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Équipements de terrassement: Un marché qui se rétrécit

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Équipements de terrassement: Un marché qui se rétrécit | business-magazine.mu

La mauvaise performance du secteur de la construction et le ralentissement dans l’agriculture ont lourdement impacté sur le marché des équipements de terrassement ces dernières années. Avec pour conséquence que le secteur s’amenuise au fil des ans. Mais les opérateurs gardent espoir avec le retour graduel vers de meilleures affaires qui se confirment au deuxième semestre 2016.

Le marché des équipements de terrassement et autres équipements lourds est intimement lié au secteur de la construction et à l’agriculture : deux secteurs qui n’affichent pas la forme en ce moment. En conséquence, l’impact sur les opérateurs de ce segment s’exprime à plusieurs niveaux, bousculant les réalités auxquelles ils doivent faire face.

Selon les dernières estimations de Statistics Mauritius, le secteur de la construction a contribué négativement au PIB (0,2 %). La croissance dans le secteur a ainsi subi une contraction de 0,8 % en 2015, les conséquences selon les statisticiens d’un déclin de 2,6 % dans les investissements dans ce secteur et d’une croissance de seulement 2,5 % au niveau des machines et équipements.

Cette morosité latente et récurrente du secteur, l’année dernière, est confirmée par ceux que nous avons rencontrés. «Le bilan de notre société pour l’année 2015 a été très difficile, car le secteur de la construction n’a pas été très actif. Il n’y a pas eu de gros chantiers qui auraient entraîné la vente d’équipements», observe Patrick Webb, directeur général de Prime Plant. «Le secteur n’est pas au top de sa forme et beaucoup sont dans le rouge», renchérit Ritesh Ujoodha, directeur d’UMCL. «2015 a été médiocre et le secteur de la construction a connu une de ses pires années. Les stocks d’équipements ont finalement été épuisés mais la profitabilité n’a pu être maintenue», confirme Jean-Luc Mamet, Sales Manager de Mecom.

D’autres tiennent un discours plus modéré. «Il n’y a pas eu de réelle relance du secteur en 2015. Avec le changement de gouvernement, le programme des gros travaux a été modifié. Certains ont pris du retard, d’autres ont été annulés mais on constate que l’activité s’est débloquée en fin d’année. En ce début 2016, on sent bien que le dynamisme revient avec le retour de notre clientèle», constate Yannick Mac Donald.

Les périodes creuses permettent toutefois aux opérateurs de se structurer davantage. «Le secteur a été latent et sans gros projets en 2015 ; cela nous a permis de finaliser le rachat de TEML et de nous préparer pour le reprise, en créant notamment une Business Unit ‘Agro-Industrie’. Nous avons profité de la stagnation du marché pour aménager nos nouveaux locaux et ateliers, que nous avons inaugurés en octobre dernier, avenue Jade à Pailles», confie Frédéric Motet, Sales Manager d’Axess.

Un paysage en constante mutation

Les opérateurs du segment des équipements lourds spécialisés interviennent aussi dans le secteur agricole, qui, lui aussi, fait l’objet d’un retour mitigé des opérateurs. «Au niveau de l’agriculture, avec la nouvelle baisse annoncée du prix du sucre, l’industrie sucrière n’a pas la grande forme mais les sucriers s’y sont préparés et l’industrie cannière a commencé à intégrer des métiers à partir de la canne. Cependant, les parcelles de terre se réduisent et certaines entreprises n’y croient plus. L’agriculture passe par des moments troubles mais quand la clientèle se remet en question, nous sommes très souvent appelés à réfléchir avec eux à de nouvelles solutions», nous indique Frédéric Motet. «Nous traitons avec la communauté des planteurs et des sucriers depuis longtemps. Nous intervenons dans la préparation pour la mécanisation et dans la récolte. Le prix du sucre à la baisse pèse beaucoup sur le secteur», soutient Yannick Mac Donald. Selon lui, certains projets subventionnés par l’Union européenne devraient aussi amener du travail dans le futur.

Les intervenants rencontrés dans le cadre de ce dossier sont aussi les témoins privilégiés de l’évolutions du secteur de la construction. «Les concessionnaires gardent de moins en moins de stock car le secteur est en berne», commente Ritesh Ujoodah. Même constat de la part de Jean-Luc Mamet : «Le marché s’est considérablement réduit, représentant moins de 200 machines annuellement. Les sociétés n’ayant pu contenir des pertes consécutives ont disparu du paysage. Les nouveaux opérateurs sont très rares et quand ils réalisent que les investissements sont trop importants, ils mettent la clef sous la porte ou préfèrent se tourner vers des domaines moins exigeants.»

«En 2015, le volume d’importations d’équipements a nettement baissé à Maurice. Par contre, nous sommes satisfaits de notre performance, notre part de marché ayant encore progressé, notamment avec Volvo Construction Equipment, nous permettant de consolider notre position sur ce marché», fait part Didier Jauffret, directeur exécutif de Leal Équipements Cie Ltée (LEC).

Traitant souvent avec les entrepreneurs, les fournisseurs d’équipements lourds et de services y relatifs portent aussi un regard sur le comportement et les tendances du marché. «Les grandes entreprises font bien souvent appel aux petits entrepreneurs pour la location d’équipements car ces derniers sont flexibles, précis et la durée d’engagement est généralement déterminée. Les petits sont donc voués à grossir grâce aux grandes entreprises qui ont recours à eux pour réduire leurs coûts et reconcentrer leur capital sur les équipements dont ils ont besoin. Le problème pour les petits entrepreneurs réside dans l’accès au financement. Les banques et organismes financiers prennent de moins en moins de risques et redoublent de vigilance à causes de précédents, de mauvaises pratiques de certains», note pour sa part Frédéric Motet . «Certains clients se tournent de plus en plus vers les prestataires réputés du secteur, privilégiant la qualité des produits et des solutions clé en main», affirme Yannick Mac Donald. Le contrat confiance se jouerait bien souvent sur la capacité à respecter les délais tout en maintenant la qualité des services. «Les tendances portent sur les équipements conçus pour la région et ses conditions difficiles. Le client cherche encore et toujours de la polyvalence à des prix compétitifs et nous sommes prêts à répondre à ses besoins», souligne Jean-Luc Mamet.

Les compétiteurs étrangers bousculent  le marché

Cependant, les opérateurs locaux dénoncent unanimement une concurrence déloyale des opérateurs étrangers qui s’implantent à Maurice, véritable point noir du secteur.

«Les sociétés de construction étrangères qui décrochent de gros contrats viennent souvent avec leurs équipements. Cela est décourageant et ne devrait pas être permis. Cette pratique ne permet pas aux sociétés locales de vendre les équipements et de profiter des opportunités qui leur sont offertes. L’État devrait absolument privilégier les compagnies de construction locales, car elles font travailler tous les secteurs d’activité liés à la construction», fait remarquer Patrick Webb.

Un avis que partage Kovy Naidoo, directeur de Grues Levages Investissements : «Aujourd’hui, les Chinois constituent une grosse concurrence pour les entrepreneurs locaux. Ils apportent leur propre main-d’œuvre qui travaille selon leurs normes : les week-ends et jours fériés, souvent jusqu’à 19 heures, avec donc un risque accru au niveau de la sécurité. Ils emmènent leurs propres équipements sur leurs normes encore une fois : volant à gauche, machines obsolètes, vétustes et modifiées en atelier. Au final, c’est de l’argent qui part en Chine.»

D’autres tiennent toutefois un discours plus modéré. «La concurrence étrangère bouscule les prix du marché mais fait quand même vivre quelques compagnies locales, surtout les fournisseurs de matières premières. Il n’y a toutefois pas beaucoup de perspectives pour les compagnies locales avec les investissements chinois», commente un opérateur souhaitant garder l’anonymat. «Le secteur n’est pas très actif et, en conséquence, l’importation d’équipements par les entrepreneurs étrangers a diminué. Il faudrait encourager les entrepreneurs étrangers à contribuer au secteur, que tout le monde y trouve son compte : on ne peut pas prendre sans rien donner. Certains le font malheureusement et le gouvernement devrait légiférer dessus et encourager ceux qui choisiraient des prestataires de services et fournisseurs locaux (matières premières, machines, produits…)», insiste Frédéric Motet.

«2015 a été une nouvelle année très difficile pour le secteur du bâtiment et des travaux publics avec des conséquences financières irréversibles pour certains entrepreneurs et constructeurs. Cependant, nous avons constaté avec une grande satisfaction que les compagnies locales sont aujourd’hui plus compétitives face aux compagnies étrangères vu les nouvelles conditions que ces dernières doivent respecter pour être éligibles à l’octroi d’un nouveau contrat», rappelle Didier Jauffret de LEC.

Des changements sont ainsi à prévoir dans la législation concernant l’activité des opérateurs étrangers à Maurice. En septembre dernier, Nando Bodha, ministre des Infrastructures publiques et du transport, accompagné de Gaëtan Siew, président du Construction Industry Development Board (CIDB), ont annoncé la réglementation du secteur de la construction. Selon les mesures formulées, les compagnies étrangères ne pourront pas importer des véhicules de construction qui existent déjà à Maurice. «Le marché reste compétitif avec les nouveaux venus. Le gouvernement a promis que dorénavant les contacteurs étrangers devront acheter localement et employer majoritairement de la main-d’œuvre locale. Reste à voir si ce sera respecté, surtout quand le financement est chinois», commente Jocelyn Labour, General Manager de Scomat.

 

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