Type to search

Autres Entreprendre

Instituts de beauté à La Réunion : Dans l ’antre du bien-être

Share
Instituts de beauté à La Réunion : Dans l ’antre du bien-être | business-magazine.mu

Il y a encore dix ans, les soins du corps étaient quasi inexistants à La Réunion. En 2015, le panorama a changé. Les instituts de soins se sont taillé une place de choix sur le marché réunionnais. La tendance et un contexte de crise économique anxiogène ont fait émerger un besoin réel pour des activités de détente. Dans ce contexte, la carte bien-être est devenue un atout clé aussi bien pour les professionnels de la beauté que pour les hôteliers désireux d’attirer davantage de clientèle au sein de leurs structures.

Dans un environnement marqué par des faits divers récurrents, des perspectives économiques peu réjouissantes et un pouvoir d’achat en berne pour la plupart des ménages français et réunionnais, le secteur du bien-être apparaît comme un opportuniste heureux. C’est l’un des rares secteurs d’activité à avoir connu une progression aussi fulgurante ces dix dernières années tant à La Réunion, qu’en métropole et à l’échelle mondiale.

Le secteur des spas, pour ne parler que de lui, aurait ainsi dégagé pas moins de 94 milliards de dollars en 2014 contre 60 milliards en 2007, selon les données rendues publiques par le Global Spa and Wellness Economy Monitor. Avec plus de 32 000 spas et 29,8 milliards de dollars, l’Europe restait, par ailleurs, la principale région de profit en 2014, devant l’Asie-Pacifique (18,8 milliards) et l’Amérique du Nord (18,3 milliards).

Soins anti-âge, massages, spa ; suivant la grande tendance française et internationale, les affaires ont véritablement décollé pour les entreprises réunionnaises positionnées sur ce créneau. L’île compte aujourd’hui plus de 600 instituts de beauté et de soins dont plus de 80% sont de très petites entreprises avec 0 ou 1 salarié.

Ces chiffres n’intègrent évidemment pas les établissements hôteliers, qui proposent leurs propres prestations. Dans ces lieux d’hébergement classés, l’offre n’a eu de cesse de s’étoffer pour accompagner le boom du tourisme du bien-être. Cela s’est traduit notamment par le recours à des soins de plus en plus personnalisés et à des techniques innovantes.

Une demande qui explose

En 2004-2005, l’offre était frémissante, balbutiante. À La Réunion, l’esthétique a toujours existé mais elle revêtait un aspect artisanal, avec beaucoup de petites structures en statut d’autoentrepreneurs. Ces entités étaient essentiellement basées sur la beauté, l’esthétique et non le bien-être et la relaxation. L’offre en massage était très limitée, les techniques amincissantes pas du tout démocratisées. L’offre ne demandait qu’à être enrichie, structurée pour amener les Réunionnais vers le bien-être, vers le massage. Sur l’offre classique (épilations, soins du visage, soins du corps) est donc venu se greffer le concept de spa bien-être hammam qui s’est largement s’est développé par la suite sur l’île.

La croissance exponentielle de l’activité au sein du premier institut Indriya, basé à Saint-Denis, a conduit à l’ouverture de deux autres antennes dans l’Est, à Saint-André (2011), et le Sud, à Saint-Pierre (2009), et logiquement à une augmentation de l’effectif et du chiffre d’affaires fixé à 1,3 million d’euros en mars 2015. De trois salariés au début de l’aventure, ils sont passés à une trentaine, signe d’une bonne santé financière.

À l’épreuve d’une conjoncture morose

Au plus fort de la crise financière, en 2009, le secteur du bien-être a maintenu le cap à La Réunion. À la tête des instituts Indriya et de Vals OI, société de distribution de produits pour les soins, la beauté et le bien-être à destination des professionnels, Franck Morel livre ses hypothèses pour expliquer ce phénomène : «La crise n’avait pas grandement impacté les personnes qui pouvaient s’offrir une séance de relaxation. Il y a aussi eu l’abandon de certains loisirs au profit d’autres. Concrètement, des foyers issus de la classe moyenne ont rogné certains budgets (restaurant, cinéma, etc.) pour privilégier des séances en institut.»

Avec le développement du secteur du bien-être à La Réunion, une nouvelle clientèle est apparue : celle des bons cadeaux. Indriya et d’autres ins-tituts ont identifié une nouvelle manne financière et parié sur ce nouveau service : «Notre métier a muté. Aujourd’hui, chez Indriya, un client sur trois entre dans l’un de nos instituts pour offrir un cadeau. Un tiers de nos clients ne sont pas ceux à qui l’on vend directement nos produits. Nous avons très vite intégré ce postulat dans notre réflexion pour ajuster nos prestations. En 2010, nous avons créé un outil Internet qui n’existait pas. La toile représente 10 % de notre chiffre d’affaires ; donc nous ne la négligeons pas», se félicite Franck Morel.

Le boom des bons cadeaux

La clientèle indirecte, celle qui vient dans un institut parce qu’elle s’est vu offrir un chèque cadeau au prix moyen de 80 euros, est l’objet des convoitises car elle devient à son tour prospect de la marque, de l’enseigne et contribue au succès des prestations. À Saint-Leu, Hanane Maleck, directrice du spa de l’institut Héritages du Maroc, l’a bien compris. Son époux et elle ont transformé les anciens locaux du Pôle Emploi en un véritable temple du bien-être, dédié à la détente et à la relaxation, doté d’infrastructures qui se veulent modernes tout en respectant la plus pure tradition marocaine.

Inauguré en 2014 sur l’axe principal du centre-ville saint-leusien, l’institut accueille une clientèle variée, exigeante et fidèle à la recherche d’un moment d’évasion dans un espace de quiétude.

«Dans le business, on dit que le temps, c’est de l’argent. À notre institut, nous avons choisi de prendre le temps pour être sûrs de satisfaire notre clientèle et nous assurer les positifs que l’on constate depuis l’ouverture d’Héritages du Maroc», souligne pour sa part le gérant, Yaaz Maleck.

Les hôtels classés au diapason

La tendance du bien-être a imprégné le domaine hôtelier également. Le Palm Hôtel****, premier hôtel éco-labellisé de l’île, a été pionnier avec la création de son spa Akea en 2007. À l’époque, l’offre se composait essentiellement de soins classiques et de quelques prestations détente.

Face au plébiscite de ses clients, à la demande croissante, l’établissement haut de gamme implanté aux portes du Sud sauvage de La Réunion a su faire évoluer son offre. Dans la continuité des grands aménagements entrepris en 2014, les bâtiments accueillant le spa ont ainsi été agrandis, laissant plus d’espace pour des vestiaires femmes et l’accueil des clients (25 en moyenne par jour). Sur le plan de l’offre bien-être, celle-ci s’est enrichie pour migrer progressivement vers des offres combinées alliant les prestations proposées par le spa à des formules comprenant l’accès à la plage artificielle de l’hôtel, un déjeuner, ou encore associées à de l’hébergement.

Manager du spa Akea pour le Palm et l’Ilhoa, Nathalie Malaplate insiste sur la cohérence des changements opérés par l’équipe : «Le travail mené tout au long de ces dernières années nous a permis d’élargir notre palette de prestations et de produits bien-être sans altérer l’ADN haut de gamme du Palm Hôtel et la qualité du service. En huit ans, le massage Akea n’est pas resté figé. Il a évolué, influencé par les formations techniques qui ont été dispensées au personnel et par la sensibilité des masseurs également qui affichent un vrai savoir-faire».

Les soins haut de gamme plébiscités

Niché sur les hauteurs de La Possession, le Lodge Roche & Tamarin - Village Nature mise, lui, sur le dépaysement total. «Ici, la durée d’un séjour moyen est de deux jours. Les personnes viennent vivre une expérience», indique d’entrée de jeu Christian Loga, directeur chargé de l’exploitation de cet hôtel de charme**** en activité depuis 2000. Pour rejoindre l’établissement haut de gamme, il faut emprunter une longue route qui serpente vers les montagnes et s’engouffrer dans un écrin de verdure, où les bois précieux et centenaires, pour certains endémiques de La Réunion, abritent une riche faune, et notamment des populations d’oiseaux en voie de disparition.

Au Lodge Roche & Tamarin, 80 % de la clientèle est locale. Nécessité donc de se renouveler constamment, de fidéliser. Les 20 % restants se partagent entre la clientèle étrangère et la clientèle business. Pour répondre à ces deux impérieuses nécessités, la direction de l’établissement hôtelier s’est alliée à des marques de renom : Carita pour les soins bien-être et LPG pour les cures d’amincissement. L’accent a été porté également sur le cadre luxueux avec un espace commercial de 350 m2 où se décline l’offre de bien-être à travers des prestations traditionnelles (hammam, sauna) et des soins plus spécifiques faisant appel aux dernières techniques en vogue dans les spas connus mondialement.

«Le service et le conseil, c’est notre ligne de conduite, les fondations de notre prestation sur mesure. L’équipe a un devoir de conseil et d’écoute. Notre client a besoin de ressentir un effet durable après son passage au spa», poursuit Christian Loga, qui assure se démarquer de ses concurrents à travers cette charte stricte. Depuis 2014, date à laquelle il a intégré l’équipe de direction du Lodge Roche &Tamarin - Village Nature, le professionnel poursuit une série d’objectifs : «positionner l’établissement hôtelier sur le segment haut de gamme, développer la clientèle touristique, business et asseoir sa notoriété sur les marchés extérieurs». Concernant ce dernier point, la clientèle européenne se montre plus captive qu’en France métropolitaine.

Les touristes étrangers qui accordent leur préférence à ce type d’hébergement réclament de l’atypique, une expérience, de l’exotisme, y compris dans les prestations bien-être pour lesquelles ils sont prêts à consacrer un gros budget (entre 80 et 200 euros par personne).

Quelle concurrence ?

Si elle s’est accrue avec la pléthore d’instituts traditionnels à La Réunion, la concurrence entre établissements positionnés sur le créneau haut de gamme reste pour l’heure limitée, dans la mesure où ces acteurs restent peu nombreux sur le département. Ils sont implantés dans des secteurs toujours stratégiques mais différents et affichent des offres qui se démarquent les unes des autres.

Si l’offre hôtelière premium semble désormais aller de pair avec des prestations bien-être, nombreux sont les professionnels de soins à jouer également sur leur polyvalence. Situé en plein cœur du chef-lieu, le hammam Sarah a déployé les moyens pour capter une autre
clientèle. En sus de ses 800 m2 d’espace dédié au bien-être, la structure s’est agrandie et se compose aujourd’hui d’un spa – pierre angulaire de l’activité –, de trois salles de restaurant et d’une école de danse orientale.

Le spa comme produit d’appel ? C’est la stratégie que certains professionnels ont choisie et qui semble porter ses fruits compte tenu de l’affluence enregistrée.

Tags:

You Might also Like