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Femmes au pouvoir : les premières fissures dans le plafond de verre

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Bien qu’elles occupent des postes managériaux, les femmes peinent toujours à accéder aux hautes sphères des organisations. car le réflexe patriarcal perdure. Or, il y a une réelle volonté de la part des pouvoirs publics et du secteur privé de faire bouger les lignes. Business Magazine part à la rencontre de certaines de ces femmes qui occupent des postes de direction et militent pour une meilleure parité des genres en milieu professionnel.

DANS l’édition 2023 du Top 100 Companies, on recense trois femmes présidentes de conseils d’administration et quatre femmes occupant le poste de CEO, ainsi qu’un petit nombre de femmes siégeant au conseil d’administration. Bien qu’il y ait eu des progrès, puisque l’édition 2021 du Top 100 Companies ne comptait aucune femme CEO, il reste encore un long chemin à parcourir en termes de représentation féminine au sein de la direction et des conseils d’administration à Maurice.

Il est inadmissible qu’à Maurice au 21e siècle, nous ne comptions que quatre femmes CEO et trois femmes présidentes de conseils d’administration parmi les Top 100 Companies. La dynamique socio-économique et culturelle de notre île doit évoluer en fonction de l’époque. Quelle image cela renvoie-t-elle de nos femmes professionnelles talentueuses ? Le faible nombre de femmes aux postes de direction dans les grandes entreprises instaure un plafond invisible dans l’esprit de nos jeunes filles, les futures professionnelles de demain. On peut légitimement se demander si ces jeunes filles ont une chance statistique de rejoindre un jour la haute direction d’une entreprise figurant dans le Top 100.

Le patriarcat constitue un obstacle concret à l’avancement des femmes vers les postes de direction. Les structures organisationnelles, historiquement sous l’emprise masculine, ont souvent créé un environnement où les femmes sont exclues des plus hautes sphères décisionnelles. Les stéréotypes de genre persistent également, générant des préjugés inconscients qui restreignent les opportunités professionnelles des femmes.

Dans le monde des affaires, les femmes ont longtemps dû batailler pour accéder aux plus hauts échelons des organisations. Malgré les avancées réalisées ces dernières décennies, les barrières persistantes et les stéréotypes de genre entravent encore leur ascension vers les postes de direction. Néanmoins, une lueur d’espoir se profile à l’horizon alors que les pouvoirs publics et le secteur privé s’engagent de plus en plus à promouvoir l’égalité des genres en milieu professionnel.

Effectivement, malgré ces défis persistants, on observe une volonté croissante de rompre avec ces schémas établis. Les autorités publiques, conscientes des bénéfices économiques et sociaux de la diversité des genres en milieu professionnel, mettent en place des politiques et des initiatives pour promouvoir l’égalité des chances. De même, de nombreuses entreprises reconnaissent désormais que la diversité de genre au sein de leur personnel favorise l’innovation, améliore la prise de décision et renforce leur image de marque.

DU CHEMIN À PARCOURIR

L’une des mesures les plus progressistes du Budget 2023- 2024, c’est la décision d’imposer aux sociétés cotées un quota de représentation féminine de 25 % sur leurs conseils d’administration. Pour certains observateurs, le gouvernement a eu raison de franchir le Rubicon et de faire de la discrimination positive pour casser certaines mentalités patriarcales.

Il est largement reconnu que la composition des conseils d’administration et le leadership jouent un rôle crucial. L’introduction de quotas au sein des conseils d’administration est relativement plus réalisable que dans les comités exécutifs. D’après le rapport sur l’écart entre les genres, il faudra encore 268 années pour réduire l’écart entre les hommes et les femmes en matière de participation économique. Par conséquent, sans l’adoption de quotas, cette égalité restera un objectif inaccessible.

Quoiqu’un an après, des défis subsistent malgré les efforts et les mesures déployés. De l’avis de Céline Planel, fondatrice et Managing Director de Beyond Communications, bien que l’on observe une certaine progression dans l’augmentation de la représentation des femmes dans les postes de prise de décision, la persistance de la violence basée sur le genre et des inégalités dans les responsabilités domestiques rappellent que la véritable égalité des genres nécessite des actions supplémentaires. Ainsi, malgré les avancées réalisées, il reste encore du chemin à parcourir, et des efforts supplémentaires seront nécessaires de la part des gouvernements, mais aussi de la société civile afin de surmonter ces défis et atteindre une égalité des genres complète.

«Dans l’ensemble, il me semble que les progrès observés à Maurice sont indéniables, mais nous devons rester vigilants face aux défis persistants qui entravent la pleine réalisation de l’égalité de genre et de l’inclusion sociale. Nous avons accompli des pas significatifs, mais il est crucial de maintenir un engagement continu tant au niveau politique que social pour créer un avenir véritablement équitable pour tous les Mauriciens», observe Céline Planel. Et de poursuivre qu’en attendant l’approche du prochain Budget pour connaître l’impact véritable de ces initiatives, il faudrait analyser de plus près le rapport du Forum économique mondial publié en juin 2023, lequel met en lumière des lacunes malgré les avancées telles que la participation croissante des femmes sur le marché du travail, notamment dans le secteur informel.

À Maurice, les femmes ont réalisé des progrès significatifs sur le plan professionnel. Cependant, leur représentation dans les postes de direction demeure restreinte. Afin de renforcer leur autonomisation économique, une approche multidimensionnelle est essentielle. Pour Céline Planel, il est crucial d’améliorer leur accès à l’éducation et à la formation professionnelle afin de leur permettre d’acquérir les compétences nécessaires pour exceller dans divers secteurs économiques. En parallèle, la promotion de politiques visant à concilier travail et vie personnelle est essentielle pour aider les femmes à jongler entre leurs responsabilités professionnelles et familiales, favorisant ainsi leur épanouissement professionnel sans compromettre leur bienêtre personnel.

«De plus, il est impératif de renforcer l’accès au financement pour les entrepreneuses en éliminant les obstacles qui les empêchent d’obtenir des capitaux pour démarrer ou développer leurs entreprises. En fournissant un soutien financier adéquat et en facilitant l’accès aux ressources, nous encourageons l’innovation et la croissance économique portées par les femmes, contribuant ainsi à renforcer leur position dans le monde du travail et dans les sphères décisionnelles de Maurice», précise Céline Planel.

De son côté, Marie-Noëlle Elissac-Foy, fondatrice et directrice de The Talent Factory, souligne que ce qui reste préoccupant aujourd’hui est la persistance d’un biais inconscient. Bien que certaines entreprises commencent à prendre des mesures concrètes pour sensibiliser leurs équipes à ces stéréotypes de genre, elles sont malheureusement encore peu nombreuses.

«Il ne faut pas chercher loin pour une explication : nous vivons dans un monde patriarcal avec un déséquilibre des pouvoirs. Cessons de perpétuer cette perception qu’il faut former les femmes pour qu’elles siègent sur des conseils d’administration ou intègrent des équipes de direction. Cela nourrit ce biais inconscient. Le pouvoir décisionnel des entreprises est encore trop concentré entre les mains des hommes. C’est une réalité. L’ONU Femmes rappelle qu’au rythme actuel, il faudra près de 300 ans pour atteindre l’égalité de genre. C’est pour cela que je reste en faveur de quotas ou de mesures concrètes qui permettent de rattraper ce retard. Les mots ne suffisent plus», fait ressortir Marie-Noëlle Elissac-Foy.

Pour elle, une inclusion réelle et soutenue des femmes équivaudrait à une réelle croissance économique et à une croissance durable. Et surtout, il s’agirait de reconnaître qu’à Maurice, l’intégration des femmes dans les activités économiques est tout simplement importante.

Dr Myriam Blin, Gender Economist, est convaincue qu’aujourd’hui, les femmes mauriciennes constituent une composante essentielle de la vie économique du pays. Bien qu’elles l’aient toujours été, leur contribution était largement invisible jusqu’aux années 1980, principalement concentrée dans les activités non rémunérées au sein du foyer ou dans les entreprises familiales.

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