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Arbitrage international: Mohamed El Baradei plaide pour une réforme

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Arbitrage international: Mohamed El Baradei plaide pour une réforme | business-magazine.mu

Une décision d’un tribunal d’arbitrage peut avoir des ramifications multiples. Il peut ainsi advenir qu’un gouvernement se retrouve en fâcheuse posture à la suite d’un jugement en faveur d’un investisseur lésé. Il faut réformer le système actuel, insiste le diplomate Mohamed El Baradei, et l’harmoniser avec les lois internationales.

L’ancien vice-Président de l’Égypte et prix Nobel de la paix, Mohamed El Baradei, a, dans un discours de près d’une heure, décortiqué les faiblesses de l’actuel systèmed’arbitrage international et formulé des propositions en vue de le réformer. C’était lors de la cérémonie d’ouverture de l’International Council for Commercial Arbitration (ICCA) 2016.

Il n’existe pas de cohésion dans la jurisprudence de l’arbitrage d’investissement, a déclaré Mohamed El Baradei. Ce type d’arbitrage, qui couvre très souvent les voies que doivent explorer les États et les investisseurs en cas de litige, n’est régi par aucune jurisprudence internationale qui définit clairement les règles de façon à prédire l’issue des litiges. «L’arbitrage international est parfois comparé à un bol de Spaghetti», a-t-il soutenu.

Il a cité comme exemple le cas de CME vs La République thèque et celui de Lauder vs La  République tchèque où deux tribunaux d’arbitrage ont donné des avis différents sur un problème de même nature ayant trait à une interprétation divergente sur deux traités de commerce. Il se peut ainsi que la décision d’une juridiction soit en conflit avec les lois internationales.

Pour éviter ce genre de problème, Mohamed El Baradei suggère la création d’un «cadre juridique international pour coordonner et contribuer à rendre la jurisprudence de l’arbitrage international plus cohérente». La proposition de Mohamed El Baradei implique une nouvelle approche dans la rédaction des traités bilatéraux. Il s’agit pour les gouvernements de bien cerner les enjeux et de se mettre à l’abri en cas de litige de la part d’un investisseur étranger. C’est une question de protection de l’intérêt public, fait-il ressortir.

Dans un cas récent en Allemagne, une multinationale a exigé réparation après la décision du gouvernement allemand de suspendre la production de l’énergie nucléaire. Vu que les décisions d’un tribunal d’arbitrage contraignent les États à les appliquer, ceux-ci peuvent être forcés de revenir sur des décisions qui ne sont pas nécessairement bonnes pour l’investisseur étranger, mais qui ont été prises dans l’intérêt national. Donc, pour éviter tout conflit et afin qu’ils puissent légiférer librement sur des questions liées à l’immigration, la pauvreté ou aux droits humains, les pays développés et en voie de développement «doivent revoir leur approche vis-à-vis des traités bilatéraux et s’assurer qu’ils sont conformes aux nouveaux concepts d’équité et de responsabilité sociale de l’entreprise», souligne le diplomate égyptien.

Dans certains cas, prévient Mohamed El Baradei, l’arbitrage peut être utilisé comme un paravent par un investisseur véreux pour éviter des poursuites eu égard à l’évasion fiscale ou la corruption. Celui-ci pourrait, par exemple, se cacher derrière des clauses de confidentialité pour que ses crimes ne soient pas exposés au grand jour. Pour éviter ce genre d’abus du système, soutient Mohamed El Baradei, il est impératif que les États signent et adoptent les réglementations sur la transparence établies par l’United Nations Commission on International Trade Law et la Mauritius Convention on Transparency. Toutefois, comme le fait remarquer Mohamed El Baradei, le traité mauricien n’a été signé que par peu de pays et a été ratifié uniquement par Maurice. Ces réglementations qui concernent l’arbitrage d’investissement sont entrées en vigueur en avril 2014 et donnent une certaine flexibilité aux signataires en leur permettant d’exprimer des réserves ou de ne pas appliquer une partie spécifique.

Le prix Nobel de la paix n’a pas manqué d’attirer l’attention sur le déficit de l’arbitrage d’investissement en Afrique. La majorité des litiges en Afrique sont décidés par des Européens et des Nord-Américains. À l’International Chamber of Commerce et la London Court of International Arbitration, les juges d’arbitrage africains nommés en 2014 représentaient entre 1 % et 3 %. Seulement 5 % des litiges liés à l’Afrique ont été entendus sur le continent. À une question de Business Magazine s’il pensait que Maurice a de bonnes chances de devenir un siège pour l’arbitrage régional à l’avenir, Mohamed El Baradei a répondu qu’il l’espérait. Le traité tripartite pour la création d’une zone de libre-échange en Afrique de l’Est inclut la mise sur pied d’un mécanisme régional pour la résolution de litiges et donc l’arbitrage y occupera une place prépondérante. Les négociations sont en cours pour décider du pays qui accueillera son siège permanent. Maurice a toutes ses chances.

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