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Interview Rencontre

Gilbert Seeyave : « La charge fiscale pour les entreprises atteint 28,5 % »

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Gilbert Seeyave : « La charge fiscale pour les entreprises atteint 28

Théoriquement, l’impôt sur le revenu est au taux uniforme de 15 %. Quand s’ajoutent les autres taxes et charges, le poids fiscal atteint 28,5 %. Il reste toutefois inférieur à la moyenne mondiale de 44,7 %, souligne Gilbert Seeyave, Partner / Tax à DCDM Financial Services.

BUSINESSMAG. En matière fiscale, quelle est l’approche générale adoptée par le ministre des Finances dans le dernier Budget ?

En général, il n’y a pas eu de grands changements dans la fiscalité des entreprises depuis la grande réforme en 2006. Certaines mesures existantes ontété retouchées pour les améliorer telles que celles concernant la Corporate Social Responsibility, l’Advance Payment Systemet le Tax Deduction at Source. La dépréciation accélérée sur certains équipements encouragera les entreprises à investir dans la technologie verte et ainsi contribuera au concept Maurice Ile Durable. Couplée à cette mesure est la non-application de l’obligation de payer un montant d’impôt en cas de paiement de dividende par l’entreprise. C’est une très bonne amalgamation des deux mesures par le ministre des Finances pour permettre à l’entreprise de bénéficier pleinement de la dépréciation accélérée.

Par contre, on relève une anomalie dans les dernières mesures budgétaires : le seuil d’enregistrement de la TVA passe de Rs 2 millions à Rs 4 millions, pour dit-on, aider les PME mais en même temps, l’exonération d’impôt dont bénéficiaient certaines PME pour les cinq premières années d’opération a été abolie. Ce faisant, veut-on vraiment aider les PME ? Car ces deux mesures ne sont pas compatibles.

BUSINESSMAG. L’environnement généralde la fiscalité pour les entreprises est-il satisfaisant ?

La loi fiscale existante est satisfaisante en termes de taux d’imposition et de non-complexité des mesures. Les déclarations sont même facilitées de nos jours avec la soumission électronique directement sur le site web de la Mauritius Revenue Authority (MRA) ou à travers le système du Mauritius Network Services. Maurice est l’un des trois paysdu continent africain à avoir introduit la déclaration électronique d’après les relevés de la Banque mondiale.

BUSINESSMAG. Quelles sont les lacunesdu système ?

Certaines améliorations peuvent être apportées. Par exemple, une entreprise n’est pas autorisée à payer ses impôts par un transfert direct de son compte bancaire vers le compte de la MRA si le système du MNS n’est pas utilisé. Je pense qu’il est temps pour la MRA de se pencher sur cette problématique car cela évitera les longues files d’attente aux caisses et permettra à la MRA d’avoir de la trésorerie plus rapidement au lieu d’attendre deux à trois jours pour que les chèques soient approuvés par la banque émettrice.

Il y a aussi les investigations de la MRA qui couvrent généralement les cinq dernières années d’opération d’une entreprise. Nous souhaiterions que s’il doit y avoir investigation, elle puisse se pratiquer dans un délai plus rapide, disons une à deux années suivant la soumission de la déclaration. Ce qui évitera une perte de temps des dirigeants de l’entreprise qui doivent, à l’heure actuelle, aller fouiller dans des documents vieux de cinq ans et aussi se rappeler des événements qui ont eu lieu pendant cette période. Ce problème est exacerbé quand il y a un changement de dirigeants pendant la période concernée car les nouveaux ne savent pas ce que les anciens ont fait ou ne retrouvent pas les documents nécessaires qui ont été classés par les anciens.

BUSINESSMAG. La fiscalité des entreprisesmauriciennes se compare-t-elle favorablement à celle en vigueur dans d’autres pays du même niveau que Maurice ?

Avec la grande réforme de 2006, toutes les entreprises sont imposées à un taux unique de 15 % à l’exception des sociétés opérant dans le port franc et jusqu’à récemment, certaines PME qui en sont exonérées. De plus, les dividendes versés aux actionnaires sont francs d’impôts.

BUSINESSMAG. Quelle est votre analyse concernantl’évolution des recettes fiscales ces dernières années, s’agissant plus particulièrement de la taxe sur les compagnies ?

Les impôts payés par les compagnies sont passés de Rs 7,7 milliards en 2011 à Rs 8,3 milliards en 2012, soit une augmentation de 8 %. La hausse aurait pu être inférieure sans l’amnistie prévalant durant les premiers six mois de 2012 quand ceux ayant des impôts à régler pour les années précédentes pouvaient le faire sans payer les amendes et intérêts.

L’évolution des recettes fiscales dépend principalement de la croissance économique et des profits réalisés par les entreprises. àMaurice, nous avons un Self Assessment Systemavec les compagnies et les individuels calculant eux-mêmes leurs impôts et payant le montant calculé. La MRA a, de son côté, la possibilité d’avoir recours à un redressement si elle arrive à la conclusion que l’impôt payé n’est pas suffisant. Une suggestion serait que la MRA pourrait à l’avenir détailler ses recettes entre l’impôt payé lors de la soumission des déclarations et les redressements qu’elle a effectués.

BUSINESSMAG. Le secteur privé s’est parfoisplaint qu’on vend Maurice dans le monde comme une Low Tax Jurisdiction à 15 %, alors qu’il y a d’autres charges et taxes qui pèsent sur les compagnies. Quel est votre avis ?

C’est vrai qu’à part le taux d’imposition de 15 % sur les bénéfices, les entreprises doivent aussi payer la CSR Levyde 2 % qui est également calculée sur ses bénéfices imposables. Je dirais que c’est une bonne mesure sociale qui encourage une entreprise à participer à la responsabilité sociale afin de pouvoir évoluer dans un environnement meilleur pour l’épanouissement de l’entreprise. Par ailleurs, les banques et les entreprises dans le domaine de la téléphonie versent aussi une Levyen fonction de leurs chiffres d’affaires et bénéfices. Cependant, cette Levyest assez discriminatoire car elle ne concerne que deux secteurs d’activité de notre économie, mais le gouvernement estime juste de les faire payer car ils dégagent une profitabilité assez élevée.

Par ailleurs, il y a aussi l’Environment Protection Feepayé par certains types d’entreprises comme les hôtels, concasseuses, fabricants de matériaux de construction, importateurs de portables, batteries et pneus car le gouvernement considère que ces entreprises contribuent le plus à la pollution du pays.

Les contributions à la sécurité sociale (NPS), la formation des employés (HRDC Levy) et au National Savings Fund (NSF) sont aussi payées au gouvernement par les entreprises pour le bien-être de leurs employés. Finalement, toutes les charges et taxes ramènent le taux de taxe global à 28,5%, d’après le dernier indice Paying Taxesde la Banque mondiale. Ce taux est le septième plus bas en Afrique et est nettement inférieur à la moyenne de 57,4 % pour l’Afrique et 44,7% pour le niveau mondial.

BUSINESSMAG. Que révèle exactementle classement de Maurice dans le dernier rapport ‘Paying Taxes’ ?

Le classement est établi en prenant en considération le taux combiné des impôts et contributions payés par une entreprise type, le temps pris pour la préparation des diverses déclarations fiscales pour se décharger de ses obligations envers les autorités et le nombre de paiements fiscaux effectués aux autorités annuellement.

Dans le dernier rapport Paying Taxespublié par la Banque mondiale, Maurice se classe 12e sur 185 pays. Ce classement démontre que le régime fiscal mauricien est dans son ensemble favorable comparé aux autres pays. Par contre, il y a une mesure introduite récemment par la MRA qui risque de compromettre ce classement, il s’agit de l’obligation pour les entreprises ayant un chiffre d’affaires annuel de plus de Rs 10 millions de soumettre mensuellement une liste détaillée de ses ventes indiquant le nom et le numéro de TVA du client, la valeur des ventes et le montant de TVA. Là, c’est le facteur temps pris pour la préparation des déclarations qui sera affecté. Il incombe aux autorités d’innover et d’améliorer le régime fiscal mauricien pour permettre au pays de progresser dans ce classement mondial, mais pas au détriment de la croissance économique ou de l’obligation sociale.

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