse des indicateurs économiques majeurs sont en partie compréhensibles.

Le recul peut être expliqué par une performance de certains secteurs de notre économie audessous de nos espérances, notamment la décroissance de la production sucrière de l’ordre de 7%, une baisse de 2.9% dans la construction et surtout les investissements privés qui ont chutés de l’ordre de 3.7% comparé à l’année précédente.

En 2011 notre taux de croissance a été de l’ordre de 3.9% tandis que la croissance économique pour l’année 2012 ne dépassera pas 3.2%. Il y a aussi le fait que nos importations ont augmenté de l’ordre de 10% tandis que nos exportations n’ont augmenté que de l’ordre de 8%. D’autre part, la balance déficitaire de notre compte courant va dépasser les Rs 40.8 milliards de l’année dernière. Ajouter à cela, le déficit budgétaire de 2011 a été de l’ordre de 3.2% et c’est clair au moment où je vous parle que le déficit budgétaire pour 2012 sera autour de 3.8%.

En ce qu’il s’agit de nos dettes extérieures, par rapport aux chiffres de 2011, nous allons enregistrer une augmentation de presque 9% à la fin de 2012. Souhaitons que ce chiffre n’atteigne pas les Rs 30 milliards.

Le danger majeur qui nous guette, c’est surtout le taux de chômage de 8%. Il y a aussi le taux de chômage parmi les jeunes qui tourne autour de 20%. Une situation qui devrait inquiéter nos décideurs.

Le signal positif a été du côté de l’inflation (Headline Inflation) grâce à la politique monétaire adoptée par la Banque centrale qui ne s’est pas laisser influencer par le ministère des Finances. Le taux d’inflation a été maitrisé et sera de l’ordre de 4.4%, comparé à 6.5% l’année dernière.

Cela dit, en général je pense que notre performance économique a été raisonnable dû principalement à la politique économique adoptée entre 2006 et 2010, c’est-à-dire la période pendant laquelle nous avons été la fourmi de l’Océan Indien et non la cigale comme c’est le cas maintenant.

BUSINESSMAG. Une fois de plus nous avons vu que la politique a relégué l’économie au second plan, cette année. Pourquoi le gouvernement n’arrive pas à se mettre réellement au chevet de l’économie ?

L’année 2012 a été marquée par les élections villageoises et les élections municipales. De ce fait, malheureusement, le gouvernement a privilégié une politique économique à court terme tout en reléguant le long terme au second plan. D’ailleurs, c’est la lecture que font les observateurs indépendants du budget présenté en Novembre 2012. Il me semble que les politiciens sont bien plus préoccupés par leurs avenirs politiques personnels au lieu de l’avenir économique de notre pays. Cela est dangereux et décourageant pour les entrepreneurs et les jeunes de notre pays.

BUSINESSMAG. Pensez-vous que l’économie mauricienne a les moyens pour rebondir en 2013 comme semble le prévoir le ministre des Finances avec sa prévision de croissance de 4% pour l’année prochaine ?

Certes nous avons les moyens d’être plus efficients, plus productifs et plus performant. La débrouillardise de nos compatriotes est reconnue. Ils doivent être motivés d’avantage et les employeurs doivent créer l’environnent propice tout en mettant à leur disposition les outils appropriés. Toutefois, l’exemple doit venir d’en haut, c’est-à-dire de nos ministres et autres politiciens, en d’autres mots, il nous faut bien plus de rigueur, plus de transparence dans les affaires de l’Etat, bien plus de professionnalisme et moins de gaspillages et de corruption.

Comme tout bon patriote, je souhaite que les prévisions du ministre des Finances s’avèrent correctes pour l’année prochaine. Mais avec la débandade de la zone euro, ainsi que des prévisions de croissance économique en baisse dans les pays émergents tels que L’Inde et la Chine, la tâche ne me parait pas facile. Il nous faut surtout éviter les bavures telles que Medpoint, Jin Fei et autres Neotown. Espérons qu’il n’y aura pas d’autres carnavals de Rio à Flic en Flac!

« Entre 2006 et 2010 nous avons été la fourmi de l’Océan Indien et non la cigale comme c’est le cas maintenant »

BUSINESSMAG. 2012 a aussi été marquée par la défaite du gouvernement aux élections municipales. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Dan Maraye : D’abord les élections municipales ont eu lieu avec 2 ans de retard et cela ne fait pas honneur à notre démocratie. Les résultats de ces élections démontrent que nos compatriotes réfléchissent bien plus que pensent nos politiciens. Ils ont rejeté l’arrogance, la corruption, l’opacité dans les affaires de l’Etat et l’absence de chances égales dans les nominations à la tête des secteurs clés du pays. Le favoritisme est une gangrène qui décourage les jeunes de notre pays. Les électeurs ont envoyé un signal fort a tous les politiciens et ceux qui sauront décoder ce signal et agissent favorablement en conséquence seront les futurs vainqueurs.

BUSINESSMAG. Nous avons assisté à un bras de fer à distance entre le ministre des Finances et le Gouverneur de la Banque de Maurice durant l’année écoulée. Quelle est votre interprétation de cette situation? Quels sont les risques d’une telle bagarre pour la stabilité du système financier?

Je ne vois pas de quel distance vous parlez car il n’y a que quelque pas de tango qui séparent l’hôtel du gouvernement de la Bank of Mauritius Tower.

Plus sérieusement, je pense que, comme cela devrait être le cas, la Banque de Maurice ne s’est pas laissée influencer indûment par le ministère des Finances et a agi correctement pour le bien être de la grande majorité de nos compatriotes et surtout les plus démunis. Moralement, la Banque de Maurice ne peut prendre une décision qui favoriserait un secteur de l’économie au détriment de l’ensemble de l’économie nationale.

Les outils qui sont à la disposition de la Banque de Maurice pour ajuster la politique monétaire sont différents des outils que possèdent le ministère des Finance pour retoucher la politique fiscale.

Néanmoins, il est important que les deux parties accordent leurs violons et chacun agi en fonction des pouvoirs qui leurs sont conférés dans les limites des lois en vigueur. Donc une coordination sérieuse entre les deux entités est plus que nécessaire pour l’épanouissement ordonné de l’économie nationale.

BUSINESSMAG. Comment se présente l’année 2013 ?

Le récent indice de confiance publiée par la Chambre de Commerce et d’Industrie me parait inquiétant car cela démontre une certaine réticence des investisseurs à se lancer dans de nouveaux projets surtout par manque de visibilité dans le moyen terme. Donc, l’année 2013 devrait être abordée avec bien plus de sérieux et de discipline. Il nous faudra nous assurer que les principes de la bonne gouvernance soient appliqués rigoureusement dans nos institutions. Il nous faut être vigilant car la crise de la zone euro pourrait avoir des conséquences brutales pour notre économie.

Apres 45 ans d’indépendance, il est grand temps de rehausser le niveau de débats concernant l’avenir de notre pays au lieu de ces ‘’coze cozés’’ puérils.

Souhaitons plus d’intégrité, de sagesse, de sérieux et de sincérité à tous ceux qui aspirent à contribuer à l’avancement de notre pays.

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