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Renganaden Padayachy – «Le temps du ‘jobless growth’ est révolu»

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Renganaden Padayachy - «Le temps du ‘jobless growth’ est révolu» | business-magazine.mu


BUSINESS MAGAZINE. Le Budget 2018-19 est-il populiste ou électoraliste ?

En un mot ? Réaliste !


BUSINESS MAGAZINE. Expliquez-vous ?

Depuis 2016, le Premier ministre et ministre des Finances apporte des réponses concrètes aux enjeux du pays, avec des mesures budgétaires conjoncturelles et structurelles pour améliorer notre trajectoire économique. Cela se voit et se ressent.

En 2018, le taux de croissance économique sera supérieur à celui de 2017, qui était déjà supérieur à celui de 2016. L’inflation sera maintenue à un niveau raisonnable pour un pays émergent, soit à 4,2 %. Et le taux de chômage qui était à son plus haut, soit de 8 % en 2013, si nous regardons les chiffres sur les dix dernières années, devrait reculer à 6,9 %. C’est le niveau le plus bas jamais enregistré depuis 1994.

Cela démontre que cette nouvelle approche économique centrée sur une distribution plus juste et plus efficiente rapporte ses fruits. C’est une indication claire que le temps du jobless growth est révolu. La reprise de l’activité économique est réelle et est démontrée par l’évolution positive de l’investissement qui, après une période de contraction entre 2012 et 2015, enregistre, depuis 2016, des taux de croissance positifs. Ces évolutions positives des perspectives économiques se reflètent à travers une amélioration sensible des indices de confiance des consommateurs et des entrepreneurs.


BUSINESS MAGAZINE. Et le Budget 2018-19 dans tout cela ?

S’il y a une mesure que je devrais retenir, c’est celle sur l’emploi et la formation.

Vous vous rendez compte que, pour la première fois, Rs 1 milliard seront déployées pour booster l’employabilité des jeunes. 

Depuis le temps qu’on parle du déséquilibre entre l’offre et la demande sur le marché du travail aujourd’hui, nous voyons se mettre en place une vraie politique pour résoudre cette problématique nationale. En investissant dans son capital humain, Maurice se donne définitivement les moyens de ses ambitions en matière de développement économique. Pour nous assurer de la durabilité et de l’inclusion de notre croissance économique, nous devons investir dans la force productive de nos jeunes.

Selon le Fonds monétaire international (FMI), il est primordial de continuer à investir dans le capital humain pour accroître la part du travail dans le revenu, contrairement à la tendance générale des dernières décennies.  


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BUSINESS MAGAZINE. À la lecture du Budget, nous avons toutefois le sentiment que le ministre des Finances concentre ses efforts à la cueillette des «low-hanging fruits». Partagez-vous ce sentiment ?

Il n’y a pas eu de changement de cap. Le Budget 2018-19 est une suite logique des exercices précédents. L’humain est toujours placé au centre du développement économique. C’est la philosophie du social-libéralisme qui met au centre de la pensée économique le développement tant intérieur que matériel des êtres humains. 

À travers un bon nombre de mesures dévoilées, le Premier ministre et ministre des Finances continue d’aborder frontalement la question des inégalités. Nous avons eu, depuis 2016, des mesures comme la Monthly subsistence allowance ou encore le Cash award aux enfants vulnérables pour éliminer la pauvreté extrême, le Negative income tax et surtout le salaire minimum pour combattre la pauvreté relative et les inégalités salariales. Et, pour cette année fiscale, la diminution du taux de taxation de 15 à 10 % pour ceux touchant Rs 50 000 ou moins.

Vous vous rendez compte que, selon Statistics Mauritius, 94 % de la population a des revenus inférieurs ou égaux à Rs 50 000. Ces différentes mesures ne pourront qu’être bénéfiques à ces centaines de milliers de Mauriciens qui vont en bénéficier, boostant ainsi la dynamique de confiance, un élément primordial à notre développement économique et social. 


BUSINESS MAGAZINE. N’empêche, il y a de nombreuses critiques…

Nombreuses, je ne crois pas. Il y a consensus, aujourd’hui, allant des mouvements syndicaux aux organisations patronales autour de cette nouvelle philosophie économique.  

J’ai constaté qu’il y a deux ou trois chroniqueurs économiques qui aimeraient accélérer le processus ultra-libéral. Pour eux, nous devrions toujours aider les plus fortunés au détriment des plus vulnérables. Je vous rappelle qu’ils étaient farouchement opposés à la mise en place du Negative income tax, du salaire minimum ou encore du Solidarity levy.


BUSINESS MAGAZINE. Et cela a le mérite de vous rendre furieux ?

Non, je ne le suis pas mais plutôt stupéfait par autant de vilenies de la part de ces experts auto-désignés. Ils n’arrêtent pas de critiquer et ne respectent pas le libre arbitre de chacun. Ils veulent toujours imposer leur modèle ultra-libéral. Or cela ne fonctionne plus. Il y a d’autres alternatives et la démonstration est clairement faite.

Remarquons aussi que certains avaient prédit que le Solidarity levy imposé aux personnes les plus riches à Maurice ne rapporterait que Rs 100 millions et que, par conséquent, cette taxe serait inefficace. Or, les faits sont tout autre. Cet impôt va rapporter aux caisses de l’État jusqu’à 1 milliard de roupies. Il a permis de financer le Negative income tax. Une mesure qui a touché jusqu’ici quelque 75 000 salariés.

C’est l’occasion pour eux de revoir leurs mathématiques. Le monde a évolué et nous ne pouvons éternellement vivre dans le passé. Certaines pratiques appartiennent au passé. Or, pour avancer, le pays a besoin d’idées nouvelles. 


BUSINESS MAGAZINE. Vous serez d’accord qu’il est nécessaire de créer la richesse avant de la redistribuer ?

Tout à fait, et c’est ce qui se passe. Vous noterez que l’économie mauricienne est dans une phase ascendante. Nous sommes passés d’une croissance du produit intérieur brut (Pib) de 3,2 % en 2012 à 3,9% en 2017. Ce qui représente une progression du Pib de 0,7 % sur 5 ans. Cette progression est remarquable.


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BUSINESS MAGAZINE. Estce suffisant pour initier dès maintenant une démarche de partage ?

Cette notion de partage est très importante en économie. Nous ne pouvons pas avoir une société à plusieurs vitesses, avec des mesures ciblées uniquement pour le haut de la pyramide sociale.

Cette idée selon laquelle aider les plus favorisés permet en retour d’aider les moins aisés est obsolète. Elle n’a jamais porté ses fruits et a eu pour résultat une montée inexorable des inégalités et de la pauvreté dans notre pays. Cela est reflété par la hausse du coefficient de Gini démontrant de manière on ne peut plus clair le creusement des inégalités en matière de revenus. 

Or, de nombreuses études démontrent de manière empirique l’impact négatif de l’augmentation des inégalités sur la croissance économique. Selon l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), une hausse du coefficient de Gini qui mesure l’inégalité des revenus de 0,03 point peut entraîner une baisse de la croissance économique de 0,35 point de pourcentage.

Aujourd’hui, nous avons une croissance économique beaucoup plus inclusive. Les derniers chiffres de Statistics Mauritius montrent une baisse du coefficient de Gini, impliquant un recul des inégalités. En y ajoutant l’impact du salaire minimum, du Negative income tax et de la baisse de l’impôt sur le revenu à 10 % pour ceux touchant jusqu’à Rs 50 000, cela réduirait certainement l’indice de Gini sous la barre de 0,4. Cela indique que cette nouvelle approche économique, en rupture complète avec la doctrine ultra-libérale que nous avons connue sur la période 2006 à 2014, apporte bien des résultats.


BUSINESS MAGAZINE. Vous parlez de nouvelle approche mais au-delà des slogans comme «Transformative journey», c’est quoi la philosophie du dernier Budget ?

Le Premier ministre s’est positionné à contre-courant de la philosophie ultra-libérale qui nous a guidé au cours de la précédente mandature. L’humain, la confiance et la notion d’inclusion sont au cœur de cette nouvelle pensée économique. Il en ressort, sans conteste, une dynamique plus novatrice. La progression des indices de confiance des consommateurs et des entrepreneurs témoigne de ce nouvel état d’esprit.


BUSINESS MAGAZINE. Toujours est-il qu’une croissance supérieure à 4 % paraît inaccessible voire une utopie tellement nous avons raté le coche.

L’économie est sur une courbe haussière et comme vous l’avez certainement constaté, nous sommes au seuil de la barre psychologique de 4%. La Banque mondiale a récemment rehaussé de 0,2 point sa prévision de croissance pour Maurice. Cette institution prévoit un taux de croissance économique de 4 % pour notre pays en 2018 et 4,1 % pour 2019. 

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