Type to search

Actualités Autres

Révision du traité fiscal: repositionnement sur fond d’inquiétudes

Share
Révision du traité fiscal: repositionnement sur fond d’inquiétudes | business-magazine.mu

Quelques jours se sont écoulés depuis l’annonce de la révision du traité fiscal Inde-Maurice. Les opérateurs n’arrivent toujours pas à comprendre les motivations du gouvernement mauricien. Ils ne s’expliquent pas comment celui-ci a pu unilatéralement renoncer à ses droits de taxation au mépris des risques pour l’économie mauricienne.

Depuis le 10 mai, Roshi Bhadain, le ministre chargé du dossier sur le traité de non-double imposition avec l’Inde, s’attelle à essayer de dissiper les craintes suscitées par la décision de la révision de cette convention fiscale. Un exercice qui se révèle compliqué dans la mesure où son principal argument selon lequel l’Inde avait brandi la menace d’un avis de Termination of treaty n’a pas trouvé écho au Haut-commissariat de la Grande péninsule à Port-Louis. Anup Kumar Mudgal a été plus nuancé, soulignant que les choses ne seraient pas allées aussi loin.

Depuis, c’est la polémique avec en première ligne l’Opposition parlementaire et les opérateurs questionnant l’urgence d’un tel amendement. D’autant plus que ceux qui se sont succédé au Trésor public jusqu’à présent n’ont jamais franchi le Rubicon. Conscient du fait que, comme le souligne l’agence de notation Moody’s, «toute perturbation dans le secteur offshore exposerait l’économie et le secteur bancaire mauricien à des risques de contagion».

Et un ancien cadre d’une association regroupant les sociétés offshore de remarquer que le nouveau traité qui sera en vigueur le 1er avril 2017 ne met pas seulement Maurice dans une position désavantageuse face à ses rivaux, mais il le prive par la même occasion du statut de «most favoured nation». «The mother of all things is the Indo-Mauritian treaty. Nous avons déjà perdu notre DTAA avec la Chine et l’Indonésie et le nouveau traité avec l’Inde risque de provoquer le départ de plusieurs banques internationales», prévient-il.

Le traité privé de sa substance

 L’ancien chef de la diplomatie mauricienne, Arvin Boolell, abonde dans le même sens. Ce traité est «l’épine dorsale» du secteur offshore et l’article 13 portant sur la taxe sur la plus-value (Capital gains tax) est sacrée, martèle-t-il. D’où le fait que Port-Louis s’est toujours fait un devoir de répondre aux exigences indiennes s’agissant de leurs récriminations sur le «round tripping» mais sans céder le droit de taxation pour autant. Cela malgré toutes les revendications et des approches ayant pu ressembler à de l’arm twisting.

D’ailleurs, à un certain moment, il était même question de lier la signature d’un Comprehensive Economic Cooperation and Partnership Agreement (CECPA) entre les deux pays aux renégociations du traité. Mais là encore, il n’y a pas eu d’avancée. Toutefois, l’ancien gouvernement était disposé à faire des concessions, notamment sur la taxe sur la plus-value, soutient Arvin Boolell. Selon lui, dans le pire des cas, le gouvernement travailliste allait introduire une taxe d’environ 3 à 5 % sous l’article 13.

Avec recul, l’ancien ministre des Affaires étrangères considère que l’idéal aurait été de trouver un terrain d’entente avec Singapour ; en faire un allié. Mais lors des discussions avec New Delhi en 2006, Maurice était en position de force et se taillait la part du lion en matière d’investissement. Or, «ce n’est qu’après l’introduction de la clause portant sur les ‘limitation of benefits’ dans le traité singapourien que les investisseurs ont commencé à favoriser cette route car il ne répondait plus aux exigences des General Anti-Avoidance Rules», fait remarquer Arvin Boolell.

Interrogé sur des propositions de dédommagement faites dans le passé, l’ancien ministre déclare : «La première fois, cela a été fait de manière ambiguë alors que la seconde fois, lorsque que Rama Sithanen était ministre des Finances, $200 millions avaient été offerts pour renégocier le traité».

Qu’à cela ne tienne, l’industrie se retrouve désormais devant un fait accompli et malgré tous les cris d’orfraie, il est nécessaire de regarder vers l’avenir.

À la SBM Holding, le Chairman, Kee Chong Li Kwong Wing, explique qu’il est forcé de revoir sa stratégie pour les «outbound investments». Le secteur offshore génère seulement 2 % du business de la SBM actuellement, même si elle dispose de quatre branches en Inde. «On comptait sur le traité Inde-Maurice pour améliorer ce chiffre, mais nous sommes désormais dans l’obligation de revoir notre ‘business model’ pour notre expansion», fait-il ressortir.

Kee Chong Li Kwong Wing dit par ailleurs craindre une détérioration de la balance des paiements et un éventuel impact sur la roupie. «$86 milliards transitent par Maurice sous forme de fonds. En l’absence de cet argent, notre balance des paiements, qui est déjà affectée en raison des importations qui dépassent les exportations, sera dans une pire situation. Sans les dollars de l’offshore, on aurait été dans l’obligation de dévaluer la roupie pour pallier les dépenses extravagantes de l’ancien régime

Une analyse partagée par Moody’s. L’agence de notation américaine prévoit une détérioration de la balance des paiements à hauteur de 1 à 2 % du PIB annuellement.

Et l’Afrique ? À ce jour, environ 60 à 70 % du business dans le secteur du global business est généré à travers la convention fiscale avec l’Inde. Ce sera difficile de réaliser ces chiffres même si les investissements vers le continent sont triplés voire quadruplés, dit un ancien opérateur de l’offshore.

Tags:

You Might also Like